La saisie immobilière entraine, en règle
générale, des conséquences très graves pour le
débiteur. Pour cette raison, l'AU entoure cette procédure par de
nombreuse contraintes d'ordre public avant que les biens immobiliers puissent
être vendu. Il y'a deux séries de
conditions : les conditions liées aux personnes
impliquées dans la procédure, les conditions liées aux
biens sur les quels porte la saisie.
- Les conditions liées à la qualité
des personnes impliquées.
Dans la procédure de saisie immobilière, deux
personnes apparaissent au premier plan : le saisissant et
le saisi, le quel n'est pas forcement le débiteur.
Saisissant. Il faut examiner successivement la
situation du saisissant et la créance sur le fondement de laquelle il
pratique la saisie.
. La situation du
saisissant : il convient, d'emblée que tous les
créanciers peuvent déclencher la procédure de saisie
immobilière. Il n'y a pas lieu de faire une distinction entre
créanciers hypothécaires et créanciers chirographaires. Le
caractère chirographaire d'une créance n'enlève pas
à son titulaire le droit de poursuivre l'expropriation forcée
d'un immeuble de son débiteur. Les causes de préférences
n'interviennent que dans la distribution. Le droit des créanciers
chirographaires est cependant limité par les dispositions
de l'article 28, al2 de l'AU ; il résulte de ce texte que ces
créanciers ne peuvent poursuivre l'expropriation forcée des
immeubles qu'après la réalisation des meubles et si les deniers
provenant de cette réalisation sont insuffisants.
La saisie peut être effectuée en vertu d'un titre
provisoire, tel qu'un jugement provisoire ou rendu par défaut,
exécutoire par provision nonobstant appel. L'adjudication n'est possible
qu'après l'obtention d'un jugement définitif en dernier ressort
ou passé en force de chose jugée. Si la créance
apparaît simplement fondée dans son principe, le créancier
chirographaire peut, avec l'autorisation du juge, prendre une inscription
hypothécaire sur les immeubles de son débiteur.
Si des créanciers chirographaires sont en concours avec
des créanciers hypothécaires ou privilégiés, ils
n'auront intérêt à saisir l'immeuble que si la valeur
paraît nettement supérieure au montant des créances
garanties par des droits réels.
Les créanciers chirographaires ne peuvent saisir
l'immeuble que s'il est en la possession de leur débiteur. Seuls les
créanciers hypothécaires et privilégiés pourraient,
en vertu de leur droit de suite poursuivre sa saisie entre les mains d'un tiers
détenteur.
Il ne suffit pas d'être créancier pour pouvoir
pratiquer une saisie immobilière ;
Mais, il faut la capacité d'ester en justice. Par
conséquent, ne peuvent pas pratiquer elles-mêmes une saisie
immobilière des personnes frappées d'incapacité
d'exercice, c'est à dire les personnes auxquelles la loi a enlevé
le droit de participer au commerce juridique pour les protéger, soit
encore leurs expériences (mineur), soit contre la défaillance de
leurs facultés mentales ou corporelles (majeurs incapables).
. La créance du
saisissant : selon l'article 247, al1 de l'AU/VE
« la vente forcée d'un immeuble ne peut être poursuivie
qu'en vertu d'un titre exécutoire constatant une créance liquide,
certaine et exigible ». Quant au caractère certain, il
résulte du titre exécutoire.
A défaut du titre exécutoire, la procédure
peut néanmoins être mise en marche, si le créancier peut se
prévaloir d'un titre exécutoire(1) par provision ou
d'une créance en espèce non liquide. Les biens ne peuvent,
cependant être vendus aux enchères que sur un titre
définitivement exécutoire et après la liquidation.
La saisie immobilière pratiquée en vertu d'un titre
exécutoire par provision se fait au risque du créancier. Le
créancier devrait cependant user de cette faculté avec
modération car, en cas d'infirmation du titre ayant servi de fondement
à la saisie, il supporte les frais de procédures inutiles par
l'anéantissement du titre.
Saisi. Le défendeur à la
procédure est dans la plupart des cas, le débiteur
propriétaire de l'immeuble ou titulaire du droit réel
immobilier ; mais il arrive qu'elle soit dirigée contre une
personne autre que le débiteur.
. La saisie pratiquée entre les mains du
débiteur : Aucun problème ne se pose si le
débiteur est le propriétaire de l'immeuble. Une difficulté
apparaît lorsque l'immeuble est en indivision. L'AU a résolu cette
difficulté dans son article 249, dans lequel les créanciers
personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part qu'après le
partage ou la liquidation qu'ils peuvent cependant provoquer. On doit en
déduire que les créances dont le droit est antérieur
à l'indivision et ceux dont la créance résulte de la
conservation et de la gestion des biens indivis peuvent poursuivre la saisie
des immeubles.
Et aussi une deuxième solution a été
donnée par l'article 250 de l'AU/VE qui dispose « la vente
forcée des immeubles communs est poursuivie contre les deux
époux ».
. La saisie dirigée contre une personne
autre que le débiteur : Il en est ainsi lorsqu'un
tiers a acquis un immeuble hypothéqué ou s'est porté
caution hypothécaire.
Le tiers acquéreur est poursuivi par le créancier
hypothécaire, en raison du droit de suite attachés aux
sûretés réelles immobilières. On justifie cette
règle par le fait que le tiers acquéreur a commis une faute par
imprudence ou négligence en ne purgeant pas les hypothèques
grevant l'immeuble acquis.
L'AU donne trois possibilités à l'acquéreur
de supporter la procédure :
Soit payer l'intégralité de la dette en capital,
intérêt et frais ; en désintéressant le
créancier poursuivant (il est subrogé dans ses droits) ;
Soit délaisser l'immeuble hypothéqué. Le
délaissement se fait au greffe du tribunal du lieu de situation du bien.
Lorsque l'acquéreur choisit de délaisser l'immeuble, il lui en
est donné acte ;
Soit subir la procédure dans une telle hypothèse,
il devrait pouvoir exercer un recours en garantie contre son vendeur mais ce
recours est souvent illusoire car celui-ci est, par hypothèse
insolvable.
La procédure peut aussi être dirigée contre
la caution réelle, c'est à dire la caution qui garantit son
engagement en consentant une sûreté réelle sur son immeuble
(article 12 de l'AU sur organisation des sûretés).
La caution réelle est comme le tiers détenteur,
mais elle est engagée de manière plus rigoureuse que celui-ci,
car elle est partie à l'acte constitutif d'hypothèque. C'est
pourquoi on considère généralement qu'elle ne peut purger
d'hypothèque.
- Les conditions liées à la nature des
biens.
Il y a un principe de saisissable de tous les immeubles du
débiteur. Cependant, ce principe est doublement limité, non
seulement il y'a des immeubles qui ne peuvent être saisis, mais aussi les
droits des créanciers sont parfois restreints.
En ce qui concerne la nature des biens immeubles saisissable,
l'AU n'a pas donné une liste de ces biens. En France,
avant la réglementation de la saisie immobilière par le Code de
la Procédure Civile, les rédacteurs du Code Civil avaient
rédigé quelques règles de principes sur l'expropriation
forcée et les ordres entre créanciers (articles 2204 à
2218 du CC). Selon l'article 2204, le créancier peut poursuivre
l'expropriation :
.les biens immeubles de son débiteur ainsi que de leurs
accessoires ;
.de l'usufruit appartenant au débiteur sur les immeubles
de même nature.
Cependant le désir de protéger la
propriété foncière a conduit le législateur
français à formuler quelques restrictions. Les constructions
élevées sur le sol par un autre que le propriétaire
peuvent être saisies par les créanciers du sol ou les
créanciers du constructeur tant que le propriétaire n'a pas parti
en cours de bail.
Dans le cas contraire, ce droit est transmis au créancier
du bailleur à la fin bail.
Pour les hypothèques aucun problème ne se pose.
L'article 119 de l'AU portant l'organisation des sûretés dispose
que seuls les immeubles immatriculés peuvent faire l'objet d'une
hypothèque. Et ajoute également comme objet de
l'hypothèque les droits immobiliers régulièrement inscrits
selon les règles du régime foncier. En ce limitant à ces
dispositions de l'article 119 de l'AU sur les sûretés, les
créanciers chirographaires contrairement aux créanciers
privilégiés ; se trouveraient dans une situation solitaire
et abusive.
A cet effet, l'article 253 de l'AU donne la possibilité de
saisir des immeubles non immatriculés ; ne faisant peser sur le
poursuivant de requérir l'immatriculation dans le cadre de saisie
portant(1) sur un immeuble non immatriculé, que si la
législation nationale le prévoit ; dans le cas contraire ne
serait pas une condition.
La vente d'un immeuble non immatriculé ne peut avoir
liée qu'après l'obtention du titre foncier.
Quant à la portée des droits des créanciers,
ils subissent parfois des restrictions et celles-ci sont de plusieurs
ordres.
Une première restriction de l'article 251 de
l'AU/VE ; selon ce texte, le créancier ne peut poursuivre la vente
des immeubles qui ne lui sont pas hypothéqués que dans le cas
d'insuffisance des immeubles qui lui sont hypothéqués. Cette
règle
n'est écartée qu'à la double condition que
l'ensemble des biens constitue un seul et adapter à une même
exploitation et que le débiteur le requièrt.
Il appartient au débiteur d'opposer la fin de non
recevoir tiré du caractère suffisant de l'immeuble
hypothéqué et d'apporter la preuve de cette suffisance.
Une restriction résulte de l'article 252 de l'AU/VE aux
termes du quel « la vente forcée des immeubles situés
dans le ressort de juridiction différentes ne peut être poursuivie
que successivement ».
Ce texte admet, cependant la possibilité de poursuites
simultanées dans deux cas :
. Lorsque les immeubles font partie d'une seule
exploitation ;
. Lorsqu'il y'a autorisation du président du tribunal
compétent dans l'hypothèse ou la valeur des biens situés
dans un même ressort est inferieur au total des sommes dues tant au
créancier saisissant qu'aux créanciers inscrits.
Il y a lieu de signaler, en fin, l'article 265 qui, d'une
certaine manière, restreint les droits du créancier. Ce texte
permet au débiteur d'obtenir du juge la suspension des poursuites, s'il
« justifie que le revenu net et libre de ses immeubles pendant deux
années suffit pour le paiement de la dette en capital, frais et
intérêt et s'il en offre la délégation au
créanciers ».
L'examen des textes consacré aux conditions de la saisie
immobilière montre que l'AU a introduit beaucoup d'innovation par
rapport à la législation jusque là applicable dans les
Etats parties ; les innovations sont encore plus importantes en ce qui
concerne le déroulement de la procédure d'expropriation.