Financement de navires verts : une rentabilite incertaine ?( Télécharger le fichier original )par Guillem Salles Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master 2 Transports Internationaux 2011 |
a) Design, performance énergétique et surcoûtsLe design du navire peut aboutir à des réductions significatives en termes de consommation de fioul et d'émissions de Co2. Toutefois, ce travail supplémentaire suppose un surcoût a l'achat pour l'armateur, surcoût dont l'importance augmentera proportionnellement a la spécificité du navire. Les modifications du design du navire supposent deux surcoûts pour l'armateur : les seuls calculs destinés a l'optimisation du design constituent un premier surcoût ; surcoût en termes de rémunération des designers et architectes navals associés tout au long du processus de conception du navire. Par ailleurs, le chantier naval sera également a même d'exiger le paiement de frais supplémentaires destinés a financer la construction d'un navire spécifique dans la mesure oi celui-ci s'éloigne de facilités permises par la production en série. Ainsi, plus les plans du navire vert s'éloigneront des plans « standards » du chantier, plus le prix du navire aura tendance à augmenter. En matière de design, des économies d'énergie substantielles peuvent être réalisées sur la base d'un travail d'optimisation de l'hydrodynamisme23 de la coque du navire. La forme de cette dernière a un effet non négligeable sur le besoin de propulsion du navire. Ainsi, plus la coque est hydrodynamique, moins le navire a besoin de puissance pour se mouvoir. Différentes innovations ont été mises en oeuvre récemment. Ainsi, au début des années 2000, le chantier japonais Nippon Kokan (NKK) a réétudié le design de la proue de ses vraquiers Capesize (Voir Figure 3 ci-dessous) pour augmenter leur capacité à fendre les vagues et ainsi réduire leur besoin d'énergie de propulsion pour un résultat équivalent24. 23 A noter également que certains designers travaillent également sur l'aérodynamisme de la superstructure du navire. La prise au vent du « château » peut en effet se révéler handicapante pour la progression du navire, notamment pour ceux qui opèrent à des vitesses élevées. In AEA Energy and Environment, Greenhouse gas emissions from shipping: trends, projections and abatements, September 2008. 24 Voir http://www.marinetalk.com/articles-marine-companies/art/Ax-Bow-Reduces-Ships-Sea-Margin- NKK00214940TU.html Figure 3 : Proue standard et proue « hache » mise au point par NKK pour améliorer la performance énergétique des navires Source : www.marinetalk.com De nombreuses compagnies maritimes ont déjà introduit ces évolutions sur leurs navires. Le géant danois Maersk, pionnier en la matière, a commandé en février 2011 au chantier naval coréen Daewoo Shipbuilding & Marine Engineering Co., Ltd. une série de 10 porte-conteneurs de 18.000 Equivalent vingt pieds (EVP) dont la coque répond aux exigences de l'EEDI25. Maersk a annoncé un surcoût de l'ordre de 15% par navire26, soit 30 Millions de Dollars sur un total de 190 Millions. La livraison du premier navire est prévue pour 2013. Dans le même temps, la compagnie norvégienne de rouliers Wilh Wilhelmsen a annoncé la construction de deux navires Roll-on Roll-off (Ro-Ro) dont le design de la coque a été optimisé27. Le premier a été livré en mai 2011, le second est prévu pour 2012. En parallèle, des travaux ont été menés pour améliorer l'efficacité des hélices des navires, l'idée générale étant d'augmenter le diamètre de l'hélice tout en réduisant sa vitesse de rotation pour améliorer l'efficacité de la propulsion. 25 Voir Giants spark «green» doubts, in Tradewinds 24 Février 2011. 26 Ibid. 27 Voir Steve Matthews, Wilhelmsen on course with green innovation, in Lloyd's List 20 Mai 2011. Toutefois, ces évolutions impliquent bien souvent des surcoûts tels que l'ajout d'un boîtier réducteur afin d'adapter la vitesse de rotation du moteur -trop importante- au fonctionnement optimal du propulseur28. La performance énergétique du navire peut être également améliorée par le biais d'une récupération d'énergie grâce à des mécanismes tels que les tuyères ou les contre-hélices (Voir Figure 4 ci-après). Louis Dreyfus Armateurs (LDA) a ainsi commandé en avril dernier 8 nouveaux vraquiers (4 Capesize et 4 Handysize) équipés d'une tuyère Mewis (Mewis Duct ®) qui « installée devant l'hélice (...) permet de réguler l'écoulement de `eau et contribue a économiser entre 5 et 7% du combustible »29. L'installation d'un tel dispositif a sans aucun doute occasionné un surcoût, tant dans la phase de conception que de réalisation30. Figure 4 : Contre-hélice (Kanome®) et tuyère (Mewis®) Source : Yonghwan Kim, Green Ship Design & Technology, The LRET Research Collegium Southampton, 11 July - 2 September 2011 Dernière évolution pouvant être rattachée au design du navire, la présence de récupérateurs de chaleur émise par les moteurs. Cette chaleur peut être réinjectée dans le moteur, ou être reliée à une turbine et ainsi fournir de l'électricité au navire. Cette avancée a été introduite dans la dernière génération de porte-conteneurs de Maersk évoquée plus haut. Les navires de Maersk et de Wilh Wilhelmsen précédemment évoqués sont équipés de tels dispositifs, qui ont là encore occasionné un surcoût à la construction. 28 In Wikipedia.org, Propulsion Maritime. 29 In Louis Dreyfus Armateurs, Le Mag, Octobre 2011. 30 A noter que ce surcoût n'a pas été mentionné dans « Le Mag de LDA », qui se contente de livrer le coût global de construction des 8 vraquiers, à savoir 330 Millions de Dollars. |
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