Le blanchiment de capitaux en droit ivoirien( Télécharger le fichier original )par Sono SIL Université Charles Louis de Montesquieu, Côte d'Ivoire - Licence III 0000 |
Paragraphe I : La justification mensongère par tout moyenCette justification doit prendre la forme d'un acte positif et non pas d'une omission. Ici sont visées les différentes techniques utilisées aux différentes étapes du blanchiment d'argent. Il s'agit de : la conversion, le transfert, la manipulation, la dissimilation, le déguisement, l'acquisition, la détention et l'utilisation : « de biens dont l'auteur sait au moment de la réception des dits biens, qu'ils proviennent d'un crime ou d'un délit ». Dans la pratique, ces agissements pourraient se traduire par le fait de : - Fractionner le butin d'une activité illicite en de petits dépôts bancaires pour en effacer les traces ; - déclarer l'argent sale comme le gain d'un jeu ; - acheter des objets de luxe avec l'argent sale pour le faire disparaître ; - mélanger l'argent sale aux recettes d'un commerce licite ; - rédiger de fausses factures ; - faire disparaître l'argent sale en le transportant à l'étranger en espèce ou par virement électronique ; - mettre des oeuvres d'art aux enchères et les faire acheter par un complice avec l'argent sale ; - rater volontairement un envoi à l'étranger ; - faire un « hawala ». C'est un système de transfert de fonds informel, basé sur la confiance, existe au sein de communautés très soudées. Le criminel confie l'argent à une Hawaladar qui transmet un code d'identification à un autre Hawaladar, dans un autre pays. Muni du code, un complice dans ce pays peut alors récupérer l'argent. - utiliser les services d'une compagnie d'assurance en souscrivant des contrats d'assurance-vie avec des primes très élevés et les faire annuler plus tard pour toucher que la moitié. - Faire transiter l'argent sale de compte en compte dans les paradis fiscaux afin de brouiller les pistes en cas d'ouverture d'une enquête. - Les salles de jeux et les services sur Internet aussi des possibilités de blanchiment. Un blanchisseur d'argent sale peut créer, par exemple, un casino en ligne. Il ouvre un compte bancaire pour cette nouvelle société. Ses complices jouent l'argent sale au casino et, comme par hasard, perdent au jeu. Cette technique de blanchiment peut être mise en oeuvre dans les vrais casinos. - Utiliser les marchés boursiers - Un courtier complaisant accepte l'argent sale, l'utilise pour acheter des actions pour ensuite les revendre. - Utiliser les paradis fiscaux - Des montages financiers complexes impliquant des entreprises fictives établies notamment dans des paradis fiscaux permettent d'effectuer de multiples transferts d'argent dans le plus grand anonymat et ainsi masquer l'origine des fonds. Si ces actes sont constitutifs de l'infraction de blanchiment d'argent, il faut souligner que leur mis en oeuvre demande le concours d'autres personnes. Paragraphe II : Les actes de complicité assimilés aux éléments constitutifs de l'infraction Selon la loi n°2005-554 du 02 décembre 2005 relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux : « constitue également une infraction de blanchiment de capitaux, l'entente ou participation à une association en vue de la commission d'un fait constitutif de blanchiment de capitaux, l'association pour commettre ledit fait, les tentatives de le perpétrer, l'aide, en vue de l'exécuter ou d'en faciliter l'exécution »11(*). Cette disposition fait des actes de complicité des éléments constitutifs de l'infraction.
Par ailleurs, « il y a blanchiment de capitaux même : - Si l'auteur des crimes ou délits n'a été ni poursuivi ni condamné, - S'il manque de condition pour agir en justice à la suite desdits crimes ou délits »12(*). Au regard de cet article, la complicité est établie dès lors qu'il y a contact avec les capitaux d'origine criminelle en vue de les blanchir. Si le juge ne parvient pas à établir ce fait, il devra retenir le recel. Aucun exemple n'étant disponible dans la jurisprudence ivoirienne, en France par contre dans l'affaire « W. Krup » jugée le 18 mai 1999, le tribunal a tranché dans ce sens. Ce jugement a été confirmé par la Cour d'appel de Besançon, mais aucun arrêt de la Cour de cassation n'a été rendu. Dans l'hypothèse où il est établi que le complice a apporté son concours à une opération de blanchiment, comment se s'apprécie t-il ? L'apport d'un concours peut se faire à n'importe quelle étape de l'opération de blanchiment. Ainsi, il n'est pas nécessaire que la personne poursuivie ait participé à l'entier processus. Il suffit d'avoir apporté son concours à une des ces opérations. A titre d'exemple, il y a blanchiment dans le fait d'ouvrir un compte bancaire au nom d'une personne qui n'existe pas pour y verser des fonds provenant d'une infraction ; ou encore de servir de prête nom dans une opération. Par ailleurs, ce concours peut être le fait d'un spécialiste des questions financières tel un banquier; un agent de change ou un notaire. Ainsi, peut être condamné un notaire qui établit un acte authentique de vente d'appartement dont le prix seraa payé avec des fonds provenant d'une infraction13(*) . Dès lors que la preuve de l'illicéité de l'origine des fonds et des actes constitutifs du blanchiment est rapportée, l'autorité de poursuite est amenée à s'interroger sur l'élément moral de l'infraction. * 11 Article 11. * 12 Article 3 alinéa 2 * 13 Crim 7 décembre 1995, Bull n0 372 |
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