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L'Obligation Essentielle dans le contrat

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par Alima Sanogo
Université de Bourgogne - Master II Recherche Droit des Marchés,des Affaires et de l'Economie 2005
  

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PARAGRAPHE I : EXPOSE

1) L'obligation essentielle par nature

Sur un plan formel, il est très facile de distinguer l'obligation essentielle des autres types d'obligations contenues dans le contrat, notamment des obligations secondaires, car parfois l'obligation essentielle donne son nom au contrat. Il en est ainsi du contrat d'entretien. Dans la pratique les choses sont toutes autres, dans la mesure où les parties peuvent porter des clauses et sur l'obligation essentielle et sur l'obligation secondaire. La jurisprudence essayant d'établir une distinction théorique entre les obligations fondamentale et secondaire a, par la même occasion dressé une liste d'obligations essentielles en fonction des contrats. Par exemple dans le contrat de vente l'obligation essentielle du vendeur est la délivrance de la chose, c'est-à-dire la mise à la disposition de l'acheteur de la chose vendue. Cela a été entériné par H. BATTIFFOL en ces termes « la délivrance est l'essence de la vente ; elle ne peut être que différée dans son exécution et l'on ne conçoit pas un acheteur qui renoncerait définitivement à l'usage de la chose ... La délivrance est l'acte spécifique de la vente par lequel le contrat va se manifester ».

M. DELEBECQUE a illustré ce propos par une décision de 1977 de la Cour d'appel d'Aix. Il y était question d'un garagiste belge récupérant des véhicules interdits dans ce pays, les acheminant avec les pièces nécessaires à un cocontractant en France, qui les réparait et les commercialisait. Le contrat s'exécute ainsi pendant un bon moment jusqu'au jour ou le garagiste envoie un véhicule irrécupérable, plus « pourri » que les précédents. Son cocontractant le refuse. Une expertise est initiée. Il s'est avéré que le véhicule litigieux n'aurait pas pu être remis en circulation qu'après des réparations trop importantes pour un véhicule vieux de dix ans. La Cour d'Aix a accepté la prétention du cocontractant français en relevant que celui-ci «auquel il ne peut être reproché de revenir à une saine conception commerciale, refuse à bon droit de régler le prix d'un véhicule qui lui a été envoyé si ce véhicule est insusceptible d'être remis en état ».Ce raisonnement de la Cour d'appel d'Aix implique selon M.DELEBECQUE «que le véhicule a perdu sa destination qui est de circuler » et que « le vendeur de véhicule a pour obligation fondamentale de livrer un engin apte a rouler, obligation dont le vendeur ne pourrait s'exonérer » .

Beaucoup d'autres décisions considèrent que l'obligation de délivrance est l'obligation essentielle du contrat de vente. Ainsi, si l'article 1603 du Code civil met à la charge du vendeur deux obligations principales, à savoir celle de délivrer et celle de garantir la chose vendue, c'est à la condition de considérer la garantie comme corollaire de la délivrance. Seule cette dernière est essentielle, c'est pourquoi les parties ne peuvent, ni l'écarter, ni en donner une exception écartant les critères légaux.

Dans le contrat de bail, il existe une ambiguïté à propos de la détermination de l'obligation essentielle. Cette ambiguïté résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation qui admet expressément que le bailleur n'est pas obligé de permettre la jouissance paisible à son locataire. Une décision de 1945 a relevé que «l'obligation pour le bailleur de faire jouir paisiblement le preneur de la chose louée pendant la durée du bail n'est pas de l'essence du contrat de louage. En réaction à cette jurisprudence, un auteur a précisé que lorsque la Cour de cassation déclare que « l'obligation de faire jouir n'est pas de l'essence du contrat», elle ne vise là que l'engagement global de l'article 1709 du Code civil et non la prestation de jouissance de l'article 1719 alinéa 3.

