WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Du contentieux constitutionnel en RDC. Contribution à  l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle

( Télécharger le fichier original )
par Dieudonné KALUBA DIBWA
Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2031
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

§9. Le contrôle de constitutionnalité des arrêts de la Haute Cour militaire :
une anomalie de l'article 83, alinéa 3 du code judiciaire militaire?

Après avoir posé en son article 76 du code judicaire militaire de 2002 le principe de la surséance et de renvoi préjudiciel au profit de la Cour constitutionnelle, le législateur militaire, comme pris de vertige, crée une situation insolite en droit congolais : il pose le principe d'un contrôle de constitutionnalité des arrêts de la Haute Cour militaire. Par quelle modalité la Cour constitutionnelle se saisirait-elle d'un tel contrôle ?

Jean-Louis Esambo Kangashe dans sa thèse défendue devant la faculté de Droit de Panthéon-Sorbonne opine que « l'analyse approfondie des actes soumis au contrôle du juge constitutionnel congolais incite à soutenir que ce contrôle ne s'exerce pas uniquement aux seuls actes obligatoires énumérés dans la Constitution.

Le constituant et la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire élargit l'intervention du juge constitutionnel à d'autres actes non expressément déterminés par la Constitution.

Cette thèse est affirmée par la récente jurisprudence de la Cour suprême de justice laquelle autorise le juge constitutionnel à contrôler les actes d'assemblée. Le courage et l'audace du juge constitutionnel congolais l'ont amené à assurer la suprématie de la règle constitutionnelle sur toute autre norme ».977(*)

De notre point de vue, il s'agit d'affirmer que l'arrêt de la Haute Cour Militaire en tant qu'oeuvre juridictionnelle reste soumis à la voie de recours extraordinaire de cassation conformément à l'article 153, alinéa 2 in fine de la Constitution du 18 février 2006.

Et en tant que voie de recours, la cassation ouvre sur la Constitution comme norme de référence pour son admissibilité. Ainsi, une réconciliation peut être faite entre l'article 76 du même code judiciaire militaire qui prévoit la surséance lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité a été soulevée avec le fameux article 83, alinéa 3 du même code qui cite expressément le contrôle de constitutionnalité des décisions juridictionnelles.

Cette interprétation nous semble plus cohérente avec le système de justice constitutionnelle adopté par le constituant congolais. Au cas contraire, il se créerait à coup sûr une anomalie dans le système qui ne reconnaît en principe de compétence au juge constitutionnel que contre les actes législatifs et réglementaires au voeu du texte constitutionnel mais qui, par voie d'une loi ordinaire même spéciale comme l'est le code judicaire militaire, rendrait le même juge compétent à l'égard des actes juridictionnels que Jean-Louis Esambo Kangashe qualifie de spéciaux. 978(*)

Enfin des comptes, ce chapitre aura été le plus long de cette étude tant son caractère hautement technique a exigé des développements plus étendus. En effet, la question de la compétence du juge constitutionnel, vue dans les détails comme nous venons de l'examiner, revient à poser le problème de la place de ce juge dans le système politique congolais.

S'il a autant d'attributions constitutionnelles et parfois même législative, c'est que véritablement le pouvoir politique congolais a considéré dans son architecture institutionnelle la centralité du juge constitutionnel qui devra s'il est efficace occuper les premières marches de l'édifice Etat de droit. En effet, la disposition de l'article 1er de la Constitution actuelle du pays semble conforter cette thèse en posant de manière on ne peut plus volontariste que « la République démocratique du Congo est, dans ses frontières du 30 juin 1960, un Etat de droit... »979(*)

Cette proclamation de foi n'aura de pertinence au regard de l'efficacité du système de justice constitutionnelle mise en place que grâce au courage des juges, à leur audace quelques fois, et comme tous les juges constitutionnels souvent, à leur timidité. Cette marche d'horloge est à la mesure de l'oeuvre juridictionnelle qui a pour ambition de brider l'un des pouvoirs d'Etat les plus puissants : le pouvoir exécutif.980(*)

En effet, la transformation des régimes politiques modernes va dans le sens de la prédominance de l'exécutif.981(*) Les lois sont de plus en plus d'origine gouvernementale de sorte que censurer une loi équivaut à contester le gouvernement qui fait porter seulement le projet par sa majorité parlementaire. Cette inféodation du législatif à l'exécutif rend de plus en plus vitale la présence de l'arbitre constitutionnel du jeu politique : la Cour constitutionnelle.

Mais pour que le juge lui-même ne devienne un danger public, une sorte d'automate brisant la beauté du jeu politique ou imprimant des accélérations indues là où l'intérêt de l'Etat commanderait une marche plus pesante, il faut brider l'enthousiasme zélé du juge constitutionnel en enserrant son activité dans des règles de procédure aussi simples que claires. C'est ce que nous allons voir au chapitre suivant.

* 977 ESAMBO KANGASHE (J.-L.), La constitution du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, Thèse de droit public, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Université de Kinshasa, 17 juin 2009, p.286.

* 978 Idem, p.286.

* 979 Lire article 1er de la Constitution du 18 février 2006.

* 980 Lire ESAMBO KANGASHE (J.-L.), La constitution congolaise du 18 février 20066 à l'épreuve du constitutionnalisme, op.cit, p.234 qui va dans ce sens en opinant que « Ces questions ont fait l'objet d'amples développements. On insistera sur le contrôle de la constitutionnalité des lois et l'encadrement juridictionnel du pouvoir. Bien exercé par la Cour constitutionnelle, le contrôle de la constitutionnalité des lois pourra jouer un rôle éducatif dans le chef des gouvernants et des gouvernés. Ceux-ci sont tenus au respect de la Constitution. Le constituant a fait de la Cour constitutionnelle le juge pénal du président de la République et du premier ministre. L'exercice sans entrave de cette compétence est susceptible d'accréditer l'idée de l'émergence en République Démocratique du Congo d'une nouvelle branche du droit constitutionnel : le droit pénal constitutionnel ».

* 981 Dans ce sens, TURPIN (D.), Droit constitutionnel, op.cit, p.456.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire