B) : La pratique des aides liées
L'APD bilatérale des Etats européen est en
général une « aide liée ». Cela implique que
l'argent prêté ou donné sera utilisé pour acheter
des produits ou des services exportés par le pays donateur. L'aide sous
la forme de dons ou de prêts est souvent conditionnée à
l'attribution de tout ou partie des contrats d'équipements, de travaux
ou de services à une entreprise de l'État donateur125.
Du côté de la France, dans un rapport sur la Banque mondiale et le
FMI présenté à l'Assemblée nationale, on pouvait
lire le passage suivant : «Les résultats globaux en
matière de taux de retour ou de parts de marchés au profit des
entreprises françaises sont bons mais ils cachent d'importantes
disparités géographiques et sectorielles. (...) La France est
affectée par des facteurs spécifiques qui sont le reflet de la
présence commerciale des entreprises françaises : un fort
tropisme pour l'Afrique qui contribue largement au résultat global (45%
des décaissements de la Banque vers l'Afrique se font en faveur des
entreprises françaises) (...) »126.
L'APD multilatérale européenne n'échappe
pas à cette critique. En effet la participation aux procédures de
passation de contrats pour l'exécution des projets et programmes,
financés par le cadre financier pluriannuel de coopération au
titre de l'Accord de Cotonou est ouverte aux personnes physiques ou morales
établies dans un État ACP, un État membre de la
Communauté européenne, ou à toute personne physique ou
morale établie dans un des pays les moins développés. Mais
étant donné la faiblesse des capacités techniques et
logistiques des entreprises des Etats ACP, et celle des Etats
sous-développés en général, ces contrats et
marchés sont le plus souvent attribués à des
soumissionnaires d'origine européenne. C'est le cas pour bien de
marchés d'équipement et de travaux ayant cours en Côte
d'Ivoire.
125 Voir Afrique contemporaine n° spécial
188 intitulé : Les aides à l'Afrique en question, 1998. P 169
« L'OCDE et l'évolution de l'aide par prêts »
PACQUEMENT (F), pp 160-171
126 Rapport d'information sur les activités et le
contrôle du Fonds monétaire international et de la Banque
mondiale, Assemblée nationale, 13 décembre 2000.
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A priori, l'aide liée pouvait paraître
bénéfique pour tous. Elle aide les pays en développement
en leur octroyant des dons ou des prêts à des conditions
avantageuses pour la réalisation d'études ou de travaux
d'infrastructures, et elle crée une demande pour les exportations
européennes en matière d'équipements et de services
d'ingénierie. Cependant cette pratique mène à des appels
d'offres restreints127 à un petit groupe d'entreprises
multinationales. Ce qui a pour effet de conduire à une augmentation de
prix dont pâtissent les Finances publiques. Une telle inefficacité
de la dépense fait peser un lourd poids sur le budget de l'État
qui se trouve déjà face à la menace constante de
l'imprévisibilité de l'aide du fait des différentes
conditionnalités imposées par les bailleurs de fonds.
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