2.3.3 Procédure
A l'occasion des modifications légales
nécessaires à la mise en oeuvre du Statut de Rome, le
législateur a adopté un art. 23 CPP qui énumère les
infractions qui sont soumises à la juridiction fédérale.
Selon son al. 1 let. g, en font partie celles du titre 12bis CP
(génocide et crimes contre l'humanité), de l'art.
12ter (crimes de guerre) et de l'art. 264k
(réprimant le supérieur qui avait connaissance des
agissements). Il s'agit des seules infractions dont le MPC ne peut
déléguer l'instruction aux autorités cantonales (art. 25
CPP). C'est la Cour des affaires pénales du TPF qui
50 FF 2008 3549.
51 HENZELIN (2001), p. 33.
52 FF 2008 3549.
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statue en première instance sur les affaires relevant
de la juridiction fédérale (art. 35 LOAP). En temps de guerre,
c'est le CPM qui s'applique, même lorsque l'auteur est civil (art. 5
CPM).
Le principe de la non-rétroactivité, selon
lequel tout acte doit être jugé d'après la loi en vigueur
au moment où il a été commis, est consacré par
l'art. 2 CP. Ce principe semble à premier abord 2mettre les bâtons
dans les roues » de la révision de la loi. C'est le cas, mais
seulement dans une certaine mesure. Il faut rappeler que le principe de la
non-rétroactivité n'a d'effet que dans l'application du droit
matériel et n'impose aucune limite aux règles de
procédure, qui sont, elles, applicables immédiatement et sans
restriction dans le temps53. Il en résulte notamment que
l'art. 264m est applicable aux infractions en question depuis que le
droit suisse les réprime ; les crimes de guerre depuis
196854, le génocide depuis le 15 décembre 2000 et les
crimes contre l'humanité depuis le 1er janvier
201155. Toutefois, le génocide est punissable selon le droit
international coutumier, sans restrictions, depuis les années 1950.
Ainsi, le Statut laisse le libre choix aux Etats partie d'étendre la
rétroactivité jusque-là. Néanmoins, la Suisse a
décidé de donner la priorité au principe de
non-rétroactivité consacré par l'art. 2
CP56.
L'art. 264m al. 3 précise que l'art. 7 al. 4
et 5 est applicable, ce qui revient à confirmer l'application des
principes de ne bis in idem et de l'imputation des peines. Ces deux
principes ne sont cependant pas appliqués de façon absolue. Il ne
faut en effet pas que l'acquittement, la remise de la peine ou la prescription
de la peine à l'étranger aient pour but de protéger
indûment l'auteur. L'intention du législateur est d'éviter
que l'auteur d'un des crimes visés par l'art. 264m puisse s'en
sortir de façon trop clémente par rapport la gravité de
son acte. Le fait que l'Etat du lieu de commission ne considère pas un
acte comme pénalement répréhensible ne doit pas pouvoir
empêcher la Suisse de poursuivre les infractions les plus graves, qu'elle
s'est engagée à combattre en vertu du Statut de Rome. Cette
réserve a pour objectif d'assurer l'efficacité de la poursuite
même dans ce cas. Cela revient à dire que la double incrimination
n'est pas une condition sine qua non à l'application de la
compétence universelle57.
L'art. 29 du Statut de Rome a apporté une modification
de l'art. 101 al. 1 CP, entrée en vigueur le 1er janvier 2011
dans le cadre de la mise en oeuvre du Statut. Dorénavant, cet article
prévoit l'imprescriptibilité non seulement des crimes de guerre
et du génocide, comme c'était le cas déjà
auparavant, mais également des crimes contre l'humanité, pour
autant que l'action pénale ne fût pas prescrite le 1er janvier
1983 (art. 101, al. 1 et 3 CPS). L'imprescriptibilité d'un crime
signifie qu'il pourra être poursuivi jusqu'à la mort de
l'auteur.
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