Section2 : Les garanties de la sécurité
du passager
Au nombre des garanties que l'on a pour la
sécurité on a d'une part l'exigence d'un degré
élevé de sécurité dans les navires qui permet de
prévenir la réalisation de plupart des menaces à la vie
des passagers et l'optimisation de la réaction si ces menaces venaient,
malgré tout, à se réaliser. Aussi dans ce dernier cas de
figure les compagnies d'assurances sont, le plus souvent, les seules à
même de prendre en charge les victimes. C'est ainsi que ces deux aspects
de la protection de la personne transportée ont vu leur
consécration en obligation pleine et entière pesant sur le
transporteur et ayant la qualité de condition sine qua none pour la
licéité de l'exploitation d'un navire et l'exercice de
l'activité de transport maritime de personnes. Le législateur
pose, à cet effet une obligation de conformité aux nomes de
sécurité d'une part (paragraphe 1) et une obligation de
souscription d'assurance (paragraphe 2) d'autre part.
Paragraphe 1 L'obligation de conformité aux normes
de sécurité
Le législateur sénégalais pose une
obligation générale de sécurité pesant sur tous les
navires. Aux termes de l'article 57 du code de la marine
marchande56, « tout navire qui entreprend la navigation en mer
doit être en bon état de navigabilité convenablement
armé, équipé et apte à l'emploi auquel il est
destiné ». La clarté de cette disposition est assez
édifiante. Elle implique la prise en charge des normes de
sécurité depuis la construction du navire et pendant toute la
durée de l'exploitation (A). Toutefois, cette conformité ne
saurait être laissée sans contrôle (B).
IL. la conformité aux normes de
sécurité depuis la construction du navire et pendant toute la
durée de l'exploitation
La navigation maritime est un privilège auquel n'ont
accès que les navires présentant un degré satisfaisant de
sécurité. L'article 58 de la loi 2002-22 ne dit pas autre chose
en disposant qu' : «un navire ne peut être utilisé dans la
navigation
56 il est fait allusion au code de 2002 qui a
abrogé celui de 1962.
maritime s'il ne remplit pas les conditions de
sécurité prescrites en ce qui concerne notamment :
- la construction, les agrès et apparaux, les
instruments et installation du bord, la signalisation, la prévention et
l'extinction des incendies, les moyens d'assèchement ainsi que
l'hygiène et l'habitabilité du bord ;
- la stabilité, la flottabilité et les lignes de
charge ;
- les organes de propulsion et de direction ;
- les effectifs et la qualification professionnelle des membres
de l'équipage ;
- toutes autres conditions requises en ce qui concerne la
sécurité de la navigation et le sauvetage de la vie humaine en
mer. » Il découle de ces dispositions que le respect et la
conformité aux normes de sécurité s'étend de la
construction à la durée entière de l'exploitation et
concerne tous les aspects du navire. et toute cette réglementation est
établie dans le but de garantir aux passagers une sécurité
implacable. Ces normes de sécurité sont complétées
par d'autres établies par voie règlementaire57 en plus
des normes établies par la loi elle-même ; mais force est de
constatée que ce domaine relève plus de la compétence des
organismes internationaux qui disposent de plus d'experts et donc sont plus en
mesure d'en déterminer les tenants et les aboutissants. C'est ainsi que
l'essentiel des normes de sécurité sont retrouvées dans le
code ISM et dans les normes ISO. C'est dire que la normalisation qui est un
concept de plus en plus en vogue n'a pas épargné le domaine de la
navigation maritime. Par exemple, il est très souhaitable, pour la
construction d'un navire de faire référence à la norme ISO
14001 qui est établie en cette matière. Cette norme exige, depuis
la conception du navire, la prise en compte de certains paramètres.
Ainsi l'architecture navale prend en compte beaucoup de considération et
de normes pour la définition de la forme du navire et de ses
caractéristiques. L'architecture navale prise dans le sens où le
définit Dominique Paulet privilégie le côté
conception avec le choix des matériaux, l'évaluation des
contraintes, des équilibres, des poids, le choix et la disposition des
équipements, plutôt que la forme et
57 Les articles 59 et 60 de la loi 2002-22
disposent respectivement que « les prescriptions relatives à la
sécurité de la navigation sont précisées par
arrêté du ministre chargé de la marine marchande, et que
« le ministère chargé de la marine marchande peut rendre
obligatoire les prescriptions techniques découlant du règlement
d'une société de classification agréée et relatives
à la construction, à l'armement et à l'équipement
des navires »
le style58. Le développement de la
technologie est, pour cela, mis à la disposition de la navigation. Et on
obtient aujourd'hui des navires plus grands, plus rapides, plus confortables et
présentant plus de garanties de sécurité59. La
conformité des navires en exploitation aux normes de
sécurité ne saurait être édictée sans la mise
en place d'un système de contrôle.
