SECTION-2 : LA QUASI CONSTANCE DES
MODALITÉS DE COMPUTATION DES DÉLAIS
Les modalités de computation des délais
renvoient aux considérations qui gouvernent le décompte des
délais. Ces modalités différent selon qu'il s'agisse des
délais de principe ou des cas de prorogation des délais. Cette
distinction nous conduit à analyser successivement les modalités
de computation des délais de principe (Paragraphe 1) et les
hypothèses de prorogation des délais (Paragraphe2).
PARAGRAPHE- 1 : LES DÉLAIS DE PRINCIPE DU
RECOURS GRACIEUX
Les délais de principe du RGP sont ceux qu'on retrouve
à l'article 17 alinéa 3 (a) de la loi n° 2006/022
précitée. Ces délais requièrent pour leur mise
oeuvre des modalités de computation plus ou moins consacrées par
les textes et la jurisprudence. Étant donné que le
problème relatif à l'acheminement des courriers postaux a eu des
incidences sur la détermination des délais du recours gracieux,
il apparait important d'aborder dans une approche double les modalités
de computation des délais de principe (A) et la situation
particulière des courriers postaux. (B)
188 Voir affaire SEBA NDONGO précitée, citée
par MOMO (B), Article précité, p.140.
A- Les modalités de computation des
délais de principe
En dépit de nombreuses hésitations, la
juridiction administrative camerounaise a fini par prendre position sur les
modalités de computation des délais. Dans un premier temps, le
calcul des délais se faisait de mois en mois ou d'années à
années, compte non tenu du nombre de jours qui composent les mois ou les
années. Il ressort de l'étude faite par M. MOMO Bernard qu'une
analyse des décisions rendues avant 1977 laisse percevoir que la
juridiction administrative incluait dans le décompte des délais
tant le jour de la réalisation ou de la connaissance du fait
dommageable, de publication ou de notification de la décision
litigieuse, encore appelé « dies a quo » , que le
jour où expire le délai prescrit, c'est-à-dire le «
dies à quem ».189
Toutefois, depuis le jugement n°19/CS-CA du 27 avril
1978, NGONGANG Richard c/ État du Cameroun, la juridiction
administrative utilise constamment la notion de délais francs. Dans
cette affaire, la Chambre Administrative avait estimé que le recours
gracieux doit être formé dans les deux mois suivant la
décision attaquée. Celle-ci ayant été
notifiée le 6 octobre 1969, le requérant avait jusqu'au 7
décembre pour présenter son recours gracieux.
En application de l'ordonnance n°72/6 du 26 août
1972 et de la loi du 8 décembre 1975 fixant la procédure devant
la Cour Suprême, le juge adopte un calcul similaire dans l'espèce
ESSOMBA TONGA Gabriel c/État du Cameroun précitée. Un
recours gracieux est adressé le 4 février 1976. Après le
silence de trois mois de l'Administration, le recourant disposait de 60 jours
pour saisir la Cour Suprême. « Il s'en suit que ESSOMBA TONGA
avait jusqu'au 6 juillet pour instruire son recours », conclut le
juge de l'espèce.
Il ne s'agit donc ni plus ni moins que des délais
francs sur lesquels la jurisprudence est désormais fixée.
À la vérité, il s'agissait d'un retour à une
ancienne jurisprudence de plus d'un quart de siècle
matérialisée par un arrêt du
189 Arrêt n°173/CFJ-CAY du 08 juin 1971, OWONO
ESSONO Benoit c/ État Fédéré du Cameroun Oriental,
Recueil MBOUYOM, T.2, pp.327-328. Dans le même sens, Voir jugement
n°69/CS-CA du 24 avril 1976, ABENELANG Gustave c/ État du Cameroun
.Cité par Momo (B), Article précité, p.136.
Conseil du Contentieux Administratif du 29 novembre 1956
opposant le Sieur EKONG Yves Adolphe au Territoire du Cameroun. Dans cette
décision telle que rapportée par M. MOMO Bernard, le Conseil du
Contentieux Administratif déclare :
« Considérant qu'au terme d'une jurisprudence
bien affirmée du Conseil d' État ,le délai
prévu à l'article 11de la loi du 5 août 1881 est un
délai franc, c'està-dire qu'il n'est pas tenu compte du «
dies a quo » jour où la décision a été
notifiée ni du « dies a quem », jour où le délai
arrive à expiration...il a été jugé ,en outre, que
les mois se comptent de quantième à quantième (...)
» .
«Considérant que dans ces conditions, la
décision incriminée ayant été notifiée le 16
avril, le recours pouvait être reçu jusqu'au 16 juillet
inclus190 ».
Dans une décision rendue en 2004, la Chambre
administrative déclare :
« Attendu en l'espèce que le procès
verbal de mise en demeure querellé ayant été
notifié au sieur ACHENGUI le 14 juin 2000 par exploit du
ministère de Maître NGUE Gabriel, huissier de justice, à
Yaoundé, le recourant avait jusqu'au 15 août 2000 inclus pour
former son recours gracieux préalable » 191 .
La situation du RGP acheminé par courrier postal
mérite aussi de retenir notre attention.
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