Le crime d'agression en droit international pénal, portée et enjeux de la révision de Kampala( Télécharger le fichier original )par Olivier Lungwe Fataki Université Catholique de Bukavu - Licence 2016 |
2. Légère exception au constat préalable de l'acte d'agression par le Conseil de sécurité de l'ONUPour relativiser le rôle du Conseil de sécurité de constater préalablement l'acte d'acte d'agression, l'article 15 bis point 8 du Statut de Rome dispose que « lorsque le constat de l'acte d'agression par le Conseil de sécurité n'est pas fait dans les six mois suivant la date de l'avis, le Procureur peut mener une enquête pour crime d'agression, à condition que la Chambre préliminaire ait autorisé l'ouverture d'une enquête pour crime d'agression selon la procédure fixée à l'article 15, et que le Conseil de sécurité n'en ait pas décidé autrement, conformément à l'article 16 »154(*). La formulation retenue ci haut donne subsidiairement à la Chambre préliminaire de la CPI le pouvoir d'autoriser le Procureur à mener une enquête, lorsqu'un constat d'agression n'est pas fait par le Conseil de sécurité dans les six mois suivant l'avis donné par le Procureur au Secrétaire général des Nations-Unies. Si le Conseil ne fait aucun constat et reste silencieux, il est certain que le Procureur pourra se tourner vers la Chambre préliminaire, afin de demander l'autorisation de mener une enquête. Mais, si le Conseil de sécurité venait à affirmer, voire à adopter une résolution mentionnant qu'il n'existe pas d'acte d'agression, serait-il encore possible pour le Procureur de se retourner vers la Chambre préliminaire pour obtenir l'autorisation de mener une enquête? La résolution adoptée en 2010155(*) par l'Assemblée des États Parties reste muette à ce propos. Pour répondre à cette interrogation, l'on ferait soi la position de M. Luisa Cesoli et D. Scalia. Selon ces auteurs, le silence de cette résolution peut, dès lors, être interprété de manière contrastée156(*): soit on assimile ce cas à l'absence de déclaration d'agression et le Procureur pourra, alors, se retourner vers la Chambre préliminaire; soit il faut l'interpréter comme un obstacle aux poursuites157(*). Cette dernière interprétation paraît raisonnable, à défaut de laquelle les autres éléments de l'article 15 bis ne seraient pas pertinents, car la volonté du Conseil de sécurité serait toujours subordonnée à celle du Procureur, dès lors que ce dernier pourrait se retourner vers la Chambre préliminaire pour avoir son accord et passer outre la position du Conseil. Plusieurs variantes possibles ont cependant été mises en avant par ceux qui militaient pour que l'Assemblée générale puisse jouer un rôle de « filtre de compétence » en matière de crime d'agression158(*). C'est notamment le raisonnement selon lequel, en cas d'échec du Conseil de sécurité, la constatation préalable de l'acte d'agression pourrait être faite par l'Assemblée générale de l'ONU ou carrément, on pourrait envisager l'hypothèse de l'action autonome de l'Assemblée générale de l'ONU159(*) en matière de constat préalable de l'acte d'agression. Il demeure alors curieux de savoir comment établir la responsabilité pénale individuelle pour un crime réputé d'Etat par excellence. * 154Article 15 bis point 8 du Statut de Rome. Déjà cité. * 155Résolution RC/Res.6, treizième séance plénière, 11 juin 2010.Disponible en ligne sur https://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/RC-Res.6-FRA.pdf. Visité le 02 mars 2016. * 156M. LUISA CESOLI et D. SCALIA, Op., cit., p. 64. * 157Ibidem. * 158S. A. NDIAYE, Op. cit, p. 62. * 159V. M. METANGMO, Op. cit., p. 486. |
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