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Pouvoir d'investigation et de contrôle parlementaire. Le développement des commissions d'enquête et des missions d'information à  l'Assemblée Nationale sous la Ve République

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par Sophie Léron
Ecole des hautes études en sciences sociales - Master 2 mention études politiques sous la direction de Pierre Rosanvallon 2005
  

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DEUXIEME PARTIE : DES INSTRUMENTS DE VALORISATION DU TRAVAIL DES PARLEMENTAIRES AU SERVICE DE NOUVELLES FORMES DE REPRESENTATION

Chapitre 1 : un contrôle information qui assure mieux les droits de l'opposition

1) L'ouverture de fonctions significatives à des membres de l'opposition

Si l'ordonnance de 1958 permettait théoriquement à la majorité de composer les commissions de contrôle ou d'enquête de membres uniquement issus de ses rangs69, l'usage à l'Assemblée nationale a, dès les premières commissions d'enquête créées, permis à l'opposition d'y être représentée. Comme souvent dans l'étude du cadre législatif et règlementaire de l'Assemblée nationale, une attention toute particulière doit être portée à l'usage, qui, bien souvent précède la règle. Cet usage a d'ailleurs seulement été inscrit dans la loi en 1991. Il précise, dès lors, que les membres des commissions d'enquête « sont désignés de façon à y assurer une représentation proportionnelle des groupes politiques70 ».

Participant de cette même volonté d'ouverture et de représentation interne à l'Assemblée nationale, l'animation de la commission d'enquête par des membres de l'opposition qui était une exception il y a quelques années encore, devient de plus en plus fréquente. Sous les Ve et VIe législatures les deux fonctions étaient dans la

69 << Les membres des commissions d'enquête et des commissions de contrôle sont désignés au scrutin majoritaire », Ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958, article 6.

70 Loi n°91-698 du 20 juillet 1991, article 4, JORF du 23 juillet 1991. Il est à noter que cette loi, dans son article 2 met fin à la distinction entre commissions d'enquête et de contrôle pour ne garder que la dénomination << commission d'enquête ».

plupart des cas détenues par des membres de partis différents mais appartenant tous à la majorité, excepté la commission d'enquête sur << les conditions de l'information publique »71 dont le Président, Marc Lauriol et le Rapporteur, Claude Martin, sont tous deux issus du même parti, le RPR. La même configuration se retrouve sous la VIIe législature où socialistes et communistes se partagent ces fonctions. Cette situation visant à répartir les postes significatifs au parti majoritaire à l'Assemblée nationale ou aux partis appartenant à la majorité gouvernementale a perduré jusqu'au milieu de la IXe législature. Les socialistes, qui ont gardé le monopole sur les quatre premières commissions d'enquête créées ne concèdent jusqu'en mai 1991 qu'une place de rapporteur aux communistes72 pour la Commission d'enquête sur << la pollution de l'eau et la politique nationale d'aménagement des ressources hydrauliques »73. Un tournant s'opère en 1991. Dès lors, six des sept commissions d'enquête créées verront un binôme majorité-opposition à leur tête sur des sujets aussi divers que << le fonctionnement et le devenir des premiers cycles universitaires74 », << le financement des partis politiques et des campagnes électorales sous la Ve République75 » ou << la situation actuelle et les perspectives de l'industrie

71 Rapports 901-903-1289. Commission créée le 15 mars 1979 et terminée le 15 septembre 1979.

72 En la personne de M. Gilbert Millet.

73 Rapports 1185-1342-1762. Commission créée le 23 mai 1990 et terminée le 23 novembre 1990.

74 Rapports 1050-1299-2339. Commission créée le 14 mai 1991 et terminée le 13 novembre 1991. Président : M. Yves Fréville (UDF). Rapporteur : M. Jean Giovanelli (PS)

75 Rapports 2013-2023-2348. Commission créée le 14 mai 1991 et terminée le 14 novembre 1991. Président : M. Pierre Mazeaud (RPR). Rapporteur : M. Jean Le Garrec (PS)

automobile française76 ». Cet effort d'ouverture pluraliste sera mis à mal tout au long de la Xe législature durant laquelle huit commissions d'enquête parlementaires sont créées et dont tous les postes de Présidents ou rapporteurs reviennent à des membres du RPR et de l'UDF, excepté un poste de rapporteur dévolu à un socialiste, M. Jacques Guyard, pour la Commission d'enquête sur « les sectes77 ». Sous la XIe législature, la pratique revient à un peu plus de pluralisme. Sur quinze commissions d'enquête créées quatre ont un Président issu de l'opposition. Une exception est néanmoins à noter pour la Commission d'enquête « sur le régime étudiant de sécurité sociale », en 1999, qui a été créée suite à deux propositions de résolution de l'opposition mais qui ne comprend aucun membre de l'opposition au sein du bureau de la commission78. Mais d'une manière générale, les bureaux des commissions sont quasi-systématiquement pluralistes et les deux fonctions les plus importantes au sein d'une commission (Président et Rapporteur) ont été au fil des ans de plus en plus souvent confiées à un binôme majorité-opposition.

C'est la réforme du règlement intérieur de l'Assemblée nationale voulue par le
Président Jean-Louis Debré, en accord avec tous les présidents de groupes constitués,
en 2003, qui modifiera, à terme, ces statistiques fluctuantes. En effet, depuis lors,

76 Rapports 2252-2253-2333-2791. Commission créée le 13 décembre 1991 et terminée le 13 juin 1992. Président : M. Jacques Masdeu-Arus (RPR). Rapporteur : M. Guy Bêche (PS)

77 Rapports 1768-2091-2468. Commission créée le 29 juin 1995 et terminée le 22 décembre 1995.

78 Les parlementaires des groupes RPR, UDF et DL n'ayant pas obtenu de poste de Président ou Rapporteur, l'opposition avait alors « décliné toute participation au Bureau de la Commission », lettre du 24 juin 1999 des membres de l'opposition de la Commission d'enquête à M. Alain Touret, Président, annexée au rapport de la commission d'enquête n°1778 du 6 juillet 1999.

l'article 40-1 du règlement spécifie que : « la fonction de président ou celle de rapporteur revient de plein droit à un membre du groupe auquel appartient le premier signataire de la proposition de résolution du vote de laquelle résulte la création de la commission d'enquête79 ». C'est par exemple le cas, pour prendre la plus récente, de la commission d'enquête sur l'affaire « dite d'Outreau » dont le Président André Vallini est membre du groupe socialiste et le rapporteur, Philippe Houillon, est membre du groupe UMP. Depuis cette date, le pluralisme des fonctions exécutives a également été appliqué sous les mêmes modalités pour les missions d'information.

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