Analyse critique de la collaboration entre les organes exécutif et législatif provinciaux du Nord Kivu( Télécharger le fichier original )par Jackson MUSANGA Université libre des pays des grands lacs - 2009 |
CONCLUSIONDes décennies durant, la République Démocratique du Congo a évolué avec un système de gouvernance qui était fondé sur la centralisation du pouvoir. Cette centralisation, estimons- nous modestement, a fait que le pays n'avait qu'un seul centre de prise des décisions. Toutes les questions étant gérées au sommet de l'Etat, les aspirations profondes de la population avaient moins de chance d'être prises en compte par un pouvoir qui se trouvait situer parfois à des milliers des kilomètres. Certes qu'au niveau local il y avait des dirigeants, mais il convient d'observer que ces derniers n'étaient que des simples représentants de l'Etat et à ce titre ils n'avaient aucun pouvoir effectif, mieux aucune décision à prendre : leur rôle se limitait à exécuter fidèlement les ordres de Kinshasa et quelque fois au détriment de la population. Après les différentes guerres qui ont sévi la RDC, les autorités ont compris que le développement intégral du Congo ne peut être effectif que s'il y a de possibilité pour les entités locales de prendre directement en charge un certain nombre des tâches qui, hier révélaient de la compétence exclusive de l'Etat. C'est donc à la suite de cette volonté politique affirmée que le peuple congolais a voté par référendum populaire la constitution de la IIIème République qui a dans ses innovations levé l'option sur la forme de l'Etat. C'est en effet à l'article 3 de la Constitution du 18 Février 2006 que l'on précise que la République Démocratique du Congo est un Etat unitaire décentralisé. Par la décentralisation, les provinces et les entités territoriales décentralisées disposent désormais des organes propres avec des compétences particulières. C'est alors que la constitution attribue des compétences particulières et exclusives de la province à côté des compétences concurrentes avec l'Etat. Disposant alors des attributions propres, les provinces sont devenues désormais des centres d'impulsion d'où partira le développement intégral de la RDC. Cependant, la vie politique en province n'est pas sans difficulté liée pour beaucoup à une absence de culture politique dans le chef des dirigeants mais aussi et surtout à une crise de bonne gouvernance due à un manque de culture démocratique. Pour gérer la province, le constituant congolais a instauré deux institutions : l'Assemblée provinciale et le Gouvernement provincial. Tandis que l'Assemblée provinciale est l'organe délibérant de la province et par conséquent organe suprême en termes de préséance, le Gouvernement provincial quant à lui est l'organe exécutif provincial. Il faut donc une conjugaison d'efforts pour que la province puisse décoller sur le plan du développement. Cependant, ce que l'on constate sur terrain est on ne peut plus malheureux : tantôt les députés provinciaux ne connaissent pas du tout leur rôle et tombent purement et simplement dans le fanatisme, tantôt ils initient des actes fantaisistes pour plaire à l'opinion, tantôt ils veulent agir dans la légalité mais manquent du courage politique pour aller au bout de leur logique, tantôt ils sont considérés comme des ennemis lorsqu'ils veulent exercer leurs attributions constitutionnelles. Etant donné que le programme du Gouvernement constitue en quelque sorte un contrat-programme que toutes les autorités provinciales prennent avec la population, en même temps que seul le Gouvernement provincial l'exécute pendant que c'est l'Assemblée provinciale qui lui donne les moyens de sa politique, il faut alors que ces deux institutions puissent collaborer dans cette mission. C'est à la suite de ce qui précède que le constituant congolais a institué en faveur des députés provinciaux un contrôle qu'ils peuvent exercer sur le Gouvernement provincial et au terme duquel ils peuvent prendre des sanctions soit positives, soit négatives tantôt pour encourager les méritants, tantôt pour décourager les dérapages.44(*) Ainsi donc, les députés provinciaux, à travers les différents instruments juridiques que leur accorde la constitution, disposent d'un pouvoir leur permettant de participer indirectement à la gestion au quotidien de la province. Tout autant, la constitution et le règlement intérieur de l'Assemblée provinciale du Nord Kivu reconnaissent à l'exécutif provincial la possibilité de participer à l'oeuvre législative tantôt par des projets d'édits délibérés en conseil des ministres, tantôt par des points de vue sur une question donnée qui fait l'objet d'étude à l'Assemblée provinciale, tantôt par de demande de révision d'un édit pour telle ou telle autre raison. La collaboration étant alors le pilier d'une gestion ordonnée de la province et de toute entité décentralisée en RDC, il sied cependant de mettre des règles précises qui sont de nature à limiter les dérapages que l'on constate couramment dans la vie politique en RDC et plus particulièrement en province du Nord Kivu. Tous points considérés, nous pensons modestement qu'il convient que le processus de décentralisation soit efficacement encadré pour éviter que le système qui a conduit les autres pays au développement ne puisse conduire la RDC dans un imbroglio. C'est pourquoi nous suggérons au législateur congolais de prendre des mesures qui sont de nature à limiter des actions fantaisistes que posent certains élus provinciaux et qui peuvent dans une certaine mesure s'interpréter comme actes de nature à distraire le Gouvernement provincial dans ses actions. On pourrait alors déterminer les conditions objectives susceptibles de justifier le vote d'une motion, soit alors interdire toute initiative tendant au renversement du Gouvernement provincial pendant une période bien déterminée, soit enfin encourager déjà le député provinciaux à se rassurer que seules des personnes compétentes vont être investies de la qualité de ministre provincial. Certes que notre travail contient quelques imperfections inhérentes à la personne humaine, mais nous pensons avoir contribué, au travers de cette modeste réflexion sur la collaboration entre les institutions politiques provinciales, à ce vaste chantier de décentralisation qui est en pleine expérimentation en RDC. C'est ainsi que nous en appelons à d'autres chercheurs de poursuivre des études sur cette question qui est d'actualité et qui permettra, nous en sommes persuadé, à la RDC d'atteindre enfin le développement tant attendu par tout le peuple congolais. * 44 _ SERGE-BAMBA GAYE, RDC-PNUD : Bâtir une vision partagée pour la mise en oeuvre de la décentralisation ; In MONUC Magazine ; Vol. VI., n° 40, Kinshasa, Janvier-Février 2008, p.56. |
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