B. Les fondements réglementaires de l'obligation de
sécurité
Le code de la marine marchande est censé prendre en
charge toute l'activité maritime mais pour bien pallier à
l'éventualité de toutes les spécificités qui
peuvent apparaître elle laisse une certaine marge de manoeuvre à
l'autorité maritime administrative. Dans bien des dispositions du code,
le législateur fait état de l'expression « autorité
maritime compétente », il s'empresse de nous livrer le sens dans
lequel il emploie ces termes. Il s'agit «du ministre chargé de la
marine marchande et des fonctionnaires auxquels il est susceptible de
déléguer tout ou partie de ses pouvoirs. A l'étranger
cette autorité désigne l'ambassade ou l'autorité
consulaire. Cependant dans les ports étrangers où il n'existe pas
d'ambassade ou de consulat du Sénégal, l'Autorité Maritime
locale, après accord du gouvernement dont elle relève, peut se
voir déléguer les pouvoirs dévolus en la matière
aux ambassades et consulats du Sénégal » et à
coté de cette compétence de l'autorité maritime l'article
2 du code fait état de l'existence d'un Conseil Supérieur de la
Marine marchande qui contribue aussi à l'élaboration des normes
de sécurité.
Le rôle de l'autorité maritime en matière
sécuritaire est très étendu. Et elle a une
compétence exclusive en matière d'interdiction de la navigation
dans certaines zones. C'est ainsi qu'aux termes des dispositions de l'article
13 du code, in fine, « l'autorité maritime peut interdire la
navigation dans les ports et dans les chenaux d'accès ainsi que
l'entrée et la sortie des navires lorsque les conditions
météorologiques et hydrographiques sont défavorables,
lorsqu'il existe des obstacles à la navigation, ou pour des raisons
d'ordre public ». Et le second et le dernier alinéa de l'article 14
ajoute qu'elle « a le droit d'interdire la navigation dans un port ainsi
que l'entrée et la sortie de ce port à tout navire dont
l'état de navigabilité est défectueux et susceptible de
constituer un danger pour la sécurité des personnes se trouvant
à bord et pour celle des tiers ainsi que pour toute infraction à
la législation et à la réglementation maritime ».
Dans ces situations l'autorité maritime exerce une véritable
mission de contrôle de l'activité de
navigation maritime. Mais notons que cette mission, si elle
n'est pas exécutée avec la rigueur nécessaire, peut
être fatale aux passagers. C'est ce qui ressort des propos de
l'enquête technique qui a suivi le naufrage du joola
car l'autorité maritime qui reconnaît avoir
remarqué les conditions dans lesquels l'exploitation de ce navire se
faisait, n'a nullement songé à interdire à ce navire
d'appareiller. Pourtant toutes les raisons de retenir ce navire au port
étaient réunies, mais enfin on n'est pas encore à
l'époque où les administrations de nos Etats seront conscientes
qu'une simple tolérance voire négligence dans l'accomplissement
de notre mission, qu'elle soit peu ou prou conséquente, peut être
la cause d'un désastre.
Il faut aussi considérer le rôle non moins
important des commissions de contrôle qui doivent vérifier la
conformité entre les installations des navires et la
nécessité d'une sécurité à bord. Encore que
ces commissions soient en mesure d'exercer avec la rigueur nécessaire
leurs prérogatives !!!
L'obligation de sécurité tient donc beaucoup du
contrat de transport mais cette relation entre transporteur et voyageur n'est
pas laissée à la discrétion de l'autonomie des
volontés. Pas mal d'acteurs interviennent en amont comme en aval mais
tous dans le but de préserver la sécurité de cet inconnu
qui n'est pas toujours conscient de tous les risques du voyage qu'il
entreprend. L'obligation de sécurité que l'on fait peser sur le
transporteur, qui est présumé être un professionnel,
revêt donc tantôt un caractère contractuel tantôt un
caractère extracontractuel ; et dans ce dernier cas elle tient son
fondement de la coutume, des traités (au niveau international) ou encore
de la loi et des règlements au niveau national et local. Il faudrait
tout de même, quand on note l'importance des bases sur lesquelles elle
repose, pouvoir en mesurer l'étendue.
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