1 CHAPITRE I : INTRODUCTION
1.1 Contexte
Le riz joue un rôle privilégié dans la
satisfaction des besoins céréaliers, après le blé,
dans l'alimentation de la population humaine mondiale qui ne cesse de
croître (Encarta, 2009). Cette population atteindrait selon Mazoyer
(2009), 9 milliards à l'horizon 2050, toute chose qui
nécessiterait une augmentation impérative de la production
agricole de 70% (Diouf, 2011). Seulement, l'augmentation de sa production d'un
taux annuel de 4% est en deçà des attentes comparée
à celle de sa consommation de 4,5% l'an et ceci devant une baisse
progressive des surfaces allouées à la culture (notamment en
Chine) et des stocks mondiaux. Pendant ce temps, les pays africains avec leurs
potentialités avérées en terres et résultats de
recherches agronomiques restent dépendants d'importations du
complément de 42% de leurs besoins (WARDA, 2008). La cause fondamentale
est de fait l'incapacité de la production africaine à suivre le
rythme de l'accroissement de la demande, en riz de plus en plus grande, qui
pourrait porter atteinte aux fragiles équilibres sociaux des Etats
Africains. L'Afrique est alors victime aujourd'hui de manque réflexions,
par la mise en oeuvre de politiques agricoles efficaces, qui peuvent concourir
à un essor véritable de la filière riz (Seck, 2008).
C'est la crise mondiale du riz en 2008 qui a induit une prise
de conscience à ces pays qui ont réagi par la mise en place de
plateformes d'appuis divers à la riziculture, lesquelles ont
amélioré les indicateurs de productions qui restent toujours
déficitaires. De plus, le secteur de la transformation,
c'est-à-dire celui de la valorisation du riz, reste artisanal et semi
artisanal dans la plupart des pays africains, ne mettant pas à la
disposition des consommateurs des produits finis de qualité
souhaitée (MAHRH, 2008).
Cependant, la question du riz a pendant longtemps
été au centre des intérêts des différents
gouvernements, tels ceux du Burkina Faso, au regard de son incidence croissante
sur l'alimentation et l'économie. En effet, la consommation moyenne
annuelle de riz aujourd'hui est d'environ 70 kg/personne/an à
Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, pour une moyenne nationale comprise entre 15 et
18 kg/personne/an (ONAC, 2008). C'est à partir de 2002, que l'on observe
cet accroissement de la demande en riz qui a atteint un pic de plus de 350 000
tonnes en 2005, puis un fléchissement pour descendre à 271 000
tonnes en 2007 (ONAC, 2008).
Si la demande en riz au Burkina Faso garde les tendances
actuelles, l'on constatera que l'importation tendra à la baisse et
pourrait être maintenue avec les récents efforts du Gouvernement
pour accroître la production locale. Mais comme la production nationale
est
15
essentiellement liée aux rythmes des saisons pluvieuses
qui constituent une grande hypothèse de risque, une évolution
probable en dents de scie peut apparaître et la demande pourrait
atteindre les 500 000 tonnes à l'horizon 2015. Les sorties de devises
pour satisfaire cette demande seraient alors de l'ordre de 60 milliards de
francs CFA (ONAC, 2008).
Un aperçu sur l'évolution des superficies et la
production de riz paddy sur la période 2000 - 2008 indique des
variations de 23 000 ha (année 1960) à 58 000 ha (année
2001), puis une stabilisation autour de 50 000 ha en 2006 et 2007 (SECAM,
2011). La production totale du riz paddy sur la période 2000-2007 a
varié entre 70 000 et 110 000 t. C'est à partir de l'année
2008 et ce grâce aux efforts du Gouvernement à travers les
subventions des engrais et des semences que des productions record ont
été enregistrées. Ainsi, la production du riz a fait un
bond de plus de 200% de la campagne 2007-2008 à la campagne 2008-2009
avec une production record de riz de 195 103 tonnes. La production de paddy
pour la campagne rizicole 2009-2010 évaluée à 213 585
tonnes est en progression de 9% par rapport à la campagne 2008-2009
(DGPER, 2010).
Avec la nouvelle stratégie adoptée par le
Gouvernement du Burkina Faso, les superficies cultivées en riz sont
estimées de nos jours à plus de 90 000 ha. Ce progrès de
l'évolution de la production nationale de riz a été
possible grâce à la contribution d'un ensemble de politiques
à savoir des mesures spécifiques, des projets et programmes mises
en oeuvre par le pays pour l'augmentation de la production nationale du riz,
enjeu stratégique pour le Gouvernement. En effet, depuis 1992, plusieurs
politiques de soutien à la filière riz dans l'optique de la
réalisation de l'autosuffisance en riz ont été
élaborées par le gouvernement et des institutions. Sont de
celles-ci :
· le Document d'Orientation Stratégique (DOS) ;
· le Plan Stratégique Opérationnel (PSO) qui
définit six filières prioritaires dont le riz;
· la Stratégie de Développement Rural
(SDR) à l'horizon 2015, cadre de référence pour toutes les
interventions publiques dans le secteur rural;
· la Stratégie de Croissance
Accélérée et de Développement Durable (SCADD)
2011-2015 qui vise un développement économique et social
accéléré dans la perspective de la vision 2025 ;
· le Programme National du Secteur Rural (PNSR), cadre
de référence de planification et de mise en oeuvre de l'ensemble
de l'action publique en matière de développement rural dans les
domaines relevant de la compétence des ministères sectoriels,
à savoir l'agriculture, l'hydraulique, les ressources halieutiques, les
ressources animales, l'environnement et le cadre de vie;
·
16
la Stratégie Nationale de Développement de la
Riziculture (SNDR) dont l'objectif global est de contribuer à une
augmentation durable de la production de riz en quantité et en
qualité afin de satisfaire aux besoins et exigences des
consommateurs.
De façon spécifique, la SNDR vise à i)
accroitre et intensifier la production rizicole, ii) améliorer la
quantité et la qualité du produit fini mis sur le marché
et iii) renforcer les capacités des acteurs de la filière riz.
Incontestablement, la mise en oeuvre de stratégies
d'augmentation de la production est juste pour un pays en quête de
sécurité alimentaire, mais intégrer des approches de
valorisation dans ces politiques créera une plus value pour le produit,
facteur de pérennisation de la production par une amélioration de
la demande, qui pourrait induire un regain de production. Le constat du secteur
privé, notamment les acteurs membres de la filière riz autres que
les producteurs, est que la subvention des intrants, les exonérations
douanières, la baisse de la taxe sur la valeur ajoutée ont
engendré la croissance de la production du riz. Seulement, il
dénonce l'absence d'une politique générale
intégrée en matière de production agricole, de
transformation agroindustrielle et d'incitation à consommer
burkinabè. Pour cette catégorie d'acteurs, cette situation a
rendu le riz local moins compétitif face au riz importé qui
reçoit des subventions à l'exportation et fait ressortir
l'incohérence du choix politique du pays sur cette filière. Ce
choix, qui a favorisé les importations, aurait été en
partie un facteur d'aggravation de la récente crise du riz (SCADD,
2010). Au Burkina Faso, le maillon de la transformation qui conditionne la
compétitivité a pendant longtemps bénéficié
de peu d'attentions dans la mise en oeuvre des politiques et ceci serait la
source de la faiblesse des technologies et de l'absence d'équipements;
ce qui induit une mauvaise qualité des opérations
post-récolte préjudiciable à la qualité du riz.
Cette réalité est aggravée par la non maîtrise des
technologies de transformation par les acteurs de ce maillon de la
filière qui impacte de façon négative sur la
qualité et la compétitivité du riz produit au Burkina Faso
par rapport au riz importé.
La nécessité de la conception et de la
vulgarisation des techniques performantes de transformation des produits
agricoles, restées artisanales ou semi industrielles, s'impose de
façon générale, mais celle du riz produit à
l'intérieur du pays doit requérir un traitement particulier pour
la satisfaction des exigences des consommateurs des villes qui sont de plus en
plus à la recherche de produits agro alimentaires de qualité
particulière (Seguin, 2002). Alors l'orientation des actions de
recherche vers l'élaboration de labels permettant de corriger certaines
défaillances du riz est devenue plus qu'un impératif car la
mauvaise qualité marchande de notre riz risque de
17
baisser la production nationale. Cette qualité
marchande, recherchée pour Louis Lagrange (1995), implique toute la
filière riz et tient à des aboutissants liés aux
consommateurs qui sont les utilisateurs finaux. Elle se définit comme
l'aptitude d'un produit à satisfaire les besoins de l'utilisateur et
englobe les qualités du produit au sens strict comme le respect des
normes, mais également tout ce qui concourt à son achat tels que
les notices d'utilisation, le conditionnement, le respect des délais de
livraison, le fonctionnement du service après vente, etc. La loi des 4S
(Santé, Sécurité, Service, Satisfaction) de P.
Mainguy1 (1987) synthétise bien cette approche. Mais, pour
atteindre cette qualité selon Lagrange (1988), l' « invention»
s'avère donc être une opération capitale et dans notre cas,
l'étuvage du riz et son amélioration méritent une
attention particulière car, le riz étuvé doit, par ses
qualités sanitaires, diététiques et nutritionnelles,
répondre aux attentes des consommateurs.
C'est le moment donc de profiter des atouts et
opportunités tels que:
· la pratique séculaire d'étuvage du riz
qui ne demande qu'une exploration pour améliorer la qualité du
riz et booster sa production;
· la disponibilité d'actrices organisées
(« femmes étuveuses» ou transformatrices) qui contribuent
à transformer actuellement plus de la moitié du riz produit au
plan national (FAO, 2011) ;
· l'existence de paquets technologiques en la
matière capables d'améliorer l'image marchande de notre riz
(Africa Rice, 2011).
C'est donc, dans un contexte de précarité future
d'une alimentation mondiale marqué par le riz pour son rôle
déterminant, que se mène notre étude dans le but de
contribuer au processus de sa valorisation au Burkina Faso par la technologie
d'étuvage.
|