6.9. Pertes par ensilage
Tout système de récolte entraîne des
pertes. La qualité et l'acceptabilité d'un fourrage
conservé sont et resteront tributaires des efforts
déployés pour le perfectionnement des méthodes de
récolte, de stockage et de manutention.
Le principal objectif de ces techniques reste la limitation des
pertes de matières nutritives à toutes les étapes entre la
coupe et la conservation.
Malgré les précautions prises au cours de la
confection de l'ensilage, des pertes plus ou moins importantes pourront avoir
lieu à la récolte et en cours de conservation.
A la récolte: les pertes à ce niveau sont
liées surtout à la hauteur de coupe, donc au matériel de
récolte et surtout à l'état de la parcelle.
Elles peuvent atteindre 30% si l'on pratiquait une coupe
à 14-16cm de hauteur au lieu de 7cm (Mosnier et al., 1978). Si
l'on pratique le préfanage, les pertes seront encore plus importantes
à cause de la multiplication des opérations mécaniques;
sans oublier les dépenses supplémentaires. Quoi qu'il en soit,
ces pertes paraissent inévitables. Il semble difficile de les
réduire au dessous de 7% même en coupe directe et à une
hauteur normale (Zelter, 1970).
En cours de conservation, l'importance des pertes par stockage
au silo a longtemps été mal connue ou très mal
évaluée. Depuis l'application au niveau de l'élevage des
méthodes de gestion alimentaire convenable, il est apparu
nécessaire de connaître l'importance de ces pertes dans une masse
de fourrage stocké.
Les pertes de stockage aux silos sont loin d'être
négligeables. Il est rare que la perte de matière sèche
soit inférieure à 8% et celles de matières azotées
à 2-3% dans les ensilages les plus réussis. En cas d'échec
sérieux, les pertes peuvent s'élever respectivement à 75
et 68% en particulier s'il s'agit d'une plante très difficile à
conserver par la voie fermentaire (Hendrix, 1960).
- Les pertes gazeuses: elles résultent de la
conjugaison de l'action des enzymes de la plante et de la microflore dans le
silo. L'activité respiratoire est sans doute la principale responsable
de la phase des fermentations gazeuses explosives qui se manifestent parfois
s'il règne dans le silo une pression partielle d'oxygène assez
élevée (Dulphy, 1979).
Les pertes par respiration dépendent aussi de la
vitesse de remplissage du silo et de son degré
d'étanchéité à l'air. Elles sont de l'ordre de
0,27% de matière sèche ensilée dans les meilleures
conditions, mais peuvent dépasser 5% dans le cas contraire (Demarquilly,
1979).
Les pertes gazeuses lors de la fermentation anaérobie
dépendent de l'intensité et de la nature des fermentations donc
de la matière sèche du fourrage ensilé (Annie et
al., 1975).
- La plasmolyse et les pertes par drainage: elle est
liée à la teneur en matière sèche initiale du
fourrage ensilé et sa finesse de hachage. Au-delà de 25% de
matière sèche, le fourrage n'élimine plus son exsudat.
Inférieure à 20% de matière sèche, le fourrage peut
subir une perte sous forme de jus de 10% (Hendrix, 1960).
L'exsudat contient essentiellement des éléments
hautement assimilables comme les glucides solubles, l'azote non
protéique, et éléments minéraux.
- Influence de l'ensilage sur la composition chimique et la
valeur alimentaire des
fourrages: la composition chimique réelle est peu
modifiée par l'ensilage.
Pour le vérifier, il faut que l'analyse soit
correctement effectuée (dosage de l'azote effectué sur l'ensilage
frais non séché) et que les teneurs soient exprimées sur
la base de la teneur en matière sèche corrigée pour les
pertes de produits volatils (notamment l'ammoniac, les acides gras volatils et
les alcools) lors du séchage à l'étuve (INRA, 1980).
Les modifications les plus importantes portées sur les
glucides, les acides organiques et les constituants azotés sont:
- les glucides solubles et les acides organiques (malique et
citrique) disparaissent et sont remplacés par l'acide lactique, les
acides gras volatils et les alcools; et
- les constituants azotés sont particulièrement
transformés en NH3, acides aminés libres et amines.
La conservation par ensilage diminue peu ou pas la
digestibilité de la matière organique et la valeur
énergétique du fourrage, sauf en cas de très mauvaise
qualité de conservation ou de pertes importantes
d'éléments nutritifs très digestibles par les jus. La
valeur énergétique des fourrages est donc supérieure
à celle des foins correspondants récoltés à la
même date et peut être égale à celle du fourrage vert
au moment de la fauche (Demarquilly, 1995).
Toutefois, l'ensilage entraîne une diminution plus ou moins
importante de la valeur azotée et de la qualité
ingérée.
- Diminution de la valeur azotée
réelle: cette diminution est plus ou moins importante de la teneur
en PDI (Protéines Digestibles au niveau de l'Intestin). Alors que la
teneur en MAD (Matière Azotée Digestible) n'est pas
modifiée, pour deux raisons essentielles:
- une partie des protéines a été
transformée en acides aminés (azote soluble) et même en
ammoniac. Elle est donc beaucoup plus rapidement dégradée dans le
rumen; et
- les produits de la fermentation dans le silo, bien
qu'entièrement digestibles, ne fournissent pas d'acides gras volatils ou
peu d'acide lactique et d'énergie aux microbes du rumen pour
synthétiser des protéines (Moreau et al., 1982).
- La diminution de la quantité
ingérée: la quantité de matière sèche
ingérée par les bovins dépend de:
- la teneur en matière sèche: elle augmente avec
cette dernière, notamment pour les ensilages sans conservateur
jusqu'à des teneurs de 35%;
- la finesse de hachage de l'ensilage: pour des teneurs en
matière sèche inférieures à 30% et pour une
même qualité de conservation, la quantité
ingérée augmente avec la finesse de hachage. L'augmentation est
de l'ordre de 15 à 20% quand on passe des ensilages à brins longs
(10-15cm) à des ensilages à brins courts (1-3cm); et
- la qualité de conservation de l'ensilage: un ensilage
d'une teneur en matière sèche et d'une finesse de hachage
donnée est ingéré en quantité d'autant plus
élevée qu'il contient moins d'acides gras volatils et d'azote en
ammoniac (Demarquilly, 1995).
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