1.2.b DES DEMANDES DE DIALOGUE ET DE DEMOCRATIE AU NIVEAU
LOCAL
Dans le même temps, de nombreux lieux et
expériences de dialogue regroupant divers acteurs d'un territoire voient
le jour. Une certaine remise en cause du système de
représentation s'est accompagnée de nouvelles demandes de
dialogue et de démocratie qui se traduisent par la création
d'arènes de dialogue et de décision nouvelles.
On peut définir de façon générale
la démocratie comme le « pouvoir au peuple »32. Le
peuple est alors la seule source légitime du pouvoir. Reste que cette
définition est plutôt vague et sujette à
interprétation.
La Révolution Française de 1789 et l'actuelle Ve
République ont consacré la définition de la
démocratie à travers le système de la
représentation. Cette conception de la démocratie est largement
inspirée de la pensée développée par Montesquieu.
En résumé, le peuple est apte à élire des
représentants capables de définir l'intérêt
général et de décider de l'action publique, mais il n'est
pas apte à gouverner lui-même. D'après Montesquieu,
« [..] le grand avantage des représentants c'est qu'ils sont
capables de discuter les affaires. Le peuple lui n'y est pas du tout
préparé [..] » 33 . Dans ce cas, le peuple gouverne de
manière indirecte. Le représentant élu est un
intermédiaire permettant d'atteindre l'intérêt
général.
Une autre conception de la démocratie, incarnée
par Jean-Jacques Rousseau, donne un sens différent : le peuple doit
être responsable, il gouverne directement ce qui justifie le recours
à la démocratie directe. Il n'y a donc pas lieu à
désigner des représentants puisque personne ne peut
décider pour le peuple.
Cette différence de conception de l'idéal
démocratique est résumée par l'abbé Sieyès
en ces termes : « Les citoyens peuvent donner leur confiance à
quelques-uns d'entre eux. Sans aliéner leurs droits, ils en commentent
l'exercice. C'est pour l'utilité commune qu'ils se nomment des
représentations bien plus capables qu'eux-mêmes de connaitre
l'intérêt général, et d'interpréter à
cet égard leur propre volonté. [..] L'autre manière
d'exercer son droit à la formation de la loi est de concourir
soi-même immédiatement à la faire. Ce concours
immédiat est ce qui caractérise la véritable
démocratie. Le concours médiat désigne le gouvernement
représentatif. La différence entre ces deux systèmes
politiques est énorme. »34
Les conceptions de la représentation de Montesquieu et
celle de la démocratie directe de Rousseau ne doivent cependant pas
être vues comme concurrentes, mais comme des idéaux
complémentaires. On constate, depuis une trentaine d'années, que
le législateur « rééquilibre
31 Loi de solidarité et renouvellement urbain
(SRU) du 13 décembre 2000.
32 Le terme de « démocratie »
renvoie au terme grec ancien de « dêmokratía »,
où « dêmos » signifie le « peuple » et «
kratos » signifie le « pouvoir ».
33 (DE) MONTESQUIEU Charles, L'esprit des lois,
livre XI, chap. 6.
34 SIEYES Emmanuel Joseph, Dire de
l'abbé Sieyès sur la question du veto royal à la
séance du 7 septembre 1789, Imprimeur de l'Assemblée
Nationale, Paris. p. 14.
14
la balance » pour introduire un peu plus cette conception
Rousseauiste dans notre modèle de démocratie.
C'est ainsi que naissent en France, à partir des
années 1960, les premières expériences locales
d'autogestion c'est-à-dire d'écoute et de prise en compte des
besoins des citoyens pour faire émerger des solutions collectives
acceptables par tous. C'est le cas du développement des Groupes d'Action
Municipaux (Roux, 2011). La logique est donc d'impliquer les différentes
composantes de la société au niveau local pour sortir de logiques
verticales qui ne garantissent pas toujours la prise en compte des
intérêts divers des acteurs privés ou publics.
De nombreux lieux de dialogue institutionnalisé voient
également le jour. Ils naissent de la volonté des
collectivités territoriales et de l'Etat déconcentré. Ils
visent une meilleure insertion des politiques publiques aux
éléments socio-économiques sur les territoires.
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