Section 1ère : Evolution du système
éducatif en RDC.
Nous allons épingler la question relative à
l'évolution du système éducatif (A), avant d'aborder
l'aspect socio-politique (B).
§1. L'évolution du système
éducatif congolais.
Cette évolution peut être scindée selon
qu'on se place avant l'époque coloniale (a), pendant l'époque
coloniale (b) et après cette époque ; dire mieux depuis
l'indépendance jusqu'à nos jours (c).
A. Le système éducatif congolais
précolonial.
Durant cette période, c'est le système
éducatif traditionnel qui prévalait. Les programmes comportaient
des fables chargées de morale, l'instruction de la botanique, de la
biologie et de la médecine (essentiellement les plantes
médicinales), les traditions du clan et le code du droit coutumier. Ces
éléments apprenaient aux enfants à servir la famille, le
clan et la communauté.
B. La création des 1ères
écoles.
La 1ère école de type occidental est
apparue en 1878. Celle-ci avait été installée par les
protestants suivies de deux écoles catholiques en 1880. Pendant
plusieurs décennies, cette école occidentale provoque la
méfiance des populations locales, tandis que la diversité des
langues locales, la pénurie du personnel enseignant (les missionnaires
étant peu nombreux) et le nombre insuffisant de livres scolaires rend
son développement difficile. Il a fallut attendre la fin de la
deuxième guerre mondiale pour voir les choses évoluées.
Ainsi, le taux de scolarisation était passé de
12 à 37% entre le début des années 1930 et le début
des années 1950. Fin 1959, à la veille de l'indépendance,
le taux de scolarisation primaire atteint 59%, avec un taux d'accroissement de
6 à 10%, ce qui permit un taux relativement élevé
d'alphabétisation. Mais l'enseignement universitaire est quasi- absent,
avec moins de 1000 étudiants universitaires présents au Congo au
moment de l'indépendance.84
C. Le système éducatif post- colonial.
Après l'indépendance, plusieurs programmes
ambitieux sont définis au cours des années 1960. En deux
décennies, le Congolais forme une élite intellectuelle
conséquente. Au début des années 1980, si la scolarisation
universelle n'est pas encore de mise, surtout pour les filles et dans le
secondaire, le Congo-Zaïre a su mettre en place un système
éducatif propre allant de l'école primaire à
l'université, avec le quart du budget de l'Etat affecté à
cette tâche.
Cela répondait à l'engagement des Etats contenu
dans l'art. 14 du PIDESC qui dispose : « Tout Etat partie au
présent Pacte qui, au moment où il devient partie, n'a pas encore
pu assurer dans sa métropole ou dans les territoires placés sous
sa juridiction le caractère obligatoire et la gratuité de l'
enseignement primaire s'engage à établir et à adopter,
dans un délai de deux ans, un plan détaillé des mesures
nécessaires pour réaliser progressivement, dans un nombre
d'année fixé par ce plan, la pleine application du principe de
l'enseignement obligatoire et gratuit pour tous ».
Malheureusement, les deux décennies suivantes vont
s'avérer catastrophiques pour le système éducatif
congolais. La crise économique déclanchée à partir
de la fin des années 1983, l'austérité budgétaire
imposée par les programmes d'ajustement structurel, les pillages et les
guerres des années 1990, ainsi que la démographie vont
détruire, sur tous les plans, la majeure partie de ce qui avait
été construit jusque là.
Ainsi, de 26% en 1982, la part du budget dans l'éducation
passe à 7% en 1986, principalement suite à la baisse des salaires
des enseignants. Les statistiques durant les
84M. EKWA, « L'école Trahie »,
cité par CWBCI, op.cit., P.40.
années1990 sont peu fiables, mais la Banque Mondiale
estime que le niveau est resté similaire ; ceci
jusqu'aujourd'hui.85
Martin EKWA, quant à lui, estime que moins de 1% du faible
budget de l'Etat a été affecté à l'éducation
du début des années 1990 au début des années
2000.86
Quoi qu'il en soit, la Banque Mondiale calcule que les
dépenses courantes réelles en 2002 n'atteignaient pas 4% de leur
niveau de 1980 pour le primaire et le secondaire moins de 3% pour le
supérieur.87 La comparaison est encore plus dramatique si on
prend en considération le niveau des dépenses par
élève : En 2002, elles représentaient 3,7% du niveau de
1980 pour le primaire et le secondaire et moins de 1% pour le supérieur.
En 2005, le budget de l'éducation ne dépassait pas 7,5% du budget
total de l'Etat.
En réalité, une double courbe contradictoire a
accéléré le déclin du système
éducatif congolais : il s'agit de la hausse de la démographie et
la baisse du budget de l'éducation.
La répartition des dépenses d'éducation
quant à elle, selon les niveaux secondaires est de 36% au primaire (soit
moins de 3 dollars par élève et par an), 32% au secondaire, 1%
à l'administration et 31% au supérieur.
Le tableau qui suit nous instruit davantage sur le budget de
l'éducation et le taux brut de scolarisation en RDC.88
|
Budget de l'éducation en RDC
|
|
Année
|
1980
|
1983
|
1986
|
2000
|
2002
|
Part du budget
|
24%
|
17%
|
7%
|
8%
|
6%
|
Taux de scolarisation en RDC
85 Banque mondiale, Le renouveau du système
éducatif de la RDC : priorités et alternatives, janvier 2005, pp.
99 et 124
86 2. M. EKWA, « L'Ecole trahie »
cité par le CWBCI, op.cit, p. 40
87 3. Nous soulignons que la Banque Mondiale ne prend
en compte, pour les années de guerre, que des données pour les
sept provinces sous contrôle gouvernemental.
88 4. Banque Mondiale, Idem.
Année
|
60-61
|
66-67
|
71-72
|
76-77
|
82-83
|
86-87
|
89-90
|
94-95
|
99-00
|
01-02
|
Primaire
|
70%
|
74%
|
92%
|
88%
|
86%
|
73%
|
55%
|
73%
|
49%
|
64%
|
Les tableaux ci-contre démontrent que le taux de
scolarisation n'a évidemment pas pu évoluer positivement dans des
telles conditions. Le taux brut de scolarisation primaire est passé de
86% en 1982-1983 à 55% en 1989-1990, puis à 49% en 1999-2000,
pour atteindre 64% selon les dernières statistiques disponibles.
Pour comprendre la grande difficulté qui a entravé
le système éducatif congolais jusqu'à nos jours, il sied
d'interroger le contexte socio-politique du pays.
§2. Le contexte socio-politique.
Le Congo-Zaire a été émaillé par
multiples « chocs » allant de la colonisation à la dictature,
en passant par la crise économique, l'ajustement structurel, les
pillages et les guerres. Cette réalité n'a pas
empêché le pays de mettre sur pied, progressivement durant les
deux premières décennies de son indépendance, un
système éducatif propre allant de l'école primaire
à l'université.
Le présent paragraphe passe en revue la période
post-coloniale jusqu'en 1990, période pendant laquelle le système
éducatif se maintenait sans beaucoup de difficultés (A), et
atterrit sur celle d'après 1990 à nos jours.
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