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L'aide au développement de l'union européenne et la gestion des finances publiques en Côte d'Ivoire.

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par henri joel langnissou
université catholique debl afrique de l ouest, unite universitaire dà¢â‚¬â„¢abidjan - Master en droitbpublic 2015
  

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PREMIERE PARTIE :

L'AIDE DE L'UNION EUROPEENNE, UN ATOUT POUR LA
GESTION FINANCES PUBLIQUES EN COTE D'IVOIRE

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A l'origine, l'intervention des partenaires européens dans le cycle de développement de la Côte d'Ivoire n'avait pas réellement d'incidences sur le cadre normatif de gestion des finances publiques. Cette intervention était principalement financière et consistait dans le financement de projets d'investissement pour la mise en place d'infrastructures de bases. Elle s'est transformée depuis les années 80 et surtout 9015, avec l'introduction de conditionnalités16, qui impliqueront un changement du modèle de gestion politique, budgétaire et financière. La nouvelle orientation donnée à la politique de coopération pour le financement du développement des partenaires européens17 avec la Côte d'Ivoire, va s'organiser autour des questions de gouvernance (chapitre 1) ; avec comme objectif principal l'efficacité des initiatives de la lutte contre la pauvreté dans le contexte du développement durable (chapitre 2).

15 Sur le plan des relations internationales économiques cette décennie sera marquée par la mise en place et application du consensus de Washington. Cette expression, utilisée pour la première fois en 1989 par l'économiste américain John WILLIAMSON, résume un ensemble de politiques économiques préconisées par la Banque mondiale et le FMI. A la base, ces recommandations avaient comme unique but de résoudre la crise financière de l'Amérique latine mais elles ont finalement structuré la pensée dominante du développement jusqu'au milieu des années 1990.

16 Terme didactique. Qualité de ce qui est conditionnel, qui dépend de certaines conditions. Promesse, clause conditionnelle. Dictionnaire Le Littré version numérique 2008.

17Les politiques de développement des Etats membres et de l'Union sont complémentaires. L'Union est aussi le plus important contributeur en matière d'aide au développement. Avec ses États membres, elle octroie plus de la moitié du montant global de l'aide publique au développement (APD). Statistiques OCDE.

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CHAPITRE 1 : LA BONNE GOUVERNANCE AU CENTRE DE LA
POLITIQUE D'AIDE

La lutte contre la pauvreté18, la bonne gouvernance et la sauvegarde de l'environnement sont au centre des préoccupations de l'UE. En effet, Le triomphe du libéralisme politique et économique19 dans les années 90, consécutif à l'effondrement du bloc de l'est, ouvrait déjà une nouvelle ère dans les relations de coopération internationale basée sur la promotion de la bonne gouvernance et le respect des principes démocratiques. L'appui aux processus de démocratisation et de promotion de la bonne gouvernance en Afrique fait désormais partie des priorités de la politique extérieure de l'UE. Il figure ainsi en bonne position dans la plupart des instruments juridiques et des programmes de partenariat entre l'UE et le groupe des Etats ACP20, auquel appartient la Cote d'Ivoire (section 1).

Les accords de coopération pour le financement du développement établis entre la Côte d'Ivoire et l'UE s'inscrivent dans cette nouvelle optique21. Ils mettent de plus en plus l'accent sur le renforcement de la démocratie avec une place de choix faite à la transparence des affaires publiques et partant des finances publiques (section 2).

18 Les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ont été établis à la suite du Sommet du Millénaire en Septembre 2000. La lutte contre la pauvreté constitue l'OMD n°1.

19 Le libéralisme est un ensemble des doctrines politiques et économiques qui font de la liberté individuelle, définie comme un droit naturel, la valeur suprême que toute collectivité humaine doit garantir et promouvoir. Dans sa variante politique, le libéralisme cherche à définir le type de régime qui permettra de garantir au mieux le respect de ces droits et de se prémunir contre les éventuels empiétements de l'État. L'État est ainsi pensé chez l'ensemble des libéraux comme un État minimal, voué à ses missions de régulation, qui s'oppose à l'État absolu du XVIIe siècle. À des titres divers, BENTHAM (J) et STUART MILL (J) en Grande-Bretagne, TOCQUEVILLE et surtout CONSTANT (B) en France sont, dans la première moitié du XIXe siècle, quelques-uns des principaux acteurs du courant libéral. Dans sa variante économique, le libéralisme s'applique à la défense de la liberté individuelle sur le marché. En s'appuyant sur la théorie des droits naturels, des économistes physiocrates comme P. de BOISGUILLEBERT ou QUESNAY (F) s'opposent au mercantilisme et dénoncent l'intervention économique de l'État. Pour ces auteurs, les individus doivent être laissés libres de poursuivre leur intérêt particulier puisque l'ordre social qui en résulte est le meilleur possible. Il existe en effet des lois naturelles qui permettent de concilier l'intérêt personnel et le bien-être général : ces lois sont celles du marché, régi par les principes de la concurrence pure et parfaite. La formule « laissez-faire, laissez-passer », du physiocrate V.de GOURNAY, résume cette première formulation du libéralisme en matière économique. Dans ce cadre, l'intervention de l'État doit être réduite au maximum. Au XIXe siècle, RICARDO (D), Stuart Mill (J), en Grande-Bretagne, SAY (J-B), en France, prolongent la réflexion d'Adam SMITH sur le sujet et font des années 1820-1914 l'âge d'or du libéralisme économique.

20 Article 9 de l'accord de Cotonou, révisé en 2005 & 2010.

21 Voir le Document de stratégie pays pour le compte du 10ème FED (2008-2013), pp 29-30.

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Section 1 : La démocratie, une conditionnalité à l'attribution de l'aide

C'est au coeur des institutions de coopération de la Communauté européenne22 que cette nouvelle politique de promotion et de protection des droits de la personne a vu le jour. Cette politique impose aux pays tiers demandeurs d'aide comme la Côte d'Ivoire, le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux ainsi que l'instauration de la bonne gouvernance au sein de leurs institutions (paragraphe 1). L'Accord de Cotonou et les différents instruments directeurs23 de la politique extérieure de l'UE donnent à cette conditionnalité, différentes approches de mise en oeuvre (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'exigence du respect des règles démocratiques

En 2006 la politique de coopération au développement de l'Union européenne s'est enrichie d'une déclaration24 qui définit les valeurs, principes, objectifs et moyens communs à mettre en oeuvre pour éradiquer la pauvreté dans le monde. Elle engage la Communauté et les États membres en leur qualité de donateurs bilatéraux. Cette déclaration constitue une innovation de taille en termes de coordination des acteurs européens, cependant les valeurs et principes dont elle fait étalage transparaissaient déjà dans le partenariat UE-ACP au sein de l'accord de Cotonou25. Ces principes que l'on retrouve dans les accords de financement26 passés entre la Côte d'Ivoire et la

22 Il faut entendre par Institution de coopération de l'UE, le Parlement européen, le Conseil européen, le Conseil, la Commission européenne, la Banque centrale européenne. Voir article 13 du Traité sur l'Union Européenne.

23 Le Traité sur l'Union européenne (traité UE), Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (traité FUE), le Consensus européen en matière de politique de développement (2005) etc.

24 « Le consensus Européen pour le développement », issue d'une Déclaration conjointe du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil, du Parlement européen et de la Commission, le 25 décembre 2005, in Journal Officiel de l'UE, C 46, 26 février 2006.

25 L'accord de Lomé IV (15 décembre 1989) y faisait référence en des termes moins explicites.

26 Ces accords sont établis conformément aux dispositions des articles 2 et 4 de l'annexe IV de l'accord de partenariat ACP-CE, signé à Cotonou le 23 juin 2000 tel que révisé en 2005 puis en 2010.

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Commission Européenne (CE) touchent tant et aussi bien à l'environnement politique (A) qu'à des questions institutionnelles (B).

A): Au niveau de l'organisation du pouvoir

En plus de son objectif d'un monde sans pauvreté, l'action de l'UE sur la scène internationale repose sur les valeurs démocratiques qui ont présidé à sa création27. Pour traduire cet engagement en faits, plusieurs initiatives tendant à la concrétisation du lien entre développement et démocratie, vont être prises. Avec la Côte d'Ivoire, l'Union s'appuie sur son aide au développement et plus spécifiquement sur la coopération pour le financement du développement28. Rappelons, si besoin en était que le partenariat UE-ACP ne date pas d'aujourd'hui et qu'il s'est organisé autour de plusieurs accords29 assortis de protocoles ou cadres financiers pluriannuels.

Si le dernier né de ces accords (Cotonou) se démarque des précédents, c'est sans nul doute du fait de la plus grande part donnée à la dimension politique au détriment de la dimension commerciale. Il n'en demeure pas moins pour autant qu'avec la Convention de Lomé IV30 révisée et assorti d'un nouveau protocole financier31 en 1995, l'on pouvait déjà déceler une nouvelle tonalité politique, conséquence évidente du Traité de Maastricht. En effet, une référence explicite à la reconnaissance des principes démocratiques et à la consolidation de l'État de droit32, amorce le lien entre l'aide communautaire au développement et les valeurs démocratiques. Quoique cette clause fut imprécise et manquait de force exécutoire, cela n'a pas empêché la condamnation du coup d'état du 24 décembre 1999 par l'UE33.

27 Cf. articles 2,3 & 21, paragraphe 1, du traité sur l'Union européenne (traité UE): portant mandat global et lignes d'orientation dans le domaine de la coopération au développement de l'Union.

28 Cf. Partie 4 de l'accord de Cotonou concernant coopération pour le financement du développement.

29 Les Accords de Yaoundé, les Conventions de Lomé et l'Accord de Cotonou.

30 La Convention de Lomé IV a été conclu le 15 décembre 1989 pour une durée de dix ans (1990-2000).

31 Le 8ème FED, signé à Maurice en novembre 1995.

32 Cf. article 5 de la convention de Lomé IV.

33 Voir intervention de KOULIBALY (M) (Ministre du Budget du gouvernement de transition Ivoirien 2000), in Politique africaine n° 77 - mars 2000, pp 131-132.

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Avec l'accord de Cotonou, la démocratie et l'État de droit ont, pour la première fois, été consacrés comme des « éléments essentiels34 » du partenariat UE-ACP. La Côte d'Ivoire se doit donc de développer sa culture démocratique en s'inspirant des principes démocratiques universellement reconnus, sur lesquels se fonde l'organisation de l'État pour assurer la légitimité de son autorité. Par ailleurs la légalité des actions de l'État doit se refléter dans son système constitutionnel, législatif et réglementaire, et dans l'existence de mécanismes de participation des citoyens à la conduite des affaires publiques.

L'État de droit quant à lui inspire la structure de l'État et les compétences des divers pouvoirs. Il implique, en particulier, la définition des moyens effectifs et accessibles de recours légal, un système judiciaire indépendant garantissant l'égalité devant la loi et un exécutif qui est pleinement soumis au respect de la loi.

En pratique, l'UE n'a de cesse de réaffirmé que l'aide ne peut être efficace que dans un contexte politique stable et basé sur des principes démocratiques. En Côte d'Ivoire elle utilise le Fonds européen de développement35 (FED) et d'autres moyens d'assistance technique pour accompagner le renforcement de l'État par la bonne gouvernance36. Tout ceci en oeuvrant dans le sens de la consolidation de la paix et d'un environnement politique et sociale respectueux des droits de l'Homme et libertés fondamentales.

34 Cf. Articles 9 &10 de l'Accord de Cotonou. En droit international (Convention de vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969), cette formule signifie que si une partie considère qu'une autre a manqué à une obligation concernant l'un des éléments essentiels, elle peut si des consultations en vue de rétablir la situation ont échoué prendre des mesures appropriées, en d'autres termes des sanctions, qui peuvent aller jusqu'à la suspension de la coopération.

35Le Fonds européen de développement (en abrégé, FED) est le principal instrument financier de la coopération entre l'Union européenne et le Groupe des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). A ce titre, il sert, depuis plus de quarante ans, à financer toute une panoplie de programmes et de projets de développement dans l'ensemble des pays ayant conclu des accords de partenariat avec l'Union (successivement, Accords de Yaoundé, Conventions de Lomé, Accord de Cotonou).

36 Voir les objectifs des programmes indicatifs nationaux définis entre l'UE et la Cote d'Ivoire dans le cadre des 10ème et 11ème FED.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery