C). Le contexte français de la guerre : un regain
de xénophobie de la part des autochtones ?
En septembre 1939, la guerre est déclarée et la
France connaît des départs d'étrangers difficiles à
quantifier. La menace est militaire mais pas seulement : la pression est aussi
présente dans la vie quotidienne en raison d'une xénophobie
ambiante particulièrement violente. On estime à une soixantaine
de milliers de personnes ces départs, un effectif qui représente
8 à 10 % des migrants d'alors69. Par ailleurs, cette phase de
la Seconde Guerre mondiale est vécue comme une période ou
l'intégration est extrêmement difficile pour la plupart des jeunes
d'origine italienne : évacuations massives70 et
stigmatisation du « faux frère latin » comme « le
traître » se font particulièrement présents en cette
période trouble. Les écoliers d'origine italienne
n'échappent pas aux vives critiques de certains instituteurs et de
quelques écoliers quant à leur position d'ennemis de la France.
René Maestri, alors élève de l'école de Montreuil,
et Maria Birlouez, racontent à Marie-Claude Blanc-Chaléard ces
épisodes terribles :
« C'était pendant la guerre, en 1942 ou 1943. Nous
étions en train de jouer dans la cour de l'école quand les
instituteurs nous ont demandé de nous mettre en rang. Les fils
d'étrangers ont été regroupés en haut à
droite. Sur le coup, je n'ai pas compris jusqu'à ce que la distribution
des masques à gaz commence. Tout le monde a eu son masque... Tout le
monde sauf nous, les fils de Ritals, d'Espagnols, de Polonais ».
Cependant, René Maestri garde sa confiance en l'Ecole française
et explique que « les instituteurs n'y étaient pour rien. Ils
avaient reçu des ordres ».
Maria Birlouez raconte, quant à elle, situant
l'évènement en 1944 : « notre nom italien ne nous donnait
pas droit au masque. Cet épisode nous a traumatisés. On a cru
qu'on allait mourir, pas les autres »71.
Ajoutons aux difficultés liées à ces
remarques désobligeantes les problèmes intrinsèques de la
guerre, que, tout comme leurs camarades français, nos témoins ont
subis72 :
69 M C. BLANC CHALÉARD, « les mouvements
d'Italiens entre la France et l'étranger. Eléments pour une
approche quantitative », Paris, 1991.
70 Les hommes de Heinrich Himmler évacuent
de Marseille une vingtaine de milliers de personnes, dont beaucoup d'Italiens.
En janvier 1943, le 14ème régiment de police dynamite
le quartier du Vieux Port : le « chancre de l'Europe », comme
l'appelait le général SS Karl Oberg est désormais un champ
de ruines.
71 Entretiens de René MAESTRI et Maria BIRLOUEZ
dans M-C BLANC-CHALÉARD, Les Italiens dans l'Est Parisien. Une
histoire d'intégration (années 1880-1960), Rome, 2000, (p.
520, 521).
72 Soulignons qu'à Nantes, le lycée
Vial est sinistré lors des bombardements de 1943, des baraquements
provisoires sont alors édifiés pour que les cours puissent
continuer. La reconstruction de l'établissement n'est effective qu'en
1953.
« La position de l'Italie ennemie n'a pas
été sans commentaires vis-à-vis de nous. [...] J'avais
quinze ans en 1940 à l'apprentissage. Les bombardements étaient
nombreux avec beaucoup de victimes, en particulier en novembre 1942 au centre
d'apprentissage où plus de cent apprentis et moniteurs furent
tués. Moi-même, je suis en quelque sorte un rescapé.
»73.
« Mon père a fait partie de la défense passive
et des « cinquante otages », ils faisaient un roulement d'otage !
C'est passé à côté mais ça aurait pu !
»74.
Les insultes liées à la position italienne de 1940
laissent parfois encore leurs marques sur les décisions d'adultes des
témoins, comme c'est le cas, par exemple, pour Mario Merlo :
« À l'école je n'étais pas
français, je ressentais la différence. A l'école on est
ensemble mais de mes cinq à mes dix ans, compte tenu de Mussolini qui
avait retourné sa veste, les Français, c'est normal... on
était mal vus ! C'était un complexe. Mais ça ne se voyait
pas de l'extérieur : quand ils envoyaient des vannes, je leur disais
rien mais ça marquait. C'est pour ça qu'à 21 ans, il y a
eu l'Algérie, j'ai dit j'y vais mais pour faire mon devoir mais sans
être convaincu »75.
La réaction à la stigmatisation de l'Italien en
cette période conflictuelle est souvent de s'affirmer comme
Français, posture sûrement plus aisée pour les enfants
issus de couples mixtes comme c'est le cas de Pierre Milza dont seules les
attaches paternelles le rattache aux montagnes émiliennes :
« On m'avait appris à l'école [...] que les
« macaronis » [...] nous avaient donné un coup de poignard
dans le dos en 1940 et je ne me sentais en rien un macaroni
»76.
73 Questionnaire de Walter BUFFONI, 2010.
74 Entretien avec Mario MERLO, (1er
décembre 2009 -- Basse Goulaine).
- Le terme de « défense passive » désigne
la protection des populations en situation de guerre.
- Les « cinquante otages » font ici
référence à cet épisode douloureux de la
mémoire nantaise : le 16 octobre 1941, trois jeunes résistants
arrivent à Nantes avec pour mission d'exécuter un officier
allemand qui est assassiné quatre jours plus tard. En réaction,
le général allemand Von Stülpnagel ordonne
l'exécution de cinquante otages. Seize personnes sont fusillées
au camp du Bêle, les autres sont exécutées à
Châteaubriant et à Paris.
75 Entretien avec Mario MERLO, (1er
décembre 2009 -- Basse Goulaine).
76 P. MILZA Voyage en Ritalie, Paris, 1993
(p. 9).
|
A gauche :
Mussolini, empereur de la méditerranée. A droite :
Mussolini, l'affreux échec.
Sur les papiers :
- Guerre, signé Mussolini
- Ordres de Berlin - Roosevelt
|
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Figure no 3 : « Le rêve
et le cauchemar " Caricature de David Low77.
Cet évènement est une des grandes étapes
de notre étude puisqu'il est souvent évoqué par les
anciens écoliers. « L'accusation " est reprise maintes fois dans
les écoles comme injure envers les élèves d'origine
italienne78. C'est Roosevelt qui, le premier, qualifia de «
coup de poignard dans le dos " la déclaration de guerre italienne du 10
juin 1940, alors que les troupes allemandes avançaient sur tous les
fronts 79 . Laura Teuillères explique l'influence de cet
évènement politique et diplomatique : « La trahison de
Mussolini fait que l'on glisse vers l'idée que le coupable, c'est
l'Italien de la ferme d'en face, « ce salaud de macaroni ». [...]
L'animosité de terrain a été renforcée à ce
moment là "80. Le 24 juin 1940, le gouvernement Badoglio
dénonce l'armistice franco-italien ce qui rétablit l'état
de guerre entre les deux pays81. Cet évènement
politique majeur va avoir une influence non négligeable sur l'attitude
des écoliers et
77 Caricature de D. LOW, « Evening Standard ", 11
mai 1940.
78 P. MILZA, Op. Cit. (p. 9).
79 Ajoutons qu'à ce climat,
déjà peu propice à l'apaisement entre Italiens et
Français, s'ajoute l'italophobie renforcée par la rumeur,
pourtant erronée, du mitraillage des colonnes de l'exode par des avions
italiens.
80 L. TEULIERES
Dans « La vie rêvée des Italiens du Gers ",
documentaire diffusé le 13 avril 2010 sur France 3.
81 Pour cet éclairage chronologique, les
ouvrages utilisés sont :
L. GERVEREAU, P. MILZA et E. TEMIME, Toute la France.
Histoire de l'immigration en France au XXème
siècle, Paris, 1998 (p. 45 à 48).
Et P. MILZA Op. Cit. (p. 9 et 290).
33 des professeurs envers leurs élèves et
camarades italiens. Le statut des ressortissants transalpins est
défavorable, leur image dans l'opinion publique est
négative82. Plusieurs milliers d'Italiens dont les papiers ne
sont pas en règle seront arrêtés83. Cette
situation douloureuse, en plus de ses conséquences directes et souvent
dramatiques, sur toute la cellule familiale a, sans nul doute, contribué
à la dégradation des rapports entre les élèves
étrangers et Français. Même lorsque, comme pour
César à Noisy-le-Grand, l'intégration est globalement
bonne, elle pâtit tout de même de la guerre : « A huit, neuf
ans, quand je suis arrivé, je suis allé à l'école
du Centre. Il n'y avait pas de problèmes avec les autres, sauf
peut-être pendant la guerre »84. Souvent, le conflit
mondial n'est pas directement dénoncée par les témoins
comme la cause de leur « rejet » mais elle est presque toujours
évoquée lorsqu'ils évoquent les insultes dont ils ont
parfois été victimes, citons, par exemple, Maggiorina Bozzuffi,
née Cattirolo, qui fréquente l'école privée
à Rennes de 1930 à 1943 :
« toutes mes institutrices m'aimaient bien, sauf les
derniers professeurs pendant la guerre »85.
Jean-Louis Scaglia, à Nogent, fait sensiblement le
même constat :
« Pendant la guerre, les difficultés avec les
Français étaient plus grandes : « sale macaroni, viens pas
nous emmerder ici. En plus, il y avait un instituteur, un type qui avait fait
la guerre de 14, avec le béret et tout, il avait l'habitude de compter
tous les étrangers une fois par mois. J'étais français
mais il regardait que les noms »86.
Ce qui marque aussi cette période de guerre, c'est bien
sur le gouvernement de Vichy et, pour ce qui concerne notre sujet, sa politique
quant aux immigrés et à l'éducation. En effet le
gouvernement du maréchal Pétain considérant que « si
nous avons perdu, la faute en incombe au système éducatif
»87, il porte sur l'Ecole un regard attentif accompagné
de nombreuses réformes. Par ailleurs, plus d'un millier d'instituteurs
seront alors révoqués (parmi eux, des pacifistes, des
résistants, des juifs ou encore des francs-maçons), les Ecoles
Normales supprimées (le gouvernement vichyste les considère comme
des vases clos où le socialisme règne en maître). La
réforme vichyste instaure l'intégration des classes primaires
supérieures au secondaire, l'objectif
82 L. TEULIERES, « Mémoires et
représentations du temps de guerre dans le midi toulousain » dans
M-C BLANC-CHALEARD (dir), Les Italiens en France depuis 1945, Paris,
2003. (p. 206, 207).
83 P. MILZA, Op. Cit. (p. 83).
84 I. VENDRAMINI-WILLEMS, L'immigration italienne
à Noisy-le-Grand (1886-1968). Une intégration
réussie, Université Paris IV, 1992 (p. 121).
85 Questionnaire complété par Maggiorina
CATTIROLO-BOZZUFFI (2010).
86 Jean-Louis SCAGLIA dans M-C BLANC-CHALÉARD,
Les Italiens dans l'Est Parisien. Une histoire d'intégration
(années 1880-1960), Rome, 2000, (p. 521).
87 M-O. MERGNAC, C. GAROSCIO-BRANCQ et D. VILRET,
Les écoliers d'hier et leurs instituteurs, Paris, 2008 (p.
34).
est alors d'enlever les élèves les plus
âgés à l'influence de leurs maîtres. Ces mesures sont
supprimées à la chute du gouvernement en août 1944, en
revanche, les nouveaux centres de formations techniques (plus de 600 sont
créés à cette période), qui font à peu
près consensus quant à leur grande efficacité, sont
conservés.
Le printemps 1945 marque le retour de flux d'entrées
importants, les migrants sont alors souvent des personnes ayant
déjà travaillé en France avant le conflit. A ces cohortes
d'immigrés déjà bien intégrés à la
société française s'ajoutent les victimes du chômage
transalpin et du surpeuplement de l'Italie, souvent des clandestins
chargés de famille. Or, l'attitude libérale face aux flux est
bien finie et le criblage est désormais sans concession88.
Cependant la France en reconstruction a besoin de bras et le
phénomène d'immigration massive qui avait suivi la
première guerre mondiale se répète ici. Dès
l'été 1945, le général De Gaulle négocie,
avec le gouvernement de Rome, l'entrée, sous l'égide de l'ONI, de
travailleurs. Les résultats des deux accords négociés se
font rapidement sentir, dans des proportions néanmoins
inférieures à celles prévues initialement par les experts.
L'immigration italienne est ensuite stabilisée, tout comme la
répartition géographique des migrants89.
D). L'après-guerre : une décennie de laborieuse
amélioration de l'image de l'immigré italien.
A l'issue de la Deuxième Guerre mondiale, l'Italie est
le seul pays « développé » qui n'a pas encore
achevé sa transition démographique. Elle bénéficie
donc d'une main d'oeuvre nombreuse. A l'heure où tous les autres pays
européens sont à l'heure de la reconstruction, ces travailleurs
transalpins bénéficient de la plus grande attention de leurs
voisins mais aussi de celle de pays plus lointains (l'Argentine en est
l'exemple le plus parlant). L'Etat italien essaye de « vendre » ses
émigrés aux pays les plus offrants90. La France n'est
pas la destination la plus courue, elle est donc progressivement
délaissée pour des destinations où les salaires des
ouvriers
88 Les raisons invoquées sont professionnelles
ou médicales, parfois politiques.
P. GUILLEN, « Le cas italien », dans DUMOULIN (Michel)
(dir.), Mouvements et politiques migratoires en Europe depuis 1945,
Bruxelles, 1989 (p. 40).
89 P. MILZA, Op. Cit. (p. 86, 87).
90 - Le 23 juin 1946, la Belgique signe à
Rome le protocole d'un accord économique entre les deux pays. Il
prévoit l'envoi de 500 000 travailleurs italiens en échange de
l'approvisionnement de trois millions de tonnes de charbon annuel.
- En 1955, l'Allemagne, quant à elle, signe un engagement
en matière de migration ce qui amène presque 3 millions
d'Italiens à immigrer.
sont meilleurs. L'arrivée des Transalpins n'en est pas
pour autant devenue négligeable dans l'Hexagone et le gouvernement
français fait, en 1946, un choix historique en prenant la
décision de faire appel à l'immigration. Ces entrées sont
contrôlées par le biais de l'ONI qui est chargée des
contrats de travail et de la sélection des migrants91.
Désormais, trois types de cartes leur sont
délivrés92. Dans la décennie qui suit la
Seconde Guerre mondiale, on remarque une relative stabilisation de
l'immigration italienne et de la répartition géographique des
Transalpins de France. En 1946, ils sont encore 450 000, soit 25, 9 % des
étrangers présents dans l'Hexagone93.
Pour ce qui est de la situation économique des parents
de nos témoins, anciens ou nouveaux arrivés dans l'Hexagone, les
« Italo-français » profiteront de l'élan
économique d'après 1955, principalement ceux qui travaillent dans
le bâtiment (les banlieues sont alors en plein essor).
Après la Seconde Guerre Mondiale, l'Italien, jusque
là plutôt considéré comme indésirable,
connaît un processus de légitimation et de revalorisation de son
image94 même si on remarque toujours, dans la presse
française comme au sein des établissements scolaires un
antiitalianisme par défaut, conséquence douloureuse du souvenir
de l'alliance transalpine avec les puissances de l'Axe. Le début des
années cinquante montre que, désormais, ce sont les
Méridionaux qui émigrent majoritairement vers le territoire
français : à la vision négative des autochtones sur leurs
voisins d'Outremont, s'ajouteront donc souvent les critiques des Italiens du
Nord sur ceux venus du Sud. L'amélioration de l'image de l'Italien est
très lente comme en témoignent les incidents fréquents
rapportés par la presse et les institutions publiques. Une illustration
récurrente de ces difficultés peut ici être citée en
exemple. En effet le domaine du sport à toujours tendance à
concentrer les oppositions dans les cours d'écoles. Ainsi,
l'illustration de cette vision négative est donné cinq ans
après la fin de la guerre sur une étape pyrénéenne
du Tour de France : l'équipe italienne est huée, et le
célèbre coureur cycliste Gino Bartali, après une
91 Les critères de recrutement sont
essentiellement sanitaires et basés sur la force de travail des
postulants. Le 2 novembre 1945, une ordonnance paraît, véritable
charte de l'immigration vers la France.
92 « La hiérarchisation entre trois types de
carte permet une sélection des étrangers, y compris de ceux
déjà installés en France : la carte de résident
temporaire, pour des séjours inférieurs à un an, celle de
résident ordinaire, valable trois ans, celle enfin, de résident
privilégié, valable dix ans. [...] La carte de résident
privilégié permettant seule une installation durable.
L'ordonnance distingue ces titres de séjour des titres de travail, autre
moyen de filtrage des étrangers d'autant plus efficace que le refus d'un
titre de travail entraîne, en principe, le refus d'un titre de
séjour ».
« Les étrangers au temps des « Trente Glorieuses
» » dans A. CROIX, Nantais venus d'ailleurs. Histoire des
étrangers à Nantes des origines à nos jours, Rennes,
2007 (p. 337).
93 P. MILZA Op. Cit. (p. 86, 87).
94 A. BECHELLONI, « Il riferimento agli
Italiani nell'elaborazione di una politica francese dell'immigrazione »
(1944 - 1946), dans G. PERONA, Gli italiani di Francia 1938 À
1946, Milano, 1994 (p. 45 à 57).
impressionnante chute dans le col d'Aspin, doit
défendre son vélo à coups de poings face à un
public hostile. D'ailleurs un élève de l'école de
Blanquefort dans le Gers confie cette anecdote de cour de
récréation : « à l'école, il fallait
être pour les coureurs cyclistes français »95.
Figure no 4 : « Les Italiens
dans « le Tour »» Dessin paru dans le Canard
Enchaîné96.
En outre, les rapports des fonctionnaires d'état
constituent, eux aussi, une preuve que les relations tendues entre
Français et immigrés italiens sont toujours d'actualité
durant la décennie qui suit la victoire des Alliés. L'ambassadeur
transalpin en poste à Paris à partir de 1947, Pietro Quaroni,
explique ainsi que : « L'opinion publique en France partageait un
sentiment de vengeance envers l'Italie »97. On retrouve
d'ailleurs les mêmes constats dans les rapports des
95 Témoignage d'un enfant d'origine italienne
à Blanquefort,
Dans « La vie rêvée des Italiens du Gers
», documentaire diffusé le 13 avril 2010 sur France 3.
Cette anecdote sur l'importance du soutien aux coureurs
français est aussi illustrée par le témoignage de Pierre
Milza qui raconte un de ses souvenirs alors qu'il était en vacances en
Italie : « A San Remo, en ce début d'été 1948, je
suis allé crier mon enthousiasme pour Bobet [...] et je trouvai
parfaitement déplacé cette jeune femme, tifosa du grand Bartali
et qui, tenant à bout de bras son bambin vaguement inquiet, l'invitait
à contempler le héros du jour : « guardi ! guardi, Gino,
com'è bello » (« regarde ! Regarde Gino, comme il est
beau ! » TDLA).
Dans P. MILZA, Op. Cit. (p. 10).
96 Dessin « Les Italiens dans « le Tour
» », « Le Canard Enchaîné », 1932, BDIC.
Dans GERVEREAU, P. MILZA et E. TEMIME, Toute la France.
Histoire de l'immigration en France au XXème
siècle, Paris, 1998 (p. 58).
97 P. QUARONI, Il mondo di un ambasciatore,
Milan, 1965 (p. 253).
préfets : à la fin des années 1940, le
fonctionnaire en charge du Tarn-et-Garonne observe que : « Les Italiens ne
jouissent pas d'une grande sympathie parmi la population
»98.
Rien d'étonnant donc à ce que l'on retrouve ces
tensions dans les cours d'écoles : la période pourrait être
définie comme « l'étroite frontière entre la
maîtrise d'une politique publique et l'héritage d'une
xénophobie qui aurait acquis un visage humain »99. Il
est vrai que l'on remarque alors une difficile articulation entre la massive
entrée d'étrangers sur le sol français et les politiques
de terrain. Conseil est d'ailleurs donné aux immigrés de la part
des préfets de franciser leur nom100. L'assimilation a encore
de beaux jours devant elle. Les inspecteurs de la population, sous
l'autorité du ministère de la Population, sont chargés de
donner des cours de français aux nouveaux arrivés et de veiller
à la scolarisation de leurs enfants. Par ailleurs, on tente
d'éviter la « ghettoïsation » des immigrés
toujours dans le but de favoriser leur intégration.
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