PARAGRAPHE 2 : Par la renonciation à certaines
pratiques commerciales
La résolution des litiges commerciaux internationaux a
permis de constater l'abandon progressif de certaines pratiques compromettantes
notées dans les relations commerciales internationales. Ainsi, nous
pouvons relever une renonciation à l'unilatéralisme(A) d'une
part, et d'autre part un abandon des pratiques anticoncurrentielles (B).
A) La renonciation à l'unilatéralisme
Le développement du commerce international repose
essentiellement sur le respect des règles et principes fondateurs du
système commercial international. Ce respect permettra, à
l'avance, de récuser les pratiques fallacieuses pouvant compromettre les
rapports commerciaux justes entre les parties n'ayant pas les mêmes
moyens et niveaux de politique commerciale. La pratique qui consiste à
prendre unilatéralement des mesures coercitives contre le non-respect
des engagements contractuels s'inscrit dans cette logique. C'est la
théorie de l'unilatéralisme. Celle-ci concerne l'ensemble des
instruments de politique commerciale restrictifs mis en place à la seule
volonté de l'Etat qui les met en oeuvre, administrés au niveau
national et sans référence aux règles
internationales.289
Dans le cadre de l'OMC, nous avons noté que
système commercial repose essentiellement sur les principes du
multilatéralisme. Les membres s'efforcent de se conformer aux
orientations de l'institution, lesquelles prévoient la résolution
de tous les différends relatifs au
286 Voir, le Préambule des Principes relatifs aux
contrats du commerce international, UNIDROIT, Rome, 1994
287 Cf. Emmanuel. S. DARANKOUM, « L'application des
principes d'Unidroit par les arbitres et les juges étatiques »,
RJT.2002.36, p 432
288 Voir, Peter. WINSHIP, « Private international law and
the UN. Sales conventions », Cormell International law journal,
1988-487 cité par F. FERRARI, in « Le Champ d'application des
principes pour les contrats internationaux élaborés par
l'UNIDROIT », RIDC, Vol 47, n°4, 1995, p 987
289 Cf. Jean-Marc. SIROËN « L'unilatéralisme des
Etats-Unis », AFRI, vol 1, 2000, p 571
non-respect des engagements inclus dans les Accords de
Marrakech de manière à ce que la prévisibilité
du système commercial international soit garantie.290
Justement, l'objectif de l'ORD est de servir, d'une part un cadre de
règlement des différends commerciaux multilatéraux, et
d'autre part un moyen de lutter contre les sanctions unilatérales prises
à l'encontre d'un membre récalcitrant. Ainsi, les membres en
conflits ne peuvent prétendre adopter des mesures de représailles
sans son autorisation. C'est dire que l'unilatéralisme est banni dans
les rapports commerciaux multilatéraux. Cette conception a
été rappelée par les panels dans l'affaire des navires
de commerce.291 Egalement, dans l'affaire section 301, le
groupe spécial a pu remettre en cause la mesure législative
américaine de 1974 qui permettait au Gouvernement américain de
procéder unilatéralement à des mesures de rétorsion
dès qu'il estimait qu'un membre avait concrètement violé
les engagements et les règles du commerce multilatéral. Or, cette
législation était en contre sens avec les règles
prescrites dans les Accords de Marrakech et particulièrement
dans le MARD. A cet effet, les panels ont considéré que l'article
23 paragraphe 1 du Mémorandum d'accord « impose à tous
les Membres le «recours» au processus multilatéral
défini dans le Mémorandum d'accord lorsqu'ils cherchent à
obtenir réparation d'une incompatibilité au regard de l'OMC. Dans
ces circonstances, les Membres doivent avoir recours au système de
règlement des différends prévu dans le Mémorandum
d'accord à l'exclusion de tout autre système, en particulier un
système d'exécution unilatérale des droits et obligations
au regard de l'OMC. Cette disposition, que l'on pourrait qualifier de
«clause d'exclusivité en matière de règlement des
différends», est un nouvel élément important des
droits et obligations des Membres au titre du Mémorandum d'accord.
»292 Toutefois, retenons que les Etats-Unis n'ont pas, par
exemple, l'obligation formelle de supprimer les fameuses clauses 301 et super
301,293 ils auront juste celle consistant à informer et
requérir l'autorisation de l'ORD avant de les mettre en oeuvre.
Autant que le développement des relations commerciales
internationales nécessite une réelle volonté pour les
acteurs de récuser certaines pratiques unilatéralistes, autant
qu'il exige l'abandon des pratiques anticoncurrentielles.
290 Voir, l'article 23 du Mémorandum d'accord
aux termes duquel « Lorsque des Membres chercheront à
obtenir réparation en cas de violation d'obligations ou d'annulation ou
de réduction d'avantages résultant des accords visés, ou
d'entrave à la réalisation d'un objectif desdits accords, ils
auront recours et se conformeront aux règles et procédures du
présent mémorandum d'accord. »
291Voir, Affaire, Communautés
européennes-Mesures affectant le commerce des navires,
2005.OMC.Doc.WT/DS301/R, Rapport du groupe spécial [Navires de
commerce]. Dans cette affaire, il a été retenu que : «
le Groupe spécial considère [...J que l'obligation d'avoir
recours au Mémorandum d'accord, lorsque les Membres cherchent à
obtenir réparation en cas de violation, couvre tout acte d'un Membre en
réponse à ce qu'il considère comme une violation par un
autre Membre d'une obligation dans le cadre de l'OMC par lequel le premier
Membre tente unilatéralement de rétablir l'équilibre des
droits et obligations en cherchant à obtenir le retrait de la mesure
incompatible avec les règles de l'OMC, en cherchant à obtenir une
compensation de cet autre Membre ou en suspendant des concessions ou des
obligations résultant de l'Accord sur l'OMC en ce qui concerne ce
Membre. »
292 Voir, l'affaire Etats-Unis-Articles 301 à 310
de la loi de 1974 sur le commerce extérieur, 1999,
OMC.Doc.WT/DS152/R, Rapport du groupe spécial [Section 301]
293 Cf. Géraud. GUIBERT, « L'Organisation mondiale
du commerce (OMC) : continuité, changement et incertitude »,
Politique étrangère n°3, 5ème
année, 1994, p 814
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