Paragraphe 2 : Les limites aux législations
offshores : Les mesures nationales et conventionnelles de lutte contre
l'évasion fiscale :
Ces mesures qui visent à lutter contre le
détournement fiscal opéré par les mécanismes
fiscaux offshores s'étudient selon trois niveaux qui lient directement
la France : le niveau national, européen et international.
A. Mesures nationales de lutte contre l'évasion
fiscale1
1. Transferts indirects de bénéfices à
l'étranger: L'article 57 du code général des
impôts
L'article 57 du CGI dispose que « Pour
l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les
entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le
contrôle d'entreprises situées hors de France, les
bénéfices indirectement transférés à ces
dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat
ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux
résultats accusés par les comptabilités (...)
Cette disposition est un moyen pour l'Administration fiscale
d'opérer un contrôle sur les prix de transferts qui serviraient de
moyen à localiser les bénéfices dans un Etat à
fiscalité privilégiée, bien évidemment,
l'imposition en question concerne l'impôt sur les sociétés
qui a pour assiette ces indirectement transférés.
Le caractère indirect du transfert se fonde avant tout sur
la constitution de sociétés par une société
française. On peut voir dans cet article un caractère
répressif en ce que les opérations constitutives d'un transfert
indirect de bénéfices au profit des entreprises établies
à l'étranger et ne relevant pas de la gestion normale de
l'entreprise, sont incorporés aux résultats de la
société.
Cette incorporation est pourtant ce que ne voulait absolument pas
le dirigeant d'entreprise qui a localisé les bénéfices
dans une société étrangère que l'on peut appeler
« société interposée ».
Le transfert en question s'opère de différentes
manières soit par voie de majoration soit par voie de diminution des
prix d'achat ou de vente, mais aussi par tout autre moyen (versement de
redevances excessives ou sans contrepartie, octroi de prêts sans
intérêts ou à un taux réduit, abandon de
créance, etc.). Il semblerait qu'il y ait une notion de
stratagème frauduleux dans cet article qu'il tente de sanctionner par
l'incorporation.
L'Administration fiscale ne dispose pas d'un pouvoir
discrétionnaire en la matière car il est possible
d'établir une entente pour savoir si une opération sera ou non
constitutive d'un transfert indirect de bénéfices.
1 : Cours de Mr Laroche/ Fiscalité
Internationale/ 1er semestre
2 : Légifrance
A titre d'exemple jurisprudentielle l'on pourra citer le fait
qu'une société ayant transféré, sans contrepartie,
la centralisation de la trésorerie du groupe à laquelle elle
appartenait à une entité suisse du même groupe,
l'administration fiscale avait considéré que ce transfert
était constitutif d'un transfert de bénéfices au sens de
l'article 57 du CGI ; ceci à raison de la renonciation au paiement d'un
prix correspondant à la valeur vénale de cette activité.
Elle avait donc opéré un redressement du résultat
imposable du groupe français et appliqué la retenue à la
source au titre du revenu réputé distribué à la
société suisse.
Ce qui est intéressant dans cette affaire c'est notamment
le fait que l'Administration fiscale se soit fondés sur des
éléments extérieurs aux documents comptables de
l'entreprise, elle a par ailleurs utilisés des valeurs boursières
ce qui montre les longues investigations que mène l'Administration
fiscale dans le cadre de l'application de cet article.
Par ailleurs, le tribunal administratif a jugé que le
transfert d'une activité, même s'il s'agissait d'une fonction
administrative, rendue au profit des seules sociétés
opérationnelles du groupe, avait néanmoins une valeur
patrimoniale et pouvait donc tomber sous le coup de l'application de l'article
57 du CGI.
Ainsi, les bénéfices transmis indirectement ont une
forme très variable et ne sont pas seulement comptables.
2. Transferts d'actifs hors de France
Les entreprises qui vont transférer des actifs hors de
France ne sont pas censées être assujetties à l'imposition
en France, puisqu'elle s'en dessaisit de manière irrévocable.
Cette disposition vise avant tout le fait que l'entreprise ne s'est pas
véritablement dessaisie des actifs transférés.
En effet, si ce transfert d'actif a été
opéré c'est avant tout pour des raisons fiscales et pour profiter
d'une législation fiscale offshore plus attrayante. C'est ainsi que
l'Administration fiscale va prendre en compte cette stratégies fiscale
et opérer une sanction, en la soumettant à l'impôt en
France (impôt sur les sociétés ou, éventuellement,
impôt sur le revenu) sur les résultats de la gestion ou de la
disposition de ces actifs ou des biens acquis en remploi.
Cette règles présente un caractère plus que
complet car tous les types de transferts sont considérés :
direct ou indirect, ainsi, même si un tiers s'interpose cela n'aura aucun
effet quant à l'imposition.
3. Bénéfices provenant de sociétés
établies dans un pays à régime fiscal
privilégié : l'article 209 B du CGI :
Il n'est pas ici question de traiter de la clause de sauvegarde
analysée (au Paragraphe 2 : L'étendue de la clause de
sauvegarde de l'article 209 B CGI).
Cet article vise à dissuader les sociétés
qui localisent leurs bénéfices dans les paradis fiscaux afin
d'éluder l'impôt français, c'est un des articles phares
avec l'article 238 A du CGI en matière de lutte contre l'évasion
fiscale.
Cet article à la différence de l'article de 238 A
se fonde sur des valeurs concrète et non sur un ensemble de charge
propres à la fiscalité française que l'on peut ne pas
retrouver ailleurs. Cette disposition présente l'avantage d'être
beaucoup plus concrète que son homologue.
En vertu de cet article, lorsqu'une personne morale
établie en France et passible de l'impôt sur les
sociétés exploite une entreprise hors de France ou détient
directement ou indirectement plus de 50 % des actions, parts, droits financiers
ou droits de vote dans une entité juridique (personne morale, organisme,
fiducie ou institution comparable) établie ou constituée hors de
France et que cette entreprise ou entité juridique est soumise à
un régime fiscal privilégié, les résultats
bénéficiaires de cette entreprise ou entité juridique sont
imposables à l'impôt sur les sociétés.
Certaines caractéristiques sont à mettre en exergue
:
- La première caractéristique de cet article
repose sur une fiction juridique légale car l'imposition des
bénéfices litigieux se fera comme s'ils avaient été
localisés et produit en France.
- La deuxième caractéristique est relative au
critère de proportionnalité qui existe entre l'imposition des
revenus constitutifs de revenus de capitaux mobiliers et les actions ou parts
que la société détient.
Lorsqu'il est évoqué l'article 209 B, il est
logique de faire état de la principale jurisprudence relative à
cet article il s'agit de celle du 28 juin 2002 dans un arrêt «
Schneider Electric »1, le Conseil d'Etat a jugé
qu'en présence d'une convention fiscale internationale, ce dispositif ne
pouvait être mis en oeuvre que si la convention en prévoyait
expressément l'application.
Les conventions fiscales internationales apparaissent comme
étant primordiales dans le cadre de l'évasion fiscale car si une
personne est soupçonnée d'évasion fiscale, elle pourra
bénéficier de cette jurisprudence pour échapper à
l'article 209B.
1 : BOI-IS-BASE-60-10-20120912
4. Participations dans des structures financières
établies dans un pays à régime fiscal
privilégié
En 1999, le législateur, toujours dans sa quête
contre l'évasion fiscale par le recours aux mécanismes offshores
s'est vu codifier à l'article 123 bis du CGI une extension de l'article
209 B en ce sens qu'il prévoit d'imposer les personnes physiques
résidentes fiscales en France, sur les revenus de leurs actifs
financiers ou monétaires détenus par l'intermédiaire
d'entités financières implantées à
l'étranger et soumises à un régime fiscal
privilégié.
Cette prérogative de l'Administration fiscale est soumise
à la condition de détention de 10% du capital de la structure
étrangère, sachant que le fait qu'il n'y ait aucune distribution
de dividendes n'influe aucunement sur le pouvoir de l'Administration d'user de
cette disposition.
5. Rémunération de prestation de services à
l'étranger :
Il s'agit ici d'évoquer le célèbre article
155 A du CGI qui a donné lieu à beaucoup de contentieux puisqu'il
concerne notamment les professionnels du spectacle. Cette article vise un
détournement (aux yeux de l'Administration fiscale) spécifique
qui consiste à rémunéré des prestataires de
services établis dans des pays étrangers et d'éviter ainsi
tout imposition,cette pratique a pour but de soustraire à l'application
de l'impôt français la majeure partie des
rémunérations en cause.
Dans une telle situation, les sommes destinées à
rémunérer les prestations sont versées en totalité
à la société étrangère qui n'en reverse
qu'une faible partie, à titre de salaires, au prestataire réel
des services. En France, l'imposition ne se portera que sur les minces salaires
que l'entreprise aura versés aux réels prestataires.
Nous sommes bien ici dans un cas d'évasion fiscale
grâce aux recours d'une législation fiscale offshore, car le
prestataire de service « fictif » sera logiquement
localisé dans un paradis fiscal ou à fiscalité moindre,
sinon le procédé n'aurait aucun but1, il s'agit de la
troisième hypothèse envisagée dans l'article ci
-dessous.
En vertu de ce dispositif, les sommes perçues par une
personne physique ou morale domiciliée ou établie hors de France,
en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes
domiciliées ou établies en France, sont imposables en France au
nom de ces dernières :
- quand la personne contrôle directement ou indirectement
la société prestataire ;
1 :BOI-IS-BASE-60-10-40-20120912
- quand il n'est pas établi qu'il y ait une
activité industrielle ou commerciale autre que la prestation de services
qui soit prépondérante ;
- quand la personne qui perçoit la
rémunération des services est domiciliée ou établie
dans un pays étranger où elle est soumise à un
régime fiscal privilégié, c'est-à-dire en
général dans un « paradis fiscal ».
6. Déclaration des transferts de fonds vers ou en
provenance de l'étranger
L'Administration fiscale dispose déjà de
prérogatives vis-à-vis des banques par le biais de l'obligation
d'échanges de renseignements auxquels sont assujettis les Etats
signataire de l'accord.
Mais lorsque les établissements financiers n'interviennent
pas dans les mouvements financiers internationaux, la tâche devient
beaucoup plus ardue, notamment lorsque les mouvements de fonds se font entre
personnes physique dont l'une est établie dans un paradis fiscal.
Ainsi, en cas de tels transferts, ces personnes sont tenues de
déclarer à l'administration des douanes chaque transfert d'un
montant égal ou supérieur à 10 000 €.
De même, les personnes physiques entrant ou sortant de la
Communauté avec au moins 10 000 € en argent liquide doivent
déclarer la somme transportée aux autorités
douanières de l'Etat par lequel elles entrent ou sortent de la
Communauté.
Le non-respect de ces dispositions se caractérise par une
amende égale au quart de la somme litigieuse, autant dire que le montant
de l'amende peut très vite monter. Par ailleurs, les fonds
transférés irrégulièrement (de même que ceux
transférés par l'intermédiaire de comptes ou contrats
d'assurance-vie non déclarés constituent, sauf preuve contraire,
des revenus imposables.
Les mesures nationales de lutte contre l'évasion fiscale
sont nombreuses et efficaces, elles recouvrent un maximum de situation
où les législations fiscales offshores peuvent être
utilisées à des fins d'évasion fiscale. Mais ces
dérives ne sont pas restées sans conséquences au niveau de
l'UE, elles ont suscité de vives réactions à cette
échelle car les institutions européennes ont très vite
pressenti l'impact que pouvaient avoir les mécanismes fiscaux offshores
sur l'Economie européenne.
B. Mesures européennes de lutte contre
l'évasion fiscale
Dans le cadre de cette étude il est incontournable de pas
présenter l'allocution de M. Algirdasemeta, commissaire européen
chargé de la fiscalité.
1 : Doctrine administrative 5 B-640 du 31 mars
2001
Ce dernier a durant son mandat tenté en vain de montrer
que le recours aux législations fiscales offshores est une plaie
béante pour l'Economie des Etats membres de l'UE. En effet, selon lui
les pertes s'élèveraient à près de mille milliards
d'euros à cause de la fraude fiscale fondé et de l'évasion
fiscale.
![](Les-mecanismes-offshores-entre-optimisation-et-evasion-fiscale4.png)
Le commissaire européen alerte l'opinion publique sur
d'une part les pertes scandaleuse mais aussi sur les méthodes
usées pour lutter contre l'évasion fiscale, selon lui, si les
États membres doivent renforcer les mesures nationales de lutte contre
la fraude fiscale, des solutions exclusivement unilatérales ne suffiront
pas.
Il déclare que « au sein d'un
marché unique, dans une économie mondialisée, les
incohérences et les lacunes existant au niveau national deviennent les
jouets de ceux qui cherchent à échapper à
l'impôt ». Ainsi, il revient aux Etats même de l'UE
de prendre les mesures nécessaires pour combler tout vide juridique
susceptible d'être usés par les fraudeurs fiscaux.
La problématique est toujours la même et n'est pas
nouvelle : la frontière qui existe entre l'optimisation fiscale par
l'offshore et la liberté de chacun de jouir des dispositions
législatives internationales. Tant est si bien que l'Union
européenne est protectrice de la liberté d'établissement,
il semblerait alors que certains considèrent, et sur de justes
fondements que la théorie de ce commissaire européen est
dénuée de sens car contradictoire avec les libertés
protégées au sein de l'UE.
La politique de l'union européenne en matière
fiscale est dès lors clairement établie, cette politique se fonde
sur la volonté de récupérer les pertes de budget
liée à l'évasion fiscale, et pour ce faire cette ligne
directrice se fait avec le concours indispensable des Etats membres de l'Union
européenne qui se doivent de renforcer leurs législations
fiscales.
Il n'en reste pas moins qu'un éventuel renforcement des
dispositions nationales n'est pas un manquement ostentatoire à la
liberté d'établissement, il faut nuancer.
Dès lors, il convient de mettre en évidence le
double caractère du renforcement qui doit s'opérer
« de manière directe mais aussi
indirecte » : ce sera directement la personne
accusée d'éluder l'impôt qui sera touché par la
répression mais aussi l'ensemble des organisations et structures qui
constituent un moyen de contourner la législation fiscale nationale.
Peut-on voir là, se dessiner une législation en défaveur
de ceux qui se présentent être comme étant des «
prestataires offshores »?
1 : Règlement CE/1889/2005 du 26-10-2005
C'est dans cet esprit contestataire que la Commission a
présenté un plan d'action pour une lutte plus efficace de l'Union
contre la fraude et l'évasion fiscales. Ce plan présente un
ensemble complet de mesures, pour l'immédiat et pour l'avenir, visant
à aider les États membres à protéger leurs
assiettes fiscales et à récupérer des milliards d'euros
auxquels ils peuvent légitimement prétendre.
Ce plan1 se caractérise par des mesures
incitatives qui obligent les Etats membres à prendre des mesures de
lutte contre l'évasion fiscale, à cet égard, la France
n'est pas en reste (cf :Paragraphe 2 : Les limites aux
législations offshores : Les mesures nationales et conventionnelles de
lutte contre l'évasion fiscale)
Deux recommandations méritent notre attention ici, la
première caractérise une vision rigide de l'Union
européenne face aux paradis fiscaux. Elle met en oeuvre des
critères communs de détermination des paradis fiscaux, ainsi, ces
derniers doivent être placés au sein de listes (noire, grise et
blanche) comme le préconise l'OCDE.
La France ne manque pas à sa tâche et la liste des
paradis fiscaux black-listée de 2014 est récemment sortie.
La deuxième recommandation concerne les vides juridiques
tant fustigés par le commissaire européen. Elle préconise
d'avoir beaucoup plus recours aux conventions bilatérales pour envisager
un maximum de cas d'évasion fiscale.
Il semblerait que la vision pessimiste de l'utilisation des
législations fiscales offshores soit un moteur pour favoriser la
coopération entre Etats en matière d'échange
d'information. Cela ne serait nous surprendre car l'échange
économique, politique et financier est le propre de l'Union
européenne.
Mais il semblerait que cette vision soit quelque peu
contradictoire et assez réductrice étant donnés que les
législations fiscales offshores attractives ne sont pas situées
uniquement à l'international mais aussi au sein de l'Union
européenne.
Certes, même si le Luxembourg (cf :Paragraphe 2 :
Les vrais « faux » ou faux « vrais » paradis fiscaux :/C.
Le Luxembourg, un pseudo paradis fiscale à l'européenne) n'a
aucune similitude avec la fiscalité des Bahamas, la
réalité est là : les citoyens français
s'installent au Luxembourg à raison des taux d'imposition plus
attractifs.
Il semblerait donc que les représentants européens
aient omis les disparités fiscales intra-européennes, qui
là aussi nécessiteraient des mesures, on pourrait préciser
que la France, pour sa part, a déjà envisagé la
problématique dans sa législation par la clause de sauvegarde de
l'article 209B du CGI.
Des projets européens peuvent apparaître comme
étant intéressant en la matière : un code des
contribuables, un numéro d'identification fiscale européen, un
réexamen des dispositions anti-abus dans les principales directives de
l'Union et des lignes directrices communes en matière de
traçabilité des flux financiers, on peut y voir la
préparation d'un arsenal juridique européen de lutte contre les
dérives fiscale par l'offshore.
Le plan d'action publié constituera une contribution
considérable de l'Union européenne au débat international
sur la fraude et l'évasion fiscales, notamment au sein de l'OCDE et du
G20. De ce fait, il donnera à l'Union davantage de poids pour faire
adopter des normes plus poussées en matière de bonne gouvernance
fiscale au niveau mondial.
Afin de lutter contre certaines législations favorisant la
création de mécanismes offshore, la France a pris des mesures
conventionnelles de lutte contre l'évasion fiscale qui prennent la forme
de clauses au sein de ces conventions fiscales internationales.
C. Mesures conventionnelles de lutte contre
l'évasion fiscale
Ces mesures conventionnelles prennent la forme de clauses de
nature spécifique que l'on retrouve dans toutes les conventions
signées par la France avec les autres pays. Ces clauses constituent sans
nul doute une restriction des contribuables à leur liberté
d'imaginer le mécanisme fiscal offshore de leur choix.
1. Les clauses d'échange de
renseignements 1
Ces clauses permettent à l'Administration d'un des Etats
signataires de se procurer des informations dans le cadre d'une investigation
de la part de l'autre Etat partie. Ces informations revêtent
différentes natures, mais les principales seront forcément
bancaires et financières.
L'OCDE a mis en évidence un critère fondamental
dans le cadre de l'application de ces clauses d'échanges de
renseignements : il faut que les informations échangées
soient gardées confidentiels.
Ce type de clauses fait échos à la possible
contradiction entre secret bancaire et échange de renseignements ce qui
a occasionné des difficultés de communication avec les Etats
membres de l'Union et notamment le Luxembourg et l'Autriche très
fortement attachés au secret bancaire, mais peu à peu, le mythe
du secret bancaire s'estompe au fur à mesure des conventions de lutte
contre l'évasion fiscale.
Néanmoins, le maintien du secret dans l'Etat contractant
auquel les renseignements sont communiqués et les sanctions applicables
en cas de violation du secret dans cet Etat relèvent de la
législation interne.
2. Les clauses d'assistance au recouvrement 1
1 : Lutte contre l'évasion fiscale: la Commission
durcit certaines règles clés de l'Union en matière de
fiscalité des sociétés /Commission Européenne -
IP/13/1149 25/11/2013
Ces clauses sont absolument nécessaires pour assurer un
échange de renseignements, elles se caractérisent par la
délivrance aux administrations de l'Etats partie à la convention
de pouvoirs leur permettant de recouvrer l'impôt dans l'autre Etat
contractant.
La demande d'assistance se caractérise par la fourniture
de documents exigés par les lois de l'Etat requérant pour
établir que les impôts sont définitivement exigibles.
L'Etat créancier (des impôts dus par le
contribuable) va avoir la prérogative d'imposer les sommes litigieuses,
mais attention, cette imposition se fera selon les mêmes règles et
les mêmes dispositions qu'une imposition « normale »,
c'est-à-dire que le fait qu'il y ait eu une évasion fiscale par
le biais du mécanisme offshore ne doit en aucun cas influer sur le
montant de l'imposition.
Il en résulte que les créances sont assorties des
garanties prévues, en semblable matière, par la
législation de cet Etat (et non de ceux établis par la
législation de l'Etat créancier).
3. Les mesures anti-abus d'ordre général (clauses
dites anti-treaty shopping)
Ces clauses se fondent sur une spécificité, il ne
s'agit pas de profiter directement des dispositions fiscales légales
d'un Etat à fiscalité privilégiée mais d'user une
clause offrant un avantage fiscale à un pays partie pour éluder
l'imposition due dans l'autre Etat lui aussi partie.
Ces clauses sont ciblées car elles concernent ce qu'il est
commun de nommer « une structure-relais » qui s'est
installée dans un Etat contractant dans le but de tirer avantage de
dispositions conventionnelles favorables.
Le destinataire final et réel des revenus se trouve
avantager par cette configuration car il va pouvoir bénéficier de
mesures dont il n'aurait pu bénéficier de la convention en
cause.
La stratégie fiscale consiste à permettre aux
contribuables de choisir les moyens permettant l'optimisation maximale de leurs
investissements. Autrement dit, un contribuable est libre de choisir une voie
fiscale qui lui permette de réaliser une économie au plan fiscal
(sous réserve que la voie choisie ne soit ni artificielle ni
abusive).
L'abus consiste à détourner un avantage fiscal
émanant de la convention, deux exemples fondés sur la Convention
franco-américaine et franco-japonaise l'illustrent :
1 : « Paradis fiscaux et opérations
internationales » Editions Francis Lefebvre 2014
L'usage abusif peut être illustré par le
schéma suivant : un contrat de licence de savoir-faire est signé
entre une société française et une société
japonaise ; la convention franco-japonaise institue une retenue à la
source de 10% sur les revenus versés de la France vers le Japon.
Ce lien direct entre les deux sociétés
française et nippone vient être rompu par l'interposition d'une
société établie aux Pays-Bas : la stratégie
est la suivante : signer un contrat avec une filiale (ou une
société X) néerlandaise (France/Pays-Bas), puis signer un
autre contrat entre la société néerlandaise et nipponne
(Pays-Bas / France).
![](Les-mecanismes-offshores-entre-optimisation-et-evasion-fiscale5.png)
Dans quel but ? La convention franco-néerlandaise du
16 Mars 1973 supprime toute retenue à la source au titre des redevances
; la convention entre le Japon et le Pays-Bas prévoit bien un taux de
10% mais aucune retenue à la source n'est prélevée en
droit interne néerlandais au titre de telles redevances (une convention
n'impose jamais une retenue mais indique les taux minimum auquel l'impôt
peut être prélevé, s'il est effectivement exigible en droit
interne).
On pourra citer un autre exemple de montage offshore faisant
intervenir une interposition de société : comme tout type de
mécanismes offshore, il est ici question de la convention
franco-américaine du 31 août 1994 qui se caractérise par
une clause anti-abus à son article 30. Il a été mis en
place une exonération en cas de détention directe ou indirecte de
participation d'au moins 80% du capital de la société
distributrice de revenus. Pour les entreprises françaises
détenant des filiales américaines, cette disposition est
très satisfaisante car elle permettra un retour des
bénéfices de la filiale américainesans aucune imposition
du fait de l'exonération en France des dividendes.
De manière générale, le but de ces clauses
est de ne pas user des avantages émanant de conventions fiscales en
interposant des sociétés dans les Etats parties à la
Convention, afin de se servir des exonérations en vigueur pour ne pas
payer d'imposition.
4. Les mesures particulières anti-abus
1 : http://www.diplomatie.gouv.fr/
Ces clauses ont le même objet que leur homologue que sont
les mesures générales anti-abus, néanmoins, elles sont
susceptibles de viser des situations particulières: le
bénéficiaire effectif ou exonération accordée
seulement si le revenu n'échappe pas à l'impôt dans le pays
auquel le droit d'imposer est dévolu par la convention. Les clauses
anti-abus vont servir à délimiter le champ d'application de la
convention. Si ces clauses sont appliquées trop rigoureuse il y aurait
une restriction des bénéfices. Ces mesures conventionnelles sont
donc caractérisées par un champ d'application spécifique
établi par la convention elle-même.
Cette catégorie de mesures destinées à
contrôler l'application de dispositions favorables n'est pas à
proprement parler différente des clauses générales
anti-abus évoquées ci-dessus. La raison d'inscrire une telle
clause dans une convention de lutte contre l'évasion fiscale est avant
tout la protection des intérêts du Trésor national, cela va
par exemple le fait de ne pas dénaturer une clause relative à une
exonération de retenue à la source, c'est pour éviter cela
que la retenue est exigible à raison du paiement, quel qu'en soit la
forme (versement en numéraire, en nature, par chèque, par
virement) ou lors de l'inscription en compte.
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