En définitive, l'obligation pour le bailleur d'assurer la jouissance au preneur est l'obligation essentielle du contrat de bail . Cette même remarque semble convenir à tout contrat de louage ; c'est ainsi qu'il fut établi à propos de la location d'un système d'alarme que l'obligation fondamentale, donc essentielle, est celle de « mettre à la disposition du client un système en état de marche et propre à rendre les services qu'un tel système laisse supposer ».

Toutefois dans le contrat de location de wagons, la détermination de l'obligation essentielle semble fort délicate car il faut distinguer selon la nature du wagon en question . Si celui est isotherme, c'est-à-dire insensible aux variations de température, l'obligation fondamentale ou essentielle du loueur est de mettre à la disposition de l'usager un wagon apte à l'isolation.

Si le wagon est isotherme mais non pourvu d'une installation produisant le froid, aménagée pour maintenir la glace, l'obligation essentielle du loueur est de fournir un wagon non seulement apte à l'isolation mais aussi équipé de telle sorte qu'il puisse recevoir et maintenir la glace.

Dans le contrat d'affrètement, l'obligation essentielle du fréteur est de mettre à la disposition de l'affréteur, son cocontractant, un navire en bon état de navigabilité, c'est-à-dire présentant un ensemble de qualités relatives tant à la navigabilité qu'à la préparation du voyage, qu'à la structure ou au fonctionnement des cales, des ponts, des aménagements concernant la marchandise.

On ne saurait clore cette partie sur les exemples d'obligation essentielle sans parler de l'obligation de bonne foi que le juge impose à toute relation contractuelle et même extra contractuelle. A ce titre, on peut retenir, non pas sans réserve, que l'obligation de bonne foi est une obligation essentielle dans toute convention. Mais la question qui se pose est de savoir si cette obligation résulte ou de la nature du contrat ou de la volonté des parties.

Pour répondre à cette question on peut dire que les parties, en concluant, ont par là même entériné implicitement la bonne foi comme obligation essentielle. Et cette bonne foi semble inhérente à la notion même du contrat en général.

A côté de ces exemples d'obligations essentielles, on peut opposer quelques exemples d'obligations accessoires. L'obligation accessoire, annexe ou secondaire, est une obligation nécessaire au contrat mais insuffisante pour entraîner la nullité de celui-ci. C'est le siège des clauses afférentes à la responsabilité. L'obligation accessoire est très souvent relative car elle peut être essentielle dans un contrat et accessoire dans l'autre. Par exemple, l'obligation de surveillance est accessoire dans le contrat de parking. Cette même obligation devient essentielle dans le contrat de gardiennage. De même l'obligation d'entretien est annexe dans le contrat de parking et essentielle dans le contrat de garage.

Il y a des obligations qui sont accessoires par nature. Tel est le cas de l'obligation de garantie des vices cachés ou des vices apparents (article 1642 du Code civil). C'est cette obligation de vices apparents qu'on retrouve dans le contrat de bail sous le nom d'obligation de délivrer le logement en bon état. Logiquement, celle-ci n'a rien d'essentiel. C'est le même cas pour l'obligation d'entretien en cours de bail au sujet duquel la Cour de cassation a relevé que « si le bailleur est tenu en principe d'entretenir la chose louée.... Il ne lui est nullement interdit de s'affranchir contractuellement de cette obligation ».

D'autres obligations accessoires sont apparues récemment. Entre autres on peut citer l'obligation de conseil (banquiers, notaires, architectes, médecins et assureurs) ; l'obligation de coopération dans le domaine informatique ; l'obligation de sécurité (pour le transport de personnes , des produits défectueux ) ; l'obligation de mise en garde face à un risque ; l'obligation d'efficacité des agences de voyage ; l'obligation de prudence (pour les agences d'intérim, auto-école , colonies de vacances etc.). Toutes ces obligations accessoires peuvent, selon les circonstances ou selon la nature du contrat, se transformer en obligations essentielles.

Le manquement à une obligation accessoire n'a pas d'effets sur la validité du contrat sauf si ce manquement empiète sur une obligation essentielle. Cela confirme ce que nous avons déjà constaté, à savoir que les obligations essentielle et accessoire tendent à se confondre ; tout dépend de la volonté des parties.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci