ALa
responsabilité pénale du supérieur
hiérarchique
Il s'agit ici de la responsabilité de la personne en
position d'autorité dans une situation de
conflit armé ; celuici
est tenu, sinon pour des actes par lui commis, du moins pour
avoir su ou
pour avoir eu des raisons de savoir que son subordonné
s'apprêtait à commettre des exactions ou
l'avait fait et qu'il n'a pas pris des mesures nécessaires
et raisonnables pour empêcher que lesdites
exactions ne soient pas commises ou en punir les auteurs.
L'essentiel du jugement rendu dans l'affaire Tihomir Blaskic
N° IT9514T
traite de cette
responsabilité du supérieur hiérarchique. En
l'espèce, commandant militaire, Blaskic a été mis en
cause au titre de la responsabilité pénale directe
que de la responsabilité du supérieur hiérarchique
pour crimes contre l'humanité. Il fut condamné en
Mars 2000 non pas pour avoir directement
commis lesdits crimes, mais parce.
En effet, dans le même sillage, l'article 6 du statut du
TPIR stipule qu'un supérieur
hiérarchique est pénalement responsable des actes
de ses subordonnés si ayant su ou eu des
raisons de savoir que ceuxci
s'apprêtaient à commettre de tels actes ou avaient
commis, il n'a
rien fait.
Aussi, ouvrant une ère complètement nouvelle pour
les tribunaux de ce type, l'article 4 du
statut du TPIR habilite le tribunal à poursuivre les
personnes qui commettent ou donnent l'ordre
de commettre des violations graves à l'article 3 commun
aux quatre conventions de Genève de
1949 et au CGPA II relatif à la protection des victimes
des CANI. C'est ainsi que dans l'affaire
Akayesu du 2 septembre 1998, la responsabilité de ce
dernier découlait sinon de la commission
ou de sa participation à la commission de l'une des
infractions relevant de la compétence du
TPIR, du moins des actes des subordonnés se trouvant sous
son commandement.
BLa
responsabilité pénale du
subordonné
39
Aux termes du principe selon lequel chacun est personnellement
responsable de ses
actes100, même s'il a agit sur ordre, la transgression des
normes du DIH entraîne automatiquement
la responsabilité pénale internationale de son
auteur, abstraction faite de son statut social ou de
tout autres critères analogues.
En revanche, l'absence de jugement pour les atrocités
commises serait non seulement une
défaite morale, mais aussi une grave erreur politique ;
car le jugement des criminels est
indispensable pour les victimes mais plus encore pour l'ordre de
l'humanité et de la société
internationale menacée par lesdits crimes.
Ainsi, l'étendue de la responsabilité pénale
internationale de l'auteur direct des actes
matériels constitutifs de crimes de guerre ou de crimes
contre l'humanité devrait varier selon
qu'il a ou non agi sur le fondement d'instruction et selon que
son acte est, à lui seul, constitutif
d'un crime relevant de la compétence du tribunal ou
participe d'un crime relevant de sa
compétence.
Aussi, il faut signaler ici que le fait qu'un crime a
été commis sur l'ordre d'un supérieur
n'exonère la personne qui l'a commis de sa
responsabilité pénale que si cette personne avait
l'obligation légale d'obéir à l'ordre et si
cet ordre n'était pas illégal, quid de la situation où
l'auteur dudit crime était menacé de mort s'il
n'exécutait pas l'ordre illicite.
La responsabilité pénale du subordonné, de
même que celle du supérieur hiérarchique
peut être établit en toute situation de conflit
armé. En se prononçant dans ce sens, dans l'affaire
Tadic, le TPIY réitérait ainsi que l'individu est
responsable pénalement pour la perpétration des
crimes de guerre dans les conflits internes ; et reconnaissait en
même temps l'existence d'un
ensemble de normes humanitaires qui sont à même
d'être appliquées en toutes situations de
conflit armé, indépendamment de sa nature, de son
intensité ou des parties en présence.
Le fait d'ériger les règles du DIH applicables dans
les CANI en règles dont la violation est
assortie, en vertu du droit international, d'une sanction
pénale, contribuerait sans doute à un
meilleur respect de cette partie du DIH qui fait quelquefois
encore, figure de parent pauvre du
droit des conflits armés101.
100 Hans Haug ; Humanité pour tous : Le mouvement
international de la croix rouge et du croissant rouge
précité p
585.
101 Denise Platner ; Répression pénale des
violations du droit international humanitaire applicables aux conflits
armés non internationaux. N° 785,
Genève, SeptembreOctobre
1990 P 444.
40
En outre, il faut relever ici l'apport remarquable de la
jurisprudence des TPI concernant
