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Financement de navires verts : une rentabilite incertaine ?

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par Guillem Salles
Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master 2 Transports Internationaux 2011
  

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TABLE DES FIGURES

Figure 1 : Rapport vitesse/puissance en eaux calmes pour un porte-conteneur de 130 Mètres 11

Figure 2 : Répartition de la dépense d'énergie d'un navire « standard ~ dans des conditions

d'exploitation normales 12

Figure 3 : Proue standard et proue « hache » mise au point par NKK pour améliorer la performance

énergétique des navires 15

Figure 4 : Contre-hélice (Kanome®) et tuyère (Mewis®) 16

Figure 5 : navire Nippon Yusen Kaisha (NYK) équipé de panneaux photovoltaïques 19

Figure 6 : Propulsion additionnelle par cerf-volant 19

Figure 7 : Evolution des prix du IFO 380 et du MGO à Rotterdam et prix du brut (en USD) 25

Figure 8 : Consommation d'énergie estimée - avancées technologiques 30

Figure 9 : Evolution des prix de l'IFO 380 en 2011 33

Figure 10 La relation taux de profit / economies d'énergie 43

Figure 11 Breakeven, revenus du navire et viabilité du financement 48

Figure 12 : Montage classique d'un financement maritime 49

Figure 13 : Evolution des prix des navires-citerne (2010-2012) 53

Figure 14 : Evolution des prix des vraquiers (2010-2012) 53

Figure 15 : Exercice de value to loan navire standard/navire vert (Fictif) 60

TABLE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Estimation du risque technologique et du coût d'information 21

Tableau 2 : Caractéristiques des différents types de carburants 23

Tableau 3 : Gains de soutes permis par les nouvelles technologies 28

Tableau 4 : Part des coûts de soutes dans les coûts totaux d'un porte-conteneurs en fonction des prix du fioul, de la taille du navire et de la vitesse d'exploitation 31

Tableau 5 : Evolution des prix de l'IFO 380 dans certains ports 32

Tableau 6 : Principales caractéristiques des services de ligne régulière conteneurisées,

Janvier 2010 39

Tableau 7: Impact du slow steaming sur les émissions de Co2 par ligne (période 2008-2010) 40

INTRODUCTION

« Tout armateur qui s'accroche encore a l'idée que le débat sur le changement climatique n'affectera pas les grandes décisions à prendre dans les cinq ans à venir et les modèles économiques en vigueur actuellement dans l'industrie maritime est terriblement mal renseigné ».

C'est en ces termes que Forum for the future, un think tank soutenu par des grands noms de l'industrie du transport maritime -Maersk, Tsakos, Lloyd's Register, etc.- lançait en mai dernier dans Lloyd's List1 sa Sustainable Shipping Initiative, une réflexion commune pour un transport maritime plus respectueux de l'environnement.

Cette initiative vers un shipping durable faisait entre autres la part belle aux « navires verts », destinés a améliorer l'empreinte écologique du transport maritime dans les décennies à venir.

Le navire vert peut se définir comme tout navire de commerce -assurant aussi bien au transport de marchandises que de passagers- qui utiliserait une technologie destinée à réduire son empreinte écologique, ou dont l'exploitation se ferait en intégrant des considérations environnementales.

Nous désignerons par financement les prêts que les banques commerciales peuvent concéder aux armateurs. Pour plus de lisibilité, ces prêts commerciaux seront envisagés tout au long du devoir dans leur configuration la plus classique, a savoir une somme d'argent prêtée a un armateur par le biais d'une structure juridique ad hoc -et remboursée à dates fixes selon un échéancier défini- avec en contrepartie une garantie hypothécaire2 sur le navire financé.

Le transport maritime est responsable d'un certain nombre d'émissions de gaz dans l'atmosphère. En brûlant du fioul lourd pour se déplacer, les navires rejettent principalement des gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O, HFCs, PFCs, SF6), directement visés par le Protocole de Kyoto, ainsi que d'autres substances (NOx, NMVOC, CO, PM, SOx)3.

Le dioxyde de carbone (CO2) est le principal gaz rejeté par les navires. L'Organisation Maritime Internationale (OMI) a calculé qu'en 2007 le transport maritime4 a émis 1046 millions de tonnes de Co2, ce qui correspond à 3,3% du total des émissions globales à travers le monde5. Parmi les autres modes de transport, l'aviation représentait 1,9% des émissions, le rail 0,5% et la route 21,3% (Voir

1 Lloyd's List, Sustainable shipping gets more industry clout, 23 mai 2011.

2 Ainsi que d'autres garanties telles qu'une délégation des assurances, des revenus du navire, une garantie d'une société ou une garantie personnelle, un nantissement d'actions.

3 Second IMO Greenhouse gases Study, 2009.

4 Egalement appelé shipping en anglais, terme que nous nous permettrons d'utiliser dans ce devoir au vu de son omniprésence dans le jargon de l'industrie maritime, fut-elle française.

5 Ibid.

Annexe 1). Le transport maritime est par ailleurs le mode de transport le moins polluant à la tonnekilomètre6 (Voir Annexe 2).

Outre le CO2, les shipping rejette également des oxydes d'azote (NOx) et des oxydes de soufre (SOx). Le rejet de ces trois gaz (CO2, NOx et SOx) dans l'atmosphère constitue la principale source d'inquiétude pour l'OMI et ses Etats membres, compte tenu de leur niveau d'émission et de leur importante contribution au réchauffement climatique (CO2) ainsi qu'à la pollution de l'air et a la dégradation des écosystèmes terrestres et marins (NOx et SOx)7.

C'est pourquoi nous nous focaliserons principalement sur les rejets de ces trois gaz au cours de la présente réflexion.

L'OMI prévoit dans des scenarios « fil de l'eau » que si rien n'est fait d'ici a 2050, le niveau d'émission de CO2 du transport maritime pourrait connaître une augmentation de 150% à 250% par rapport à 2007, et représenter de ce fait 12% a 18% des émissions totales de Co2 a l'échelle mondiale8.

Face a ces chiffres alarmistes, l'OMI a décidé de réagir en révisant l'Annexe VI de la Convention Marpol 73/78, Annexe entré en vigueur en 2005 et qui concerne la « Prévention de la pollution de l'air par les navires ». Cet annexe limitait entre autres les émissions de gaz toxiques dans les fumées des navires.

Sa révision en octobre 2008 a eu pour conséquence de réduire les niveaux d'émission de NOx et de SOx et de créer des zones de contrôle des émissions9 (dites zones SECA pour Sulphur Emission Control Areas et plus communément appelées ECA) de ces polluants.

Le nouvel Annexe abaisse ainsi la limite des émissions de SOx à 3,5% au 1er janvier 2012 (contre 4,5%
actuellement) et à 0,5% au 1er janvier 2020 sur toutes les mers du globe. Au sein des zones ECA, le

6 Ibid.

7 AEA Energy and Environment, Greenhouse gas emissions from shipping: trends, projections and abatements, September 2008 et International Transport Workers' Federation, Shipping emissions, 2009.

8 Second IMO Greenhouse gases Study, 2009.

9 Sont définies comme zones ECA définies par l'Annexe VI de la Convention Marpol : La Mer Baltique et la Mer du Nord (SOx), ainsi que les côtes de l'Amérique du Nord (SOx, NOx et rejet de particules) depuis le 11 août 2011. A noter que les côtes des Etats-Unis et la Mer des Caraïbes (SOx, NOx et rejet de particules) deviendront zone ECA au 1er janvier 2013.

D'autres zones (Les côtes de l'Union Européenne, celles du Japon, de Singapour) pourraient le devenir dans le futur. Cf. www.imo.org.

niveau d'émission de SOx a été ramené a 1% au 1er juillet 2010 (contre 1,5% auparavant), et il sera abaissé à 0,1% au 1er janvier 201510.

Pour ce qui est des NOx, l'OMI a décidé de limiter progressivement leur niveau de rejet par les moteurs diesel installés à bord des navires en instaurant différents paliers d'émissions.

Ainsi le (( Niveau 2 »11 est venu limiter le niveau d'émission de NOx des moteurs construits a partir du 1er janvier 2011 (réduction de 20% des émissions de NOx par rapport au Niveau I), et le (( Niveau III » viendra quant à lui limiter le niveau d'émission de NOx des moteurs construits a partir du 1er janvier 2016 (réduction de 80% des émissions de NOx par rapport au Niveau I).

D'autre part, afin de réduire le niveau d'émissions de CO2, l'OMI a de nouveau amendé l'Annexe VI de la Convention Marpol le 15 juillet 2011, en y intégrant des dispositions relatives à la performance environnementale des navires.

Le nouveau texte prévoit qu'à partir de 2013, tous les nouveaux navires de plus de 400 tonnes12 devront se conformer aux valeurs de référence de l'Energy Efficiency Design Index (EEDI)13, et ainsi améliorer de 10% leur efficacité énergétique. Ce pourcentage sera porté à 20% en 2020 et 30% en 2024. L'objectif est de réduire les émissions de CO2 de 180 a 240 millions de tonnes d'ici a 20230

Le principe est simple : l'OMI considère que ces 10% d'économies d'énergies entrainent mathématiquement une réduction de 10% des besoins en carburants du navire, et partant une réduction de 10% des émissions de CO2.

10 www.imo.org.

11 Appelé (( Tier II » en anglais. Le niveau II est appelé (( Tier II » et (( Tier III ». A noter que le niveau Tier II sera applicaple a l'ensemble des moteurs diesel de navires exploités sur toutes les mers du globe, alors que le niveau Tier III ne concernera que les moteurs des navires exploités dans les zones ECA.

Il existe également un Tier I qui correspond à tous les moteurs fabriqués entre 1990 et 2000 et qui impose une certaine réduction du niveau de NOx (( sous réserve de disponibilité de kits certifiés de réduction des émissions de NOx ».Cf Ibid.

12 A l'exception des rouliers, des navires à passagers et des navires équipés de systèmes de propulsion dits (( non standards », à savoir autres que ceux fonctionnant uniquement au fioul. Cf. Ibid.

13 L'EEDI est le fruit du calcul suivant : Emissions de Co2 / transport effectué où les (( émissions » représentent la quantité de CO2 émise par un navire suite au processus de combustion du fioul en tenant compte de la teneur en carbone du fioul utilisé et le (( transport effectué » représente la capacité du navire (en tonnes de port en lourd) multipliée par la vitesse du navire en charge maximale autorisée à 75% de la puissance des moteurs. Cf.www.imo.org.

En parallèle, la révision du texte prévoit également un Ship Energy Management Plan (SEEMP) qui comprend une série de mécanismes destinés a améliorer l'efficacité énergétique14 des navires en cours d'exploitation. Le SEEMP sera rattaché au Safety Management Plan.

Une nouvelle génération de navires « verts » est donc appelée à coexister avec les navires actuels, jusqu'à progressivement les remplacer complètement dans une vingtaine ou une trentaine d'années en fonction des cycles de vie des navires observés dans l'industrie15.

Les banques commerciales, en tant qu'acteur incontournable du financement de l'industrie maritime, seront appelées à financer ses navires.

L'intérêt des financiers pour le shipping en Europe n'est pas nouveau.

Il remonte en effet au XVIème siècle, quand de riches particuliers ont commencé à financer des navires sous des structures juridiques relativement rudimentaires et à responsabilité limitée16 L'engouement pour le transport maritime a dès lors connu des hauts et des bas, et n'a pas évolué de manière notable jusque dans la seconde moitié du XIXème siècle avec les premiers balbutiements des crédits hypothécaires dans le maritime. Il faut dire qu'à cette époque-là les montants prêtés étaient faibles tant en valeur absolue qu'au regard de la valeur des navires ; l'autofinancement était la norme, et l'emprunt peu ou prou l'exception17.

Cette réalité perdura jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale et ce n'est que dans les années 1950, sous l'effet du développement économique des Etats-Unis, du Japon et de l'Europe que la demande de navires neufs décolla véritablement, et avec elles les besoins de financement. La flotte mondiale crût à un rythme soutenu, et le crédit se structura peu à peu, dominé jusque dans les années 1970 par des financements dont le remboursement était calculé en fonction des sommes payées par les affréteurs aux emprunteurs, des contrats d'affrètement a temps qui liant les deux parties.

Depuis les années 1970, les banques commerciales sont restées les acteurs principaux du financement de la flotte mondiale. Toutefois, les dernières 25-30 années ont vu émerger de nouveaux acteurs -Fonds d'investissement KG en Allemagne, KS en Norvège etc.- et de nouveaux produits financiers à destination des armateurs.

14 On compte a ce titre des innovations sur la coque, le système de propulsion, l'entretien du navire, etc. Voir infra I) A) 1) Des surcoûts liés aux caractéristiques physiques des navires verts.

15 Stephenson Harwood, Shipping finance, Euromoney Books, 2006.

16 Ibid.

17 Ibid.

Les banques commerciales restent toutefois maîtresses du marché, puisqu'elles fournissaient encore 70% des besoins de l'industrie en 200618.

La pérennité des financements de navires repose sur deux facteurs : la capacité du banquier à estimer le risque et sa capacité a sécuriser les prêts, c'est-à-dire pouvoir récupérer la somme prêtée même en cas de défaut du client19. Cette constante vaut pour tous les financements, même si les types d'actifs financés (vraquiers, navires citernes, porte-conteneurs, offshore etc.) vont présenter des risques spécifiques qui appelleront des solutions de financement adaptées.

La sécurisation des prêts passe par deux variables : la valeur du navire, qui doit être de nature à couvrir la créance à tout moment du prêt, et les revenus du navire, qui doivent théoriquement permettre à eux seuls le remboursement des mensualités du crédit.

Les mesures environnementales décrites plus haut et adoptées par l'OMI risquent d'avoir un impact sur l'économie des navires. En effet, les conséquences financières de ces dernières, de par les surcoûts qu'elles engendrent pour les armateurs, pourraient modifier les équilibres actuels et peser tant sur leur capacité à se voir octroyer des crédits que sur celle à les rembourser.

Il s'agira pour nous moins de chiffrer les surcoûts engendrés par ces mesures environnementales que d'examiner leur effet sur l'économie des navires et in fine sur la pérennisation des financements maritimes dans leur configuration actuelle.

Dès lors, le financement des navires verts sera-t-il rentable pour les banques commerciales ?

L'examen de cette question montre bien qu'en dépit de certains surcoûts liés a l'application des nouvelles mesures environnementales décidées par l'IMO, la rentabilité de principe des financements est préservée (I). Toutefois, les lourdes incertitudes qui pèsent encore sur l'impact financier de ces mesures -eu égard à leur caractère récent- pourrait potentiellement hypothéquer cette rentabilité (II).

18 Ibid.

19 Ibid.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand