Section 2 : L'opposabilité du droit sur la
marque
La marque que l'on peut défendre contre un acte de
contrefaçon n'est pas seulement valable, c'est encore, une marque dont
le propriétaire est en mesure de faire prévaloir la
plénitude de ses droits à l'égard des tiers, car bien que
le monopole sur la marque soit constitué, il existe un certain nombre de
comportements ou d'attitudes de la part du propriétaire qui peuvent
vider le droit privatif sur la marque de son objet.
Sans les qualifier de causes d'inopposabilité, la loi
des marques reconnaît trois situations qui, une fois intervenues, auront
pour effet de rendre les droits du propriétaire de la marque, en fait,
inopposables sur le terrain du droit des marques. Ces causes
d'inopposabilité se ramènent soit à la volonté du
propriétaire de la marque soit à une faute ou une
négligence qui lui est imputable.
Dans le premier cas on parlera soit de retrait (
paragraphe I ) soit de renonciation ( paragraphe
II) du propriétaire à ses droits en tout ou en partie.
Quant au second cas, on parlera de la déchéance
(paragraphe III) du droit sur la marque soit pour
défaut d'exploitation, dégénérescence soit enfin
pour déceptivité du signe constitutif de la marque.
Paragraphe 1 : Le retrait de la demande d'enregistrement de
la marque
On entend par retrait, l'acte, constaté par
écrit, en vertu duquel le titulaire d'une demande d'enregistrement de
marque manifeste sa volonté de retirer sa demande pour tout ou partie
des produits ou services pour lesquels l'enregistrement est demandé.
Dans le cas où la demande a été
déposée par plusieurs personnes, elle ne peut être
retirée que par l'ensemble des déposants ou par une personne
mandatée à cet effet, de même la loi exige le consentement,
constaté par écrit, de toutes les personnes qui ont pu
bénéficier d'un droit de gage ou d'exploitation
concédé par le titulaire de la demande d'enregistrement.
Une fois intervenu, le retrait a pour effet d'ôter
à la demande d'enregistrement toute existence pour l'avenir, ainsi, les
droits qui découlent de l'enregistrement cesseront d'exister et
d'être opposables aux tiers en tout ou en partie suivant l'étendue
du retrait. C'est pourquoi, la détermination de la date à
laquelle le retrait produit ses effets revêt une importance capitale.
Toutefois, à la lecture de l'article 30 de la loi
n°36-2001, on s'aperçoit qu'il se limite à exiger
l'intervention du retrait avant la délivrance de la marque sans pour
autant déterminer la date à laquelle le retrait prend effet, or
le terme délivrance ne renvoi pas à une date précise ou
à un acte spécifique. Néanmoins, il semble qu'il s'agit,
au sens de l'article 13 alinéa 2, du certificat d'enregistrement
délivré au déposant par l'I.N.N.O.R.P.I.
Ainsi, et en l'absence d'une date précise, on dira que
le retrait prend effet normalement à la date de réception de la
déclaration par l'I.NNORPI. Par ailleurs, si l'on admet que le retrait
n'opère que pour l'avenir, on peut se demander si, durant la
période qui se situe entre le dépôt et le retrait de la
demande, le déposant serait admis à défendre ses droits
sur la marque ?
Selon l'article 6 al.2 de la loi n°36-2001,
l'enregistrement de la marque produit ses effets à compter de la date du
dépôt de la demande, ainsi, le droit de propriété
sur la marque est réputé naître dès le
dépôt.
Toutefois, le dépôt ne permet pas, en principe,
à son titulaire de se prévaloir de la protection accordée
par la loi des marques 1 car d'après l'article 45 de la loi
n°36-2001, « Ne peuvent être considérés
comme ayant porté atteinte aux droits attachés à une
marque, les faits antérieurs à la publication de la demande
d'enregistrement de cette marque ».
Il est clair donc que c'est à partir de la publication
de la demande d'enregistrement que les droits sur la marque deviennent
opposables aux tiers, ainsi et à compter de cette date, peuvent
être poursuivies et sanctionnées à titre de
contrefaçon, toutes les atteintes perpétrées aux droits
conférés par l'enregistrement.
Une telle protection basée seulement sur la publication
d'une demande d'enregistrement, témoigne sans doute de la rigueur du
droit des marques qui préserve les droits du déposant même
durant la courte période de temps qui se situe entre la publication de
la demande et la déclaration de son retrait.
Mieux encore, l'article 45 al.2, permet au déposant de
constituer un présumé contrefacteur de mauvaise foi par le biais
de la notification d'une copie de la demande d'enregistrement. En agissant de
la sorte, le déposant pourra se prémunir rapidement des
agissements d'un contrefacteur potentiel juste après le
dépôt de la marque.
La célérité de cette technique de
protection anticipée permet de renforcer la défense de la marque
durant la période qui se situe entre la date du dépôt et
celle de sa publication surtout que cette période risque de durer au
plus tard douze mois selon l'article 9 de la loi n°36- 2001.
Au même titre que le retrait, la renonciation ôte aux
droits sur la marque leur opposabilité.
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