B. Le contrôle de la conformité des
navires aux normes de sécurité
Il est tout de même aberrant de croire que la simple
édiction de ces règles implique leur respect. Leur mise en oeuvre
suppose en effet la mise en place d'un certain nombre de mécanismes et
de structures qui veilleront, ou du moins auront pour vocation de veiller, sur
leur strict respect. Il s'agit à cet effet de mettre en oeuvre un
contrôle et il peut s'avérer pertinent de relever le rôle
joué en cela par les sociétés de classification et autres
autorités administratives nationales.
Le contrôle de la conformité des navires aux
normes de sécurité peut revêtir plusieurs formes et
intervenir de diverses manières en usant de moyens spéciaux. En
matière maritime pour éviter la réalisation des risques,
le législateur sénégalais a cru bon de poser comme
principe un contrôle a priori. Pour parvenir à l'efficacité
de ce contrôle il pose la nécessité d'une autorisation
d'exercice de la navigation maritime à travers l'exigence des titres de
navigation60. Ceux-ci, aux termes de l'article 32 du code de la
marine marchande, ont pour objet d'autoriser le navire à exercer la
navigation maritime à laquelle il est affecté, à condition
qu'il ait par ailleurs satisfait
58 Dominique Paulet, un des spécialistes
français de ce thème l'introduit ainsi dans son livre
Architecture Navale -- Connaissances et Pratiques
59 On trouve désormais sur les navires de
transport de passagers et de croisière un développement des
caractéristiques suivantes :
· Confort du passager avec plus d'habitabilité et de
confort à la mer, l'offre de service peut inclure : restaurant, bar,
solarium, espace jeux ... ;
· plus rapide et plus grand, mixte passagers et
marchandises. Par exemple, le navire de transport de passagers le plus rapide
est actuellement le " NGV Aliso " qui peut atteindre 38 noeuds et avec une
capacité de 566 passagers et de 600 voiture ; le " Napoléon
Bonaparte " peut transporter 2690 passagers et 708 de voitures ;
· engagement de la sécurité des passagers :
les normes ISO ; l'application des réglementations nationale et
internationale.
60 Le principe de l'exigence des titres de navigation est
posé par l'article 37 de la 2002-22 portant code de la marine
marchande.
à toutes les prescriptions contenues dans le
présent code et les textes pris pour son application. Pour
l'évaluation de la satisfaction aux exigences de sécurité
la loi prévoit divers types d'inspections qui s'échelonnent dans
le temps ; commencent à la construction du navire et s'étendent
à toute la durée de son exploitation. Ces inspections sont
régies par les articles 62 à 71 de la loi 2002-22 portant code de
la marine marchande. L'autorité maritime peut être soutenue dans
l'exercice de cette compétence par les sociétés de
classification agréées. En plus de ces inspections, l'article 48
prévoit la possibilité d'un contrôle des navires battant
pavillon sénégalais. L'efficacité de ces contrôles
est à rechercher dans la gamme de sanctions offerte à
l'autorité maritime, qui peut, entre autres, retenir le navire en cause
au port et lui interdire d'appareiller61.
Cependant l'effectivité de ces contrôles et des
sanctions prévues en cas de non respect de l'obligation de
conformité aux normes de sécurité et aux normes
d'exploitation en générale reste incertaine. Aujourd'hui on note
que des navires sous normes passent à travers les mailles du filet de la
législation nationale comme internationale et entretiennent une
concurrence déloyale et génératrice de sinistre maritime ;
et que, des états de Pavillon ont plus de considération pour le
revenu de leur registre que pour la qualité de la sécurité
des navires qu'ils immatriculent62. Et peu de gens se soucient
encore de la norme ISO 9014 intégrée sur le risque pour l'image
de marque de l'affréteur. Au niveau national, le comportement des
transporteurs du milieu maritime ne s'écarte pas de celui des
transporteurs des autres domaines et fait révérence à des
vices et avatars inacceptables tels que la surcharge de passagers, le non
respect des normes de sécurité, etc. ; sur cette question
n'importe quel exemple, dans le transport interne pourra nous édifier
mais celui du naufrage du joola est plus significatif. En effet l'absence de
réaction ferme de la part des autorités a fortement
contribué à l'accentuation des conséquences de ce
naufrage. Aussi la non conduite des inspections dans le respect des
règles ne favorise pas une bonne prise en charge de tous les aspects de
la sécurité des navires pour la protection de leurs passagers.
Toutefois, on pourrait fonder un timide espoir sur les
compagnies d'assurance qui pourraient jouer un rôle de régulateur
pour le respect des normes de sécurité. En
61 C'est le sens des articles 13 in fine, 14 in fine, 49, 61, 68
et 69 du code de la marine marchande.
62 « Sécurité en mer : tous
acteurs, tous coupables ! »
effet la souscription d'assurance est un préalable
à l'exercice d'une activité de transport maritime et les
assureurs n'acceptent pas de couvrir n'importe quel risque. Cette exigence
pourrait peut être venir à la rescousse des passagers.
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