Les biens des collectivités locales et la décentralisation( Télécharger le fichier original )par Siham RHOUALEM Université Mohammed V faculté des sciences juridiques et sociales salé - Master 2010 |
Section 2 : L'archaïque gestion du patrimoine des Collectivités locales :La prospérité économique des territoires et leurs autonomie est étroitement liée à la bonne gestion du patrimoine des collectivités locales. Par une meilleure gestion de leur patrimoine les pouvoirs décentralisés peuvent se procurer des revenus supplémentaires mais aussi accroître la richesse économique de leurs territoires. En effet, la gestion du patrimoine des collectivités locales peut être considérée comme un indice qui révèle la bonne ou au contraire la mauvaise gestion de l'économie locale en général. L'étude du patrimoine des collectivités locales nous enseigne l'existence d'un véritable problème de gestion plutôt qu'une insuffisance des biens. Si la plupart des collectivités locales disposent, en effet, de nombreux biens propres, leur gestion dévoile par ailleurs une véritable crise de conception. Outre la question déjà évoquée liée à la désuétude de la législation en vigueur, persiste le délicat problème de l'administration des biens locaux. Au sein d'une collectivité locale, le pouvoir de gestion des biens est partagé entre l'assemblée délibérante et le pouvoir exécutif. En effectuant ce partage, la législation marocaine a consacré la prédominance de l'organe délibérant. Ce dernier est compétent pour les décisions les plus importantes (acquisition, aliénation ou baux relatifs au domaine privé...) alors que les décision courantes relèvent de la compétence de l'exécutif (le président et le bureau).57(*)
Géré dans un cadre dépassé, le patrimoine des collectivités locales est incapable de générer de véritables ressources. La plupart des communes possèdent de vastes terrains sous exploités ou entièrement inexploités. La grande partie des biens est louée à des prix dérisoire, vu les procédures désuètes, ce qui nécessite de réel réforme58(*). Pire encore l'absence d'une gestion rationnelle fait que la majorité des collectivités locales ne connaît pas avec précision la valeur de leur patrimoine. « Le sommier de consistance des biens communaux » n'intègre pas souvent la totalité des biens dont dispose les collectivités locales. C'est dire que le patrimoine des collectivités locales, en tant que ressource inestimable, n'a pas encore retenu grand intérêt de la part des pouvoirs décentralisés. En principe, la gestion des biens privés est guidée par un souci de rentabilité. Il en découle le rôle très important de cette ressource. A la différence du domaine public affecté essentiellement à une mission d'intérêt général, le domaine privé comporte une fonction financière. Il offre de la sorte aux collectivités locales l'opportunité d'exercer leurs prérogatives de propriétaires en vue de favoriser le développement économique. Puisque la logique de détention d'un patrimoine privé est celle de sa liberté de gestion, il est, par essence, générateur d'autonomie pour les collectivités locales. Certains le préconisent comme paramètre permettant de mesurer le degré de l autonomie financière des pouvoirs décentralisés. Placée sous sa gestion au même titre qu'un propriétaire ordinaire, la collectivité locale peut l'utiliser comme élément générateur de ressources importantes. Au Maroc ce principe est mal mis en oeuvre. Les limites imposées à l'autonomie des collectivités se sont traduites en effet par une très faible rentabilité du domaine privé. Un exemple nous permettra d'affirmer cette idée : Les collectivités locales conservent, en effet, la possibilité d'échanger leurs biens privés avec d'autre personnes publiques ou privées. Ce qui leur permet de rechercher à augmenter leurs ressources en fonction de leurs politiques propres. Les biens privés improductifs peuvent être échangés contre d'autre passibles de générer des ressources pour les finances locales. Toutefois, les biens dont la valeur dépasse certaines sommes ne peuvent faire objet d'aucun échange ou acquisition sans un décret du Premier ministre. Cette logique de domination qui caractérise le mécanisme de tutelle, ajouté à la longueur des procédures de sa mise en oeuvre, se traduit par nue limitation sérieuse du pouvoir d'initiative des collectivités locales. La faible rentabilité du domaine privé des collectivités locales est souvent la conséquence de cette ingérence. La gestion des biens privés dans une perspective de développement ainsi qu'une préoccupation de rentabilité devrait intégrer le processus de décentralisation. Les contraintes économiques imposent de gérer convenablement le domaine au lieu de l'administrer en bon père de famille. Il est à remarquer que la rentabilisation du domaine privé des collectivités locales est souvent une question de conduite. Elle ne nécessite pas des moyens importants. Il est plutôt tributaire d un changement de mentalité ainsi qu'une sensibilisation des élus locaux. Les responsabilités confiées à la commune depuis 1976 exigent de la part des élus locaux un certain niveau de formation, une qualification, de la disponibilité et surtout un sens élevé du devoir. Or, il se trouve que l'élite locale est dans une grande proportion illettrée59(*). La passivité des pouvoirs décentralisés se traduit par une préconisation des solutions de l'attachement au financement à travers la fiscalité, jugée assez sure, explique leur manque d'imagination. La rentabilisation du domaine privé peut s'effectuer par deux moyens : Il s'agit, en effet, soit de son aliénation, soit de son exploitation. Dans la perspective de développer les ressources des collectivités locales, nous préconisons plutôt son exploitation. Il en est ainsi des beaux qui présentent l'utilité de générer des ressources régulières et durables. Sa rentabilisation passe par l'implantation d'activités industrielles ou commerciales gérées dans le cadre public ou celui de l'économie mixte. En France une loi du 5 janvier 1988 dans son article 13 a autorisé les collectivités locales à conclure des beaux emphytéotiques de longue durée sur leur domaine public ou privé pour attirer des investisseurs sur leurs biens. Ces beaux offrent des garanties aux occupants en particulier la cessibilité du titre d'occupation. Des formules juridiques de valorisation existent donc. A dire vrai, la rentabilisation du patrimoine des collectivités locales n'est pas spécifique aux biens à caractères privés. Le domaine public peut être considérer lui aussi comme une origine précieuse de ressources. Il en est ainsi des occupations privatives en vertu desquelles l'organe gestionnaire d'une infrastructure soustraite à l'usage commun verse une redevance à la collectivité concernée en contre partie du profit qu'il tire de l'installation. Le stationnement payant est un exemple très intéressant mais aussi et surtout les activités industrielles et commerciale qui s'implantent sur le domaine public portuaire, aéroportuaire ou ferroviaire. La situation au Maroc montre encore certaines réticences.60(*) * 57 Tarik Zair op, cit, p325 * 58 Discussion du projet de loi 47-06 Rémald n 184, collection « textes et document », première édition 2008, pages : 30 * 59 Nabil Zahra : Le domaine Communal, consistance et gestion. Mémoire du cycle supérieur En 1987.Page :158 * 60 Tarik Zair, op, cit, p 327,328, 329. |
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