2.2 La situation antérieure à l'adoption
de l'art. 264m al. 1 CP
2.2.1 Art. 7 al. 2 let. b
Les compétences relevant des art. 3 à 8 du CP
existaient avant l'entrée en vigueur de l'art. 264m CP (dans le
cadre de la mise en oeuvre du Statut de Rome). La compétence universelle
faisait donc déjà partie de l'ordre juridique suisse dans la
mesure évoquée. Au vu de ce qui précède, c'est en
premier lieu l'art. 7 al. 2 let. b CP qui est apte à concrétiser
une compétence universelle applicable dans le contexte qui nous
intéresse31. Les travaux préparatoires n'apportent pas
d'explication claire quant à la portée de cet article, mais le
contexte porte à croire qu'il se réfère au droit coutumier
international qui n'impose pas l'exercice de la compétence universelle
comme une obligation ; il ne fait que de le permettre
expressément32.
Toutefois certaines conditions doivent être remplies, de
sorte que cette compétence universelle manque d'efficacité.
L'auteur doit avoir commis un crime particulièrement grave «
proscrit par la communauté internationale », mais n'étant
pas réprimé en vertu d'un accord international. En effet, l'art.
7 CP étant subsidiaire à l'article 6 CP, c'est celui-ci qui
s'appliquerait dans le cas contraire33.
De surcroît, toutes les conditions
générales imposées par l'art. 7 al. 1 CP doivent
également être remplies. Ainsi, la Suisse ne peut être
compétente que si l'acte est également réprimé dans
le pays requérant (le principe de la double incrimination). Il s'agit
d'un principe général en matière d'entraide pénale
internationale qui veut qu'un crime doit être incriminé à
la fois en Suisse et dans le pays dans lequel il a été commis
(art. 7 al. 1 let. a CP)34. Il est appliqué de façon
absolue dans le cadre d'une demande d'extradition (art. 35 al. 1 let. a EIMP),
mais en cas d'entraide seulement si la procédure implique l'usage de la
contrainte (art. 64 al. 1 EIMP)35. Selon cette disposition, il faut
également que l'auteur se trouve en Suisse (art. 7 al. 1 let. b CP) et
que l'acte donne lieu à l'extradition selon l'art. 35 EIMP, mais que
l'auteur ne soit pas extradé (art. 7 al. 1 let. c CP).
2.2.2 Art. 264 CP
L'incrimination du génocide figurait déjà
à l'art. 264 du CP depuis 2002 et une compétence universelle
était prévue (al. 2) dans ce contexte. La poursuite du crime de
génocide était dès lors
30 HURTADO POZO, p. 58.
31 Entrée en vigueur de la nouvelle partie
générale du CP, du 13 décembre 2002.
32 KOLB, p. 255.
33 HENZELIN (2009), p. 83.
34 DUPUIS, p. 46 ; ZIMMERMANN, p. 530.
35 ZIMMERMANN, p. 531.
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possible lorsque l'auteur se trouvait en Suisse et que
l'extradition était impossible. La compétence universelle ainsi
rendue possible était donc un peu plus large que celle prévue par
l'art. 7 al. 2 let. b CP puisqu'il n'exigeait pas la double incrimination.
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