Partie 2- La concrétisation par les fonds
structurels de l'action communautaire
Il convient maintenant d'analyser le mécanisme
d'intervention en région des fonds structurels (Section 1), avant de
l'étudier de manière plus concrète, par le biais du cas
français (Section 2).
Section 1 - Le mécanisme d'intervention des
fonds structurels
« Les objectifs des fonds sont poursuivis dans le cadre
d'une programmation pluriannuelle effectuée en plusieurs étapes,
portant sur l'identification des priorités, le financement et le
système de gestion et de contrôle », selon l'article 10
du règlement cadre du 11 juillet 2006. Se dégage de cet article
deux grandes phases de mise en oeuvre des fonds structurels qui, d'ailleurs, ne
se succèdent pas, puisque étant interdépendantes. La
première est de manière globale le principe de programmation et
sa détermination (I). La seconde concerne sa mise en oeuvre (II).
I- La détermination du principe de programmation
Le principe de programmation est le principe majeur quant
à la concrétisation, par les fonds structurels, de l'action
communautaire. Pour l'appréhender, il faut traiter tout d'abord du
principe de complémentarité (A), puis analyser la programmation
proprement dite (B), avant de dégager le principe de
proportionnalité (C).
A- La complémentarité
L'article 9 du règlement cadre n° 1083/2006
énonce que « Les Fonds interviennent en complément des
actions nationales, y compris les actions au niveau régional et local,
en y intégrant les priorités de la Communauté ».
Complémentarité signifie par là même une initiative
prise au niveau national d'aider un projet. Une aide communautaire ne peut se
substituer à une aide nationale, ni exister sans que celle-ci n'existe
également. L'aide communautaire doit y apporter un plus, une valeur
ajoutée, c'est-à-dire les priorités de la
Communauté. Cette complémentarité est anticipée par
les élus qui élaborent les projets en tenant compte de la
possibilité ou non de bénéficier d'une aide
communautaire.
Application du principe de subsidiarité
évoqué précédemment, « la Commission et
les
États membres, dans le respect de leurs compétences
respectives, veillent à ce que 60 % des dépenses pour l'objectif
convergence et 75 % des dépenses pour l'objectif
compétitivité régionale et emploi (...) soient
dévolus aux priorités visées ci-dessus ». Cela
concerne les pays de l'Europe des 15 et non de l'élargissement,
ceux-là ayant un régime de faveur puisqu'ils ne sont soumis
à aucun pourcentage. La notion
d' « earmarking », c'est-à-dire
« l'écoute du marché », a été
défendue par la Commission. Il s'agit de l'obligation pour les
régions de réserver une part importante des fonds structurels
à des investissements servant la stratégie de Lisbonne. Au moins
20% doit être utilisé pour l'investissement dans la recherche et
développement et l'innovation en ce sens. Toutes les priorités
sont celles énumérées pour chaque fonds et chaque
objectif. Elles sont rassemblées dans une annexe IV du règlement
cadre et intègrent, donc, les priorités de Lisbonne. Selon le
même article, « cette cohérence et cette
complémentarité apparaissent notamment dans les orientations
stratégiques de la Communauté pour la cohésion, dans le
cadre de référence stratégique national et dans les
programmes opérationnels ». La complémentarité
conduit à la recherche d'une simultanéité entre un cadre
communautaire, national et régional, dans la mise en oeuvre en
région des fonds structurels. Les orientations stratégiques et le
cadre de référence stratégique national sont une
manifestation de la complémentarité, mais pas les seules. Il
existe aussi d'autres interactions que nous analyserons plus tard.
Les orientations stratégiques sont inscrites aux articles
25 et 26 du règlement. C'est au Conseil qu'il revient de les
négocier, « définissant un cadre indicatif pour
l'intervention des fonds ». C'est en effet à cette institution
qu'il revient de coordonner les politiques économiques des Etats
membres, et d'en dégager un intérêt communautaire commun.
Ce sera ensuite à la Commission d'édicter dans un document
administratif les orientations, publié au journal officiel de l'Union.
Ce document est adopté selon la procédure de l'article 161 du
traité. Le Conseil statue à l'unanimité après un
avis conforme du Parlement, et après une consultation du Comité
des régions et du Conseil économique et social. Des
révisions à mi-parcours sont possibles si la Communauté
décide de réorienter ses priorités, mais cela «
n'entraîne aucune obligation pour les États membres de
réviser soit les programmes opérationnels, soit leur cadre de
référence stratégique national ». Les
orientations stratégiques ont étés adoptés en 2006,
dans la décision du Conseil 2006/702/CE « relative aux
orientations stratégiques communautaires en matière de
cohésion ». Cette décision relève trois grandes
priorités, à savoir « améliorer l'attrait des
États membres, des régions et des villes en améliorant
l'accessibilité, en garantissant une qualité et un niveau de
services adéquats, et en préservant
l'environnement » ; « encourager l'innovation,
l'esprit d'entreprise et la croissance de l'économie de la connaissance
en favorisant la recherche et l'innovation, y compris les nouvelles
technologies de l'information et de la communication », et enfin
« créer des emplois plus nombreux et de meilleure
qualité en attirant un plus grand nombre de personnes sur le
marché du travail ou vers la création d'entreprises, en
améliorant la capacité d'adaptation des travailleurs et des
entreprises, et en augmentant l'investissement dans le capital
humain ». La réglementation communautaire définit le
cadre juridique, pendant que les orientations stratégiques
définissent les priorités politiques sur les investissements
à réaliser.
Le cadre de référence stratégique national
se substitue aux cadres communautaires d'appui des programmations
précédentes. Il est cependant un peu différent, moins
ancré dans la gestion des fonds, plus dans la détermination des
priorités communautaires. Il est prévu aux articles 27 et 28 du
règlement. Il s'agit d'«un instrument de référence
pour préparer la programmation des fonds ». Il s'applique sur
les objectifs de convergence et de compétitivité, mais un Etat
membre peut décider de l'adjoindre à l'objectif de
coopération territoriale. Ce document, créé par l'Etat,
fait application dans son élaboration du principe de partenariat. Il est
établi, article 28, en collaboration avec la Commission,
« afin d'assurer une approche commune ». Il doit être
transmis à la Commission dans les cinq mois qui suivent la
décision qui détermine les orientations stratégiques.
L'institution communautaire va ensuite faire des observations ou non. Le
contenu du document est déterminé à l'article 27. Il
contient notamment une analyse des disparités et du potentiel de
développement des territoires, la stratégie retenue et
divisé en priorités thématiques et territoriales pour
répondre à cette analyse, la liste des programmes
opérationnels, l'adéquation des dépenses avec la
stratégie de Lisbonne, l'allocation annuelle de chaque fond à
chaque programme. En outre, pour l'objectif de convergence, la coordination
avec le Feader (fonds européen agricole pour le développement
rural, rattaché à la PAC) et avec le Fep (fonds européen
pour la pêche, rattaché à la politique communautaire de la
pêche) ; ainsi que les moyens d'exercer le contrôle ex ante du
principe d'additionnalité, de même que les actions prévues
pour renforcer l'efficacité administrative. A partir de ce document,
l'action administrative communautaire par le biais des fonds structurels peut
se mettre en place, tout en respectant le principe d'additionnalité.
|