Le traitement fiscal de la fusion-absorption des sociétés de capitaux( Télécharger le fichier original )par Lamine Chaibou Massalatchi Ecole Supérieure de Commerce de Dakar (SUP DE CO) - Master 2 en droit des Affaires et Fiscalité 2010 |
A) Caractéristiques du boni de fusionLe boni de fusion représente la plus value réalisée à l'occasion d'une « cession de titres » entre les deux sociétés parties à la convention de fusion. Une illustration permettrait d'en sceller les contours. 1) Définition du boni de fusionLe boni de fusion n'intervient que lorsque la société absorbante détient des titres de participation dans la société absorbée. Il y a boni de fusion chaque fois que la participation détenue par la société absorbante dans la société absorbée a une valeur comptable inférieure à la valeur d'apport de la fraction de l'actif net de la société absorbée correspondant aux droits de la société absorbante. En effet, il arrive fréquemment que l'opération d'absorption ne soit que la phase finale d'un processus de rapprochement entre deux entreprises ; processus amorcé par la prise de participation de l'absorbante dans le capital de la société absorbée. A ce titre, on peut mettre en exergue le rapport entre une société-mère et sa filiale ou encore une maison-mère et sa succursale. Le législateur définit les sociétés mères-filiales en partant d'un critère financier quantitatif. Si une société détient des participations supérieures à 50% dans une autre, elle est considérée comme mère et l'autre comme une filiale9(*). La filiale a sa propre personnalité morale, un patrimoine distinct de celui de la société-mère. Elle se distingue ainsi de la succursale10(*) qui elle, n'a pas de personnalité morale, car détenue totalement (juridiquement et économiquement) par la maison-mère. Il faut souligner qu'une société peut être filiale commune de deux (2) Sociétés Mères (art. 180 A.U.S.C.G.I.E). Pour qu'il en soit ainsi, il faut deux (2) conditions : ü 1ère Condition : Les sociétés mères doivent détenir dans le capital de la filiale séparément, de manière directe ou indirecte, une participation suffisante pour qu'aucune décision extraordinaire ne puisse être prise sans leur accord ; ü 2ème Condition : Il faut qu'elles participent à la gestion de la filiale commune. Lorsque l'opération d'absorption n'est que la phase finale d'un processus de rapprochement entre deux entreprises, deux cas de figure peuvent alors se présenter. L'absorption peut être une fusion en bonne et due forme, l'absorbante n'ayant qu'une simple participation dans la société absorbée. Mais l'absorption peut parfois ne se présenter que comme une simple régularisation, l'absorbante ayant déjà largement pris le contrôle de l'absorbée au point d'en détenir parfois, la totalité du capital social. Ces deux formes de fusion doivent faire l'objet d'une analyse spécifique. Lorsque la fusion est placée sous l'hypothèse selon laquelle elle détient une simple participation dans le capital de la société absorbée, la remise aux associés de la société absorbée par voie d'échange de titre de la société absorbante va conduire nécessairement à remettre à la société absorbante ses propres titres, ce qui est prohibé par l'AUSCGIE en son article 191 alinéa 3 qui dispose : « Toutefois, il n'est pas procédé à l'échange de parts ou d'actions de la société bénéficiaire contre des parts ou actions des sociétés qui disparaissent lorsque ces parts ou actions sont détenues : 1°) soit par la société bénéficiaire ou par une personne agissant en son propre nom mais pour le compte de cette société ; 2°) soit par la société qui disparaît ou par une personne agissant en son propre nom mais pour le compte de cette société ». A cet égard, cette difficulté peut être réglée en ayant recours à plusieurs mécanismes : soit on pratique le mécanisme de la fusion-allotissement ; soit, on met en oeuvre le mécanisme de la fusion-renonciation. Le mécanisme de la fusion-allotissement consiste en quelque sorte, à faire précéder l'opération de fusion d'un partage partiel (on parle parfois de liquidation partielle) de l'actif de l'absorbée au profit de la société absorbante à concurrence des droits de celle-ci dans le capital de la société absorbée. Autrement dit, c'est une opération par laquelle on efface le lien juridique qui existait entre les deux sociétés participantes à l'opération de fusion et on réalise l'opération. Mais, en pratique, du fait de son coût fiscal très élevé, celle-ci n'est en réalité plus utilisée. Quant à la fusion-renonciation, c'est un processus par lequel la société absorbante limite l'augmentation de son capital aux titres destinés à rémunérer les associés autres qu'elle-même. En d'autres termes, c'est une opération par laquelle la société bénéficiaire renonce dans l'augmentation de capital à émettre les titres qui vont lui appartenir pendant la réalisation de l'opération de fusion. En effet, la société absorbante se limite à créer les droits sociaux nécessaires à la rémunération des actionnaires ou associés de la société absorbée autres qu'elle-même. Ce traitement est au demeurant, celui applicable en matière de droit des sociétés. Le fonctionnement du mécanisme de la fusion-renonciation ne soulève pas de difficultés spécifiques. Toutefois, il importe de distinguer selon que l'annulation chez l'absorbante des titres détenus dans le capital de la société apporteuse dégage une plus-value ou une moins-value. Lorsque l'annulation des titres entraîne une plus-value, on parle de boni de fusion. Le traitement fiscal des plus-values réalisées dans le cadre de la fusion-renonciation est globalement plus favorable que dans la fusion-allotissement. Pour la société absorbée, l'ensemble des éléments d'actif étant transmis à la société bénéficiaire, l'apport bénéficie du régime fiscal des plus-values de fusions avec le mécanisme d'imposition immédiate dans le cadre du régime de Droit commun. Les associés de la société absorbée, autres que l'absorbante reçoivent par voie d'échange, des titres de la société absorbante. A l'égard de la société absorbante, il convient de procéder à l'annulation des titres de l'absorbée, inscrits à l'actif du bilan parmi les titres en portefeuille. Cette annulation est donc susceptible de dégager une plus-value égale à la différence entre la valeur réelle de la fraction de l'apport qui correspond aux droits de la société absorbante et la valeur comptable des titres. Cette plus-value est en principe imposable. A contrario, l'annulation des titres peut engendrer une moins-value : c'est le mali de fusion. Lorsque la société absorbante procède à l'annulation des titres qu'elle détenait dans la société absorbée, elle peut être amenée à constater une moins-value. Tel sera le cas lorsque le coût d'acquisition des titres annulés est supérieur à la valeur réelle des actifs qu'ils représentent au jour de la fusion. Les règles comptables définissent le mali de fusion comme étant l'écart entre l'actif net reçu par la société absorbante à hauteur de sa participation dans le capital de la société absorbée et la valeur comptable de cette participation. Dans l'hypothèse où l'opération de fusion est caractérisée par une détention à 100% de la société absorbée par la société absorbante, en d'autres termes, l'hypothèse selon laquelle la société absorbante détient la totalité ou la quasi-totalité des parts sociales ou actions de la société qu'elle projette d'absorber, la fusion-absorption se présente alors soit comme l'aboutissement de prises de participations successives débouchant sur le contrôle complet d'une société qui est finalement absorbée, soit comme un moyen d'assainir ou de restructurer un groupe d'entreprise en ramenant dans le giron d'une seule personne morale, des entités jusque-là juridiquement distinctes bien qu'économiquement déjà sous contrôle. Dans le cas des sociétés détenues à 100%, il sied d'ajouter le cas des sociétés dont la quasi-totalité du capital est détenue par une même société. En effet, l'absorption de ces sociétés présente la même caractéristique que l'absorption de filiales à 100% : elle s'effectue sans augmentation de capital pour l'absorbante. Dans le cas des sociétés détenues à 100%, l'absence d'augmentation de capital est logique. Etant donné que l'absorbante est l'associé unique de l'absorbée, toute part émise par l'absorbante devrait lui revenir. Il conviendrait alors d'opérer une fusion-renonciation « pour le tout ». Outre le boni de fusion, il faut préciser qu'il existe la prime de fusion. En effet, ces deux notions ont, du point de vue du droit des sociétés, une signification différente et la distinction est importante. Il faut admettre que la prime de fusion proprement dite constitue un élément résultant de la différence entre, d'une part, la valeur de l'apport d'actif net fait par la société absorbée après diminution de la partie de cet actif correspondant à la participation de la société absorbante dans la société absorbée et d'autre part, la valeur nominale des titres représentatifs de l'augmentation du capital. N'intervient qu'ensuite la notion de boni ou de mali de fusion. Il y a prime de fusion chaque fois que la valeur des titres de la société absorbante excède, lors de la fusion, leur valeur nominale. C'est la différence entre la valeur des biens reçus en apport et le montant de l'augmentation du capital. Donc, on parle de prime de fusion dès lors qu'il y a discordance entre la valeur nominale du titre et sa valeur réelle. En général, il arrive que la valeur des titres émis ne corresponde pas à la valeur nominale. La prime de fusion s'obtient par deux voies. A savoir : - Soit en multipliant la différence entre la valeur nominale et la valeur réelle de l'action de la société absorbante par le nombre d'actions créées ; - Soit par la différence entre la valeur réelle de la société absorbée et le montant de l'augmentation du capital de l'absorbante. En conclusion, il faut donc retenir que la prime de fusion comprend deux éléments : - La prime de fusion proprement dite ; - Le boni de fusion ou « prime de fusion complémentaire ». Dans le cas d'une fusion-renonciation, la société absorbante se limite à créer les droits sociaux nécessaires à la rémunération des actionnaires de la société absorbée autres qu'elle-même. C'est la forme la plus habituelle. Pour ce faire, nous proposons une illustration financière afin de mieux cerner la notion. * 9 _ Article 179 de l'A.U.S.C.G.I.E : « Une société est société mère d'une autre société quand elle possède dans la seconde plus de la moitié du capital. La seconde société est la filiale de la première ». * 10 _ Article 116 de l'A.U.S.C.G.I.E : « La succursale est un établissement commercial ou industriel ou de prestation de services, appartenant à une société ou à une personne physique et dotée d'une certaine autonomie de gestion ». |
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