Paragraphe 2 L'obligation de souscription d'assurance pour
les passagers
L'article 472 du code de la marine marchande dispose que :
«tout armateur de navire à passagers est tenu de souscrire une
police d'assurance pour les passagers ». Il s'agit ainsi d'une autre
garantie offerte aux passagers pour leur sécurité. D'abord en ce
que les assureurs n'acceptent de couvrir les risques de mer que si le navire
présente un degré minimum de sûreté, ce qui oblige
les exploitants des navires à se conformer tant soit peu à la
réglementation en matière de sécurité ; aussi
l'assurance souscrite pour le passager lui permet de voir son préjudice
peu ou prou réparé en cas de réalisation du risque
couvert. Il est nécessaire d'identifier le débiteur de cette
obligation de souscription d'assurance (A) ainsi que les caractères de
cette assurance souscrite (B).
IL. Le débiteur de l'obligation de
souscription d'assurance
Dans tous les cas l'obligation de souscription d'assurance
pour les passagers pèse sur l'armateur. Celui-ci, aux termes de
l'article premier de la loi portant code de la marine marchande, désigne
toute personne physique ou morale pour le compte de laquelle un navire est
armé, exploité ou simplement utilisé. Les
propriétaires ou copropriétaires d'un navire sont
présumés en être l'armateur ; en cas d'affrètement
(contrat par lequel le fréteur s'engage moyennant le paiement d'un
certain fret, à mettre à la disposition de l'affréteur un
navire en bon état de navigabilité), l'affréteur devient
l'armateur du navire si le contrat d'affrètement le prévoit et a
été régulièrement publié. Une fois le
débiteur de l'obligation de souscription d'assurance identifié,
il convient de préciser les caractères de l'assurance
souscrite.
B. Les caractères de l'assurance
souscrite par l'armateur.
Au Sénégal, depuis le mois de février
1983, une disposition législative exige que tous les navires battant
pavillon sénégalais soient assurés auprès d'une
compagnie d'assurance sénégalaise63.Et cette loi est
une disposition de police, ce qui la rend d'exécution obligatoire sans
aucune possibilité de s'y soustraire pour tout armateur. Tel
était le cas de l'Etat du Sénégal qui, dans l'exploitation
du ferry Le joola, n'a fait que se comporter en armateur et doit donc à
tout point de vue être soumis au droit commun des transports
maritimes64. Il est aussi aberrant de penser, comme certains ont eu
à le faire au moment des faits qui ont succédé au
naufrage, que l'assurance du navire était souscrite auprès de
l'agent judiciaire de l'Etat. Celui-ci n'est chargé que de la
défense des intérêts pécuniaires de l'Etat devant
les tribunaux. L'armateur est libre de souscrire, en plus de l'assurance
obligatoire, d'autres polices d'assurance pour se prémunir des risques.
Il faut noter qu'en matière maritime on assiste souvent à une
coassurance. C'est que les assurances en matière maritime sont si
exorbitantes qu'une compagnie d'assurance sérieuse n'accepterait pas de
couvrir seule les risques maritimes tant les sommes en jeu sont faramineuses.
C'est ainsi qu'en cette matière les compagnies optent presque toujours
pour la coassurance et n'hésitent pas à se réfugier
derrière la réassurance.
Le bénéficiaire de l'assurance est le passager,
et celui-ci verra son risque couvert jusqu'à un certain seuil. C'est une
garantie lui permettant de se prémunir contre l'insolvabilité du
transporteur si le risque venait à se réaliser. Le code de la
marine marchande, pour la fixation du taux de l'indemnité, renvoie aux
dispositions des conventions internationales. Même si le
Sénégal n'a pas ratifié la convention de Londres de 1974
qui règlemente les régimes de responsabilités et les
indemnités en cas d'accident dans le transport maritime, celle-ci garde
une grande possibilité d'applicabilité65.
En gros, le passager bénéficie d'une assez
grande protection tant sur le plan juridique que technique, mais il est assez
surréaliste de penser que dès lors que
63 L'épineuse question de l'assurance du navire
Le joola, par le professeur Ibrahima Khalil DIALLO, in Africajuris n°70 du
03 au 09 juillet 2003, p.10.
64 Ibid, ibidem.
65 Telle est la pensée du professeur Ibrahima
Khalil Diallo.
l'obligation de sécurité est établie,
elle sera exécutée. Il faut alors envisager la prise en charge du
manquement de cette obligation pour augmenter les chances du passager
d'être couvert, même si cette couverture n'intervient dans ce cas
qu'a posteriori. C'est d'ailleurs l'esprit du vieil adage qui dit mieux vaut
tard que jamais.
|