I) Une rentabilité de principe
préservée malgré des surcoûts
Le shipping vert suppose certains surcoûts
intrinsèques et opérationnels (A) qui devraient être
néanmoins compensés par une diminution des coûts
d'exploitation (B).
A) Shipping vert shipping cher : des surcoûts
intrinsèques et opérationnels...
Les surcoûts intrinsèques correspondent aux
caractéristiques physiques des navires verts (1), alors que les
surcoûts opérationnels se rapportent quant a eux a l'exploitation
de ces navires (2).
1) Des surcoûts liés aux
caractéristiques physiques des navires verts
L'émergence d'une réflexion globale sur la
nécessaire réduction des émissions de Co2, de NOx et de
SOx dans le transport maritime a amené l'industrie à se pencher
sur ces problématiques. Les armateurs ont ainsi travaillé a
l'adoption de solutions techniques visant a atteindre cet objectif de
réduction des émissions et d'amélioration de l'empreinte
écologique du shipping. Ce travail de fond sur les
caractéristiques physiques des navires entraine des surcoûts
à la construction.
Toutefois, avant d'examiner les solutions mises en oeuvre pour
réduire les émissions provenant des navires, il convient de
rappeler quelques fondamentaux en matière de propulsion des navires et
d'utilisation d'énergie en matière de navigation.
Dans un rapport20 de 2008 sur les tendances,
projections et possibilités de réduction des gaz à effets
de serre provenant du transport maritime, l'AEA rappelait en effet que la
navigation en mer implique que « le navire est confronté à
diverses formes de résistance, qui peuvent être surmontées
grâce à l'énergie de propulsion ». Ces
résistances sont au nombre de cinq :
- Résistance frictionnelle de la coque dans l'eau
- Résistance due à la formation de vagues autour du
navire
- Résistance du « tourbillon ~, qui correspond a
l'énergie perdue consécutivement a la formation d'un tourbillon a
l'arrière du navire
- Résistance a l'air, variable en fonction de la force et
la direction du vent
20 AEA Energy and Environment, Greenhouse gas
emissions from shipping: trends, projections and abatements, September
2008.
- Résistance induite, générée par les
appendices du navire.
C'est l'énergie de propulsion qui va permettre au
navire de vaincre ces résistances et de se mouvoir sur l'eau. Le
déplacement du navire est le fruit d'une relation cubique entre la
puissance nécessaire à l'obtention de la vitesse21. On
considère dès lors que Puissance =
Vitesse3 (Voir Figure 1 ci-dessous).
Figure 1 : Rapport vitesse/puissance en eaux calmes
pour un porte-conteneur de 130 mètres de long
Source : AEA Energy and Environment, Greenhouse gas
emissions from shipping: trends, projections and abatements, September
2008.
Les armateurs sont donc confrontés à un
défi simple en matière de navires verts : améliorer la
performance énergétique et écologique de ces derniers.
Cela implique de diminuer la consommation de fioul -et partant les
émissions de Co2- tout en conservant un niveau de puissance de
propulsion égal.
21 Ibid.
Avant d'examiner les solutions techniques qui s'offrent aux
armateurs pour améliorer l'efficacité énergétique
de leurs navires, il convient d'examiner comment est répartie la
consommation d'énergie dans un navire commercial (Voir figure 2
Ci-dessous).
Cette analyse va déterminer les domaines techniques dans
lesquels des solutions doivent être apportées pour
améliorer l'efficacité énergétique des navires.
Figure 2 : Répartition de la dépense
d'énergie d'un navire « standard » dans des conditions
d'exploitation normales
Source : AEA Energy and Environment, Greenhouse gas
emissions from shipping: trends, projections and abatements, September
2008.
La Figure 2 détaille les postes de répartition de
la dépense énergétique d'un navire. Nous pouvons en
conclure, en arrondissant les chiffres, que :
- La production de chaleur -Chaleur destinée a produire
de l'électricité, a chauffer le fuel et le navire
(heat), a laquelle vient s'ajouter la chaleur d'échappement
(exhaust)- représente en moyenne 45% de la dépense
énergétique d'un navire.
- L'énergie destinée a la propulsion du navire
-qu'il s'agisse des hélices (Axial propeller, rotational propeller,
propeller) ou de l'arbre d'hélice (transmission)-
représente en moyenne 20% de la dépense énergétique
d'un navire.
- L'énergie destinée a vaincre les
résistances -résistances de l'eau (wave, hull, residual
hull) et de l'air (air)- représente en moyenne 30% de la
dépense énergétique d'un navire.
- L'énergie destinée a l'alimentation auxiliaire
(auxiliary) représente en moyenne 5% de la dépense
énergétique d'un navire.
Afin de réduire ces postes de dépense,
architectes navals, armateurs et chantiers ont évalué l'impact
d'une modification des caractéristiques physiques des navires (coque,
superstructure, hélices, machines, moyen de propulsion etc.) sur leur
niveau d'émission de Co2.
L'idée à partir de laquelle ont travaillé
armateurs et techniciens est de cibler dans un premier temps un poste de
dépense énergétique (Cf Figure 2) avant de travailler
à sa réduction tout en conservant un niveau de propulsion
constant.
L'industrie du shipping tend à privilégier trois
pistes de réflexion22 pour améliorer l'empreinte
écologique des navires a partir d'une transformation physique de ceux-ci
: les améliorations au niveau du design du navire,
l'utilisation de carburants alternatifs, voire même
d'énergies renouvelables.
22 L'ensemble de nos recherches nous a permis de
dresser un inventaire relativement exhaustif des transformations physiques et
des évolutions technologiques utilisées par les armateurs pour
améliorer la performance énergétique de leurs navires.
Certaines sont déjà a pied d'oeuvre, d'autres sont encore a
l'étude, d'autres encore relèvent davantage du fantasme que d'une
hypothétique réalité compte tenu des avancées
technologiques du moment.
L'ensemble des transformations évoquées dans ce
travail a été puisé dans des sources telles que AEA Energy
and Environment, Greenhouse gas emissions from shipping: trends,
projections and abatements, September 2008, Dragos Rauta (Intertanko)
Shipping : advancing from green to greener, July 2010, ainsi que toute une
série de documents mis a disposition par l' Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE) en
marge de son atelier de réflexion intitulé « Workshop on
Green Growth in Shipbuilding »..
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