1.2.2- Le modèle monétaire en présence
de rigidité de prix
Le problème majeur de l'approche
monétaire en présence de flexibilité des prix
réside dans la vérification de 1'hypothèse de la PPA.
En effet, sous cette hypothèse, le
taux de change réel ne peut, par définition, changer.
Toutefois, les premières
expériences des régimes de change flottants ont montré une
forte volatilité des taux de change réels entraînant des
fluctuations des niveaux de compétitivité (Dornbusch, 1976)
7 . Ainsi, l'approche monétaire à prix flexibles
ne reflète pas convenablement l'effet réel et c'est ainsi que
l'on a assisté avec Dornbusch (1976) (qui introduit une dynamique
dans le modèle monétaire) au développement
d'une deuxième génération de modèles
monétaires à prix rigides.
1.2.2.1- Fondements
théoriques
Le modèle monétaire à prix
rigides suppose la possibilité de déviations des taux
de change nominaux et réels de leurs niveaux
d'équilibre de long terme, gouvernés par
la PPA.
7 Dornbush. R. (1976) : « exceptations and
exchange rate dynamics», journal of political economy, vol 84, pp
1161-1176.
Il traite fondamentalement, des conditions
d'équilibre sur le marché monétaire
sous 1'hypothèse de parfaite substitution entre les
actifs monétaires locaux et étrangers. L'idée intuitive
sous-jacente à la déviation de ce modèle peut
être illustrée par l'exemple suivant:
Supposons une baisse de l'offre nominale de
monnaie. A court terme, la rigidité des prix implique une baisse de
l'offre réelle de monnaie et par suite un accroissement des taux
d'intérêt. Cette hausse des taux va stimuler l'entrée de
capitaux conduisant à une appréciation du taux de
change nominal qui, à son tour, entraînera une
appréciation du taux de change réel.
Dans de telle situation, les investisseurs
étrangers vont faire baisser les produits
de leurs investissements à l'étranger.
Toutefois, au fur et à mesure que la perte de change
anticipée (taux de dépréciation anticipé) soit
inférieure au différentiel de rendement des capitaux
(c'est-à-dire le différentiel de taux d'intérêt),
les investisseurs averses au risque vont continuer à acheter des
actifs étrangers. L'équilibre de court terme est atteint
lorsque le taux de dépréciation anticipée égalise
le différentiel de taux d'intérêt (la PTI est
vérifié). Dès lors que ces deux variables sont
différents de zéro. Le taux de change va dévier de sa
valeur d'équilibre de long terme, donnée par la PPA. Toutefois,
à moyen terme, les prix locaux vont baisser
Suite à une réduction de l'offre
de monnaie entraînant ainsi une baisse de l'offre réelle de
monnaie et donc du taux d'intérêt local: Le taux de change nominal
réagira à
ces perturbations en se dépréciant
lentement pour converger vers son niveau d'équilibre de long
terme, défini par la PPA.
Il est à noter que l'approche
monétaire de Dornbusch (1976) a été fortement
critiquée par Frenkel (1979) qui a expliqué la faiblesse du
modèle par sa négligence des effets temporels de l'inflation.
1.2.2.2- Présentation du
modèle
Nous adoptons ici la représentation
proposée par Frenkel (1979)8 et reprise par
Meese et Rogoff (1983), qui permet de relier le taux de change
réel à l'écart de taux d'intérêt réel.
L'hypothèse de départ est que la PPA n'est valide que sur longue
période:
e = p - p *
(1.10)
Où:
p et p * les logarithmes des prix domestiques et étrangers
;
e Le logarithme du taux de change à long terme.
Ou bien:
e = (m - m*
) - á ( y - y * ) +
â ( i - i * )
(1.11)
Où les variables représentées avec une
barre sont les variables d'équilibre de long terme.
Le taux de dépréciation anticipée du change
est spécifié de la façon suivante:
t
t
Et( ? et+1) = - ö ( et
- et ) + ( Ïa
- Ïa *) 0< ö<1
(1.12)
Où:
? et = et+1 - et
t
Et est l'espérance mathématique conditionnelle
à l'information disponible en t; Ïa
t
et Ïa * désignent les anticipations
d'inflation à long terme. Enfin. 1'hypothèse de la PTINC
s'écrit:
it -it* = Et (? et+1) (1.13)
En combinant les équations (1.12) et (1.13), on
obtient:
et - et
= - (1/ ö) (it -it*) + (1/ ö) ( Ïa
- Ïa *) = - (1/ ö) ( r - r *)
(1.14)
t t t t
Où
t
rt = it - Ïa
est le taux d'intérêt réel ex-ante.
8 Jeffery. A. FRANKEL : « on the mark : a theory
of floating exchange rates based on real interest differentials», American
economic review, 1979, vol 69, pp 610-622.
En intégrant les équations
(1.10) et (1.14) et en supposant que la meilleure
estimation du niveau d'équilibre des prix, de l'offre
de monnaie, du revenu et des taux d'intérêt sont les niveaux
observés (hypothèse de marche aléatoire), on obtient les
deux représentations suivantes, en notant Rt = et -pt + pt*, le taux
de change réel:
et = pt - pt* - (1 /
ö) (rt - rt*) (1.15)
Et par suite
Rt = -(1 / ö) (rt - rt*)
Le modèle monétaire à prix
rigides se présente comme suit:
et = (mt - mt*) - á (yt - yt *) + â (it - it*)
- (1 / ö) (rt - rt*) (1.16)
La relation (1.15) constitue une
représentation plus générale que la PPA (que l'on
retrouve quand ö ? , c'est-à-dire quand le taux de
change, donc les prix, s'ajustent instantanément à leur
niveau de long terme), mais conserve une forme
aisément testable.
D'une manière analogue, la
spécification (1.16) propose une représentation plus
générale que la spécification du
modèle monétaire à prix flexibles (1.5). Ce
point
est important même dans le cadre d'une analyse des
déterminants de long terme du taux de change.
D'un point de vue théorique, en effet,
les deux modèles doivent être équivalent à long
terme puisque, à cet horizon, les prix s'ajustent pour assurer
l'équilibre entre offre
et demande de biens. Cette notion de long terme n'est
toutefois pas très précise et il n'est pas sûr, en tous
cas, qu'elle corresponde au long terme défini dans le cadre d'une
relation de cointégration. En effet, autant d'un point de vue
théorique l'écart de taux d'intérêt réels
est stationnaire (puisqu'il est, d'après la PTINC, égal
aux taux de dépréciation du change réel), autant
empiriquement les écarts de taux d'intérêt
réels apparaissent souvent non stationnaires.
Les deux modèles monétaires ont
alors des implications différentes en termes
de relation de long terme : d'après le modèle
à prix flexibles, taux de change et écart de prix doivent
être cointégrés ; d'après le modèle à
prix rigides il faut ajouter l'écart de taux d'intérêt
réels pour que la relation soit stationnaire.
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