2.1.2- Détermination analytique du taux de change
d'équilibre fondamental
En vertu des développements
précédents, le taux de change réel
d'équilibre
est donc la valeur du change réel assurant une cible
donnée de compte courant, sachant que l'équilibre interne est
réalisée. Il est possible d'écrire le compte
courant (Cc) comme une fonction du PIB domestique (Y), du PIB étranger
(Y*), du change réel (R)
et d'un ensemble de diverses variables exogènes (Z) :
Cc =
f (Y , Y * , R,
Z )
(1.17)
Le taux de change réel d'équilibre, noté,
Rà est alors simplement défini par :
Cà =
f (Yà ,
Yà * , Rà , Z
)
(1.18)
où Cc, Y et Y* représentent
respectivement les valeurs d'équilibre du compte courant,
du PIB domestique et du PIB étranger.
Comme le rappellent Joly et al.
[1996], deux difficultés apparaissent ici. En premier lieu la
forme de la fonction f est difficile à évaluer.
En second lieu, les variables exogènes Z ne sont pas
aisément identifiables. Pour pallier ces deux
difficultés, on log-linéarise le modèle :
(1.19)
c
c
C - Cà =
f (Y ,Y * , R,
Z )- f
(Yà,Yà * ,
Rà , Z )
Soit encore :
*
Cc
= - Y + * Y
+ R
(1.20)
Y Y Y * R
, *
et étant des paramètres liés aux
élasticités du bloc du commerce extérieur
et X = X - Xà
donné par :
. L'écart relatif du taux de change réel
à sa valeur d'équilibre est donc
R =
1 Cc
+ OG - *OG *
(1.21)
R Y
Où OG et OG* désignent respectivement les
output gaps
Finalement, on peut donc écrire :
c
R-Rà = 1
C s
-Càc
domestique et étranger.
(1.22)
R Y
c
Où C s désigne le compte
courant structurel défini par :
C
s
c = Cc
Y Y
+ OG - *OG *
(1.23)
Il ressort donc de ces brefs
développements que l'écart relatif du change réel
à
sa valeur d'équilibre est fonction de
l'écart, en part du PIB domestique, du compte courant structurel
à sa valeur d'équilibre. Ainsi, un compte courant structurel
inférieur
à sa valeur d'équilibre correspond à une
surévaluation du taux de change par rapport à
sa valeur d'équilibre. Il reste maintenant à
déterminer précisément la valeur de cette cible de compte
courant.
2.1.3- Les difficultés de définition des
cibles
Au regard des développements figurant
dans les deux paragraphes précédents,
on constate que le calcul des taux de change
d'équilibre fondamentaux nécessite de connaître deux
éléments :
· L'écart entre la production
réalisée et la production potentielle (l'équilibre
interne) ; et
· L'écart entre le solde courant observé et le
solde courant soutenable (l'équilibre externe).
Cependant, la définition de ces deux
cibles, ou niveaux de référence, pose un
certain
nombre
de problèmes et ne fait pas l'unanimité
(voir notamment Borowski
et al. [1998b]). Pour cette raison, l'approche
de Williamson est souvent qualifiée de normative dans la mesure
où le niveau des taux de change d'équilibre est conditionnel aux
hypothèses retenues. C'est pourquoi Artis et Taylor [1993] et
Bayoumi et al.
[1994] préfèrent parler de taux de change
d'équilibre désiré (Desired Equilibrium
Exchange Rates, DEER) plutôt que de taux de change
d'équilibre fondamental.
Joly et al. [1999] insistent ainsi
particulièrement sur le problème de la
définition des cibles de compte courant et
suggèrent plusieurs possibilités 14 . Une
première possibilité consiste à n'autoriser
aucun écart du solde courant par rapport à
l'équilibre pour chacune des périodes
considérées. Néanmoins, comme le soulignent
les auteurs, cet objectif n'est pas efficace dans la mesure
où un pays peut avoir intérêt à tirer profit
d'importations ou d'exportations de capital sur une longue
période. En outre, Williamson [1994] indique que cette
définition n'est pertinente que si l'on s'intéresse
à la détermination d'un équilibre de très
long terme. Il semble donc préférable de chercher à
définir des déséquilibres soutenables plutôt
que d'éliminer automatiquement toute éventualité de
déséquilibre. Même si l'intérêt d'une
telle approche ne fait pas de doute, sa mise en oeuvre est délicate dans
la mesure où peu de théories permettent de quantifier ces
déséquilibres (voir notamment Joly et al. [1999]).
Williamson [1994], faisant appel aux théories du cycle d'endettement et
du cycle de vie, suggère de relier la cible de la balance
courante à la position extérieure nette, compatible avec
le cycle d'endettement et les caractéristiques
démographiques du pays. Cependant, comme Williamson lui même le
souligne, cette approche présente le risque, pour certains pays, de
conduire à des niveaux de déficit courant qui ne sont pas
soutenables à moyen terme. Le recours à la théorie du
cycle de vie autorise également
à effectuer une distinction entre les pays ayant des taux
d'épargne privée plus élevés que d'autres. Enfin,
dans la mesure où l'évolution des finances publiques a un
impact
sur le compte courant à moyen terme, il convient
également de tenir compte des mesures de politique budgétaire
afin d'évaluer la cible de compte courant.
Comme le notent très justement Joly
et al. [1996], ces théories ne permettent pas de
définir de façon précise un niveau de compte
courant d'équilibre. Joly et al.
[1999] suggèrent alors de rattacher le taux de change
réel d'équilibre à la contrainte budgétaire inter
temporelle de la nation en générant un profil de compte courant
qui
permette de rembourser la dette extérieure en un nombre
donné de périodes. Une telle
14 Cadiou [1999] souligne en outre que le choix des
élasticités du commerce extérieur est également
fondamental dans la
mesure où l'élasticité revenue influence
l'évolution du solde commercial lorsque l'économie rejoint sa
production potentielle. Elle détermine l'écart entre la balance
commerciale de plein emploi et sa cible. Les élasticités prix ont
alors pour objet de déterminer l'ampleur de l'ajustement du taux de
change réel permettant d'annuler cet écart.
technique permet ainsi de tenir compte des
déséquilibres extérieurs tant courants que
passés. Une dernière possibilité, moins
restrictive, consiste à stabiliser le stock de la dette en part de PIB.
Cette règle consistant donc à stabiliser le ratio de la dette sur
le PIB à un niveau donné a été retenue par
Williamson et permet de définir un niveau soutenable de déficit
courant pouvant continuer à être financé par des
entrées de capitaux.
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