La question prioritaire de constitutionnalité et le droit des étrangers( Télécharger le fichier original )par François KONGA Université Paris VIII - Master 2 droit comparé systèmes de droit contemporains et diversité culturelle 2012 |
CHAPITRE I. L'affirmation du principe de différenciation constitutionnelle desétrangers.Dans sa décision du 12-13 août 1993, le Conseil constitutionnel a affirmé: les étrangers jouissent des droits à la protection sociale, dès lors qu'ils résident de manière stable et régulière sur le territoire de la république. Deux arguments découlent de cette analyse d'une part, il y a égalité de traitement entre français et étrangers en matière de protection sociale et d'autres part, seuls les étrangers en situation régulière peuvent en principe prétendre jouir de ces droits. Les irréguliers sont exclus du champ d'application de la protection sociale .Ils apparaissent à travers l'existence d'un seuil minimal de protection au profit de tout individu indifféremment de sa qualité ou de sa situation. En étendant aux étrangers le bénéfice des droits et libertés fondamentaux au même titre que les nationaux, on a tendance à penser que la jurisprudence du Conseil constitutionnel tend à faire disparaître la notion d'étranger. Section 1 La question des droits des étrangers aux prestations socialesL'étranger est un individu qui peut invoquer un certain nombre des droits. Comme le signale Danièle Lochak «l'idée que l'étranger est un être humain qui mérite un traitement équitable au même titre que les citoyens nationaux ne s'est imposée que très progressivement»57. L'accès aux droits sociaux depuis la décision du 22 février 1990 rendue par le Conseil constitutionnel est devenu «un droit de l'homme et non un droit du citoyen»58. La protection sociale permet aux étrangers d'être couverts contre divers risques de la vie. Ceux-ci peuvent être physiques comme la maladie ou sociaux comme le chômage, la 57D.LOCHAK, l'étranger et le droit de l'homme, in mélanges Charlier, éd. Emile Paul, 1981,p .617. 58Ibid, 1981, p.617. 45 précarité 59 .Elle appartient à la catégorie des droits-créances c'est-à-dire ceux qui nécessitent l'intervention de l'État. Appelés aussi droits-prestations ou droits à, la question qui se pose est de savoir si tous les étrangers peuvent en bénéficier sans exclusion. Force est de constater que les droits aux prestations sociales pour les étrangers sont comme le démontre la jurisprudence du Conseil constitutionnel en la matière conditionnés à un double critère dont l'irrégularité devient un critère d'exclusion. Le principe d'égalité devant le droit à la protection sociale comme l'a affirmé Michelet KARINE «a eu raison de la condition de nationalité comme critère discriminant mais une autre condition d'accès s'est généralisée, celle de la régularité du séjour»60. On est passé de la garantie des individus contre les risques sociaux à un outil de régulation de la politique d'immigration. Ainsi, dans sa décision du 23 janvier 1987, le Conseil admet le critère de durée minimale de résidence pour bénéficier des certaines prestations sociales. Dans sa décision du 22 janvier 1990, il reconnaît implicitement le critère de la régularité du séjour et la décision du 12-13 août 1993 constituant une sorte de synthèse de deux premières en ce sens qu'elle consacre les conditions de stabilité et de régularité du séjour pour la jouissance des droits. Le onzième alinéa du préambule de la constitution de 1946 garantissant à tous la protection de la santé, la sécurité matérielle et les moyens convenables d'existence. L'accès aux droits sociaux impose la reconnaissance du critère de régularité et de résidence pour les étrangers(A) et leur condition de stabilité (B). A. La reconnaissance du critère de régularité et de résidence pour les étrangers.La relation entre protection sociale et étrangers traduit la territorialité de système de la protection sociale qui ne joue qu'en considérant les facteurs temporels et territoriaux. La durée minimale de résidence a été avalisée par la décision du Conseil constitutionnel du 23 janvier 1987 par laquelle il juge «la fixation de la condition de résidence pour l'octroi des prestations sociales n'emporte pas par elle-même une discrimination de nature de celles qui sont prohibées par l'article 2 de la constitution et qu'elle n'est pas davantage contraire au principe d'égalité des citoyens». Il précise en outre, qu'il incombe tant au législateur qu'au gouvernement, conformément à 59.GISTI,« le guide de la protection sociale des étrangers en France», éd. la Découverte, Paris, 1997, p.28-30. 60.M.KARINE,« le droit des étrangers à la protection sociale»,informations sociales, juin 2007 n°142,p 80-91. 46 leurs compétences respectives de déterminer dans le respect des principes proclamés par le onzième alinéa du préambule de 1946 les modalités de leur mise en oeuvre. Qu'«il appartient au pouvoir réglementaire de fixer la durée de la condition de résidence de façon à ne pas aboutir à mettre en cause les dispositions précitées du préambule et en tenant compte à cet effet des diverses dispositions d'assistance dont sont susceptibles de bénéficier les intéressés»61. La décision du 22 janvier 199062 va introduire le critère de régularité du séjour comme condition du bénéfice de certaines prestations sociales. La loi incriminée excluait de l'attribution de l'allocation supplémentaire du fonds national de solidarité vieillesse( le minimum vieillesse) des étrangers qui ne pouvaient se prévaloir des règlements communautaires ou de conventions internationales de réciprocité. Cette disposition a été invalidée par le Conseil pour méconnaissance par le législateur du principe d'égalité. Il affirme:« le législateur peut prendre à l'égard des étrangers des dispositions spécifiques à la condition de respecter les engagements internationaux souscrits par la France et les libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire»63. Ici le Conseil censure la condition de nationalité pour accéder aux prestations sociales. Le principe d'égalité comme l'a affirmé O.LECUCQ s'annonce de par sa vocation médiate et immédiate comme la pierre angulaire sur laquelle viennent se greffer les droits fondamentaux énoncés. Comme l'a écrit le Doyen Favoreu, dorénavant, l'égalité est de droit et c'est l'inégalité qu'il faut justifier. Il convient d'admettre l'existence d'un droit à l'égalité sociale entre Français et étrangers. C'est un droit conditionnel dont la jouissance est soumise à la réunion des conditions de régularité du séjour et résidence. La durée minimale de résidence, la régularité de la situation administrative de l'étranger peuvent constituer une limite à l'application de ce droit. C'est ce double conditionnement qui va être consacré dans la décision« Maîtrise de l'immigration»64. 61DCC du 23 janvier 1987, cons 17. 62Cons. Const . déc n°89-269 DC du 22 janvier 1990. 63Ibid, DCC du 22 janvier 1990. 64Cons. Const. , déc n 93-325 DC, Maîtrise des flux migratoires 47 |
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