2°) Les autres
difficultés
La mise en oeuvre d'une lutte efficace contre la
criminalité financière se trouve en butte à plusieurs
autres difficultés, qui freinent son évolution.
D'abord, l'on pourrait citer le manque de création des
organes pourtant prévus par la loi. Comme exemple, nous pouvons parler
du cas de la Commission de la déclaration des biens, pourtant
organisée par la loi N°2006/003 du 25 Avril 2006 portant sur la
déclaration des biens et avoirs. Bien que cette commission soit
prévue depuis l'année 2006, elle n'est pas encore mise en place,
ce qui empêche de considérer pleinement cette loi comme un outil
de détection des criminels financiers. En effet, en l'absence de ladite
commission, aucun organe n'a été prévu par la loi pour
recevoir les déclarations de biens des personnes assujetties. Ce qui
entraine la gestion de la chose publique, sans que l'on soit
véritablement obligé de justifier l'origine de ses biens. On
manquera alors de base véritable pour affirmer avec exactitude que les
biens d'une personne ont évolué de manière exponentielle
au cours de l'exercice de son mandat. Pourtant, rien n'explique le retard dans
la mise en place de cette commission. En effet, même l'absence du
Sénat, dont un membre fait partie de cette commission, peut être
palliée par l'exercice par l'Assemblée Nationale de tous les
devoirs dévolus au Parlement. Le retard dans la mise en place de cette
commission entraine donc un frein à l'avancée de la lutte contre
la criminalité financière.
Une autre difficulté, non négligeable, que
rencontrent les organes de lutte contre la criminalité
financière, est l'absence de confiance totale de la part des
camerounais. En effet, pour qu'elles puissent exercer leur action de
manière complète, il faudrait nécessairement qu'elles
puissent bénéficier d'une confiance de la part des personnes pour
lesquelles elles exercent leurs missions. Une fois que cette confiance sera
acquise, le citoyen camerounais sera mieux à même de collaborer
avec les organes de lutte contre la criminalité. Or, il faut dire que
les citoyens ne collaborent pas encore véritablement avec les
institutions citées, ce qui retarde leur action, parce que, pour
certaines infractions telles que la corruption, il est difficilement possible
de procéder à son éradication sans l'aide des victimes. Le
manque de confiance ainsi soulevé pourrait être dû à
la faible répression observée des criminels financiers, ce qui
devrait amener les institutions étatiques à porter à la
connaissance du public, les actions fortes menées pour
l'éradication de ce nouveau type de criminalité. Une fois que les
populations auront constaté l'efficacité de la lutte entreprise,
elles seront plus à même d'aider les organes de lutte contre la
criminalité financière.
Enfin, l'une des limites des outils juridiques camerounais
reste et demeure dans le caractère assez international de la
criminalité financière. En effet, s'exerçant beaucoup,
pour certaines infractions, sur une échelle internationale, la
criminalité financière devient difficile à maîtriser
pour les juridictions camerounaises, car sévir dans un pays ne sert
très souvent qu'à permettre à d'autres délinquants
qui sont coauteurs de mieux se préparer et s'adapter aux
évolutions du droit. Comme le soulignait Jean De MAILLARD,
« la lutte contre la criminalité financière
se heurte (...) souvent aux limites des justices nationales qui n'ont pas
d'outils juridiques suffisamment adaptés face à des
phénomènes internationaux de grande
ampleur. »
Le système camerounais de lutte contre la
criminalité financière a donc un impact mitigé, tant sur
la scène nationale qu'internationale. En effet, alors qu'il semble
apporter des débuts de réponse aux attentes de l'Etat et de la
communauté internationale, plusieurs difficultés persistent et
demeurent, empêchant une éradication totale de la
criminalité financière. Dans le sens d'avancer vers une lutte
véritablement efficace, il serait souhaitable que certaines propositions
soient prises en compte, pour une amélioration du système
camerounais de lutte contre la criminalité financière.
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