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Le recours gracieux préalable au Cameroun, trente ans après

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par Grégoire Yves DOUNGUE KAMO
Université de Dschang Cameroun - Master en droit public 2011
  

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PARAGRAPHE- 2 : LES EXCEPTIONS

JURISPRUDENTIELLES

Certaines exceptions à la règle du recours gracieux préalable tirent leur source dans la jurisprudence administrative camerounaise. Pour les besoins de l'analyse, force est de distinguer les exceptions jurisprudentielles relatives à l'urgence (A) et celles propres aux matières ordinaires (B).

A - Les exceptions jurisprudentielles en matière d'urgence

L'affaire DJANBOU Maurice c/SOCADIC120, objet de l'Ordonnance de sursis à exécution n°38 du 27 juin 1997 portant ordonnance de sursis à exécution consacre une jurisprudence emblématique en matière de sursis à exécution. Cette décision est d'autant intéressante que son analyse ne saurait faire économie des faits. En l'espèce, à la requête de sieur DJANBOU Maurice, Maître BIYIK,

119 Article 16. (1) « Les décisions du conseil ne sont pas susceptibles de recours gracieux préalable

(2) Elles peuvent faire l'objet de recours en annulation devant la juridiction administrative compétente, sans que ce recours ne soit suspensif. »

120KEUTCHA TCHAPNGA (C), « Le régime juridique du sursis à exécution dans la jurisprudence administrative camerounaise », Article précité, pp. 87-88.

huissier de justice saisit au domicile, dans les magasins et bureaux de la SOCADIC des effets mobiliers. L'huissier est sur le point de vendre les biens saisis lorsque le procureur de la République lui fait parvenir un message demandant la restitution des biens saisis, à son sens, de manière irrégulière. Prévenu, DJANBOU Maurice introduit devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême une requête tendant à la rétractation du message -porté du procureur de la République doublé d'une demande de sursis à exécution dudit message.

Ce qui nous intéresse prioritairement dans cette décision qui pose plusieurs problèmes,121 c'est que le recours contentieux de sieur DJANBOU n'était pas précédé d'un RGP. Pourtant, il avait été déclaré recevable par le juge administratif du sursis. Cette Ordonnance faisait par conséquent exception à la règle traditionnelle du recours gracieux préalable. Ce qui n'était ni plus ni moins qu'une interprétation particulière de la loi.

On sait d'ailleurs que dans plusieurs autres affaires, toujours relatives au sursis à exécution122, le juge a admis la recevabilité d'un recours contentieux intenté sans que le contentieux ne soit lié. À vrai dire, le juge a fait droit à un recours contentieux prématuré, étant donné que les délais impartis à l'Administration pour se prononcer sur le RGP n'étaient pas arrivés à leurs termes. Ces décisions bien que soucieuses des droits des justiciables, brillent par leur singularité et n'ont pas fait jurisprudence. Elles sont donc restées isolées.

Avec la loi de 2006 précité, le problème ne se posera plus en ces termes, car l'article 18 alinéa 4 dispose sans ambigüité :

« L'ordonnance prononçant le sursis à exécution devient caduque si, à l'expiration du délai prévu à l'article 18 ci-dessus, le tribunal n'est pas saisi de la requête introductive d'instance ».

121 Par exemple celui de la capacité du juge administratif à protéger les droits des particuliers.

122 Ordonnance de référé n°05/CS/PCA du 05 octobre 1992 portant sursis à exécution, affaire SIGHOKO FOSSI Abraham c/ État du Cameroun (MINSANTE) et Ordonnance de sursis à exécution n°21/OSE/PCA /91-92, Dame MAYOUGA Yvonne c/ État du Cameroun (MINSANTE).

Le délai dont fait état l'article 18 est de 60 jours. Cet article est donc clair sur le fait que désormais - en matière de sursis à exécution-, après avoir adressé le recours gracieux à qui de droit, le requérant peut directement saisir le juge de la Chambre Administrative sans attendre les délais du recours contentieux.

Il serait donc bénéfique pour le requérant d'élaborer un recours gracieux qui vaudra tant pour la demande de sursis que pour le recours au fond. Dans ce cas à l'issue de la décision de sursis, il devra tout simplement attendre les délais si tel est le cas pour saisir le juge.

En matière de référé administratif, sous l'empire de l'article 122 de la loi n°75/17 du 8 décembre 1975 précitée, il arrivait souvent que le Juge n'exige pas des requérants le RGP. Tel était le cas dans l'Ordonnance de référé n°41/OR/CAB/PCA/CS/2003-2004 du 07 juillet 2004, Social Democratic Front c/ État du Cameroun (MINATD et MINEFIB) précitée où le juge déclare:

« Attendu qu'il ne résulte pas de ce texte l'exigence d'un recours gracieux préalable, la juridiction saisie qui est celle du Président statuant en matière d'urgence, laquelle ne saurait s'encombrer des délais relatifs au recours gracieux sans courir le risque de voir la situation de l'une des parties en procès irrémédiablement compromise par l'exécution de l'acte administratif ».

En matière ordinaire, la juridiction administrative camerounaise s'est aussi montrée révolutionnaire en recevant certains recours contentieux qui n'étaient pas précédés de recours gracieux préalables.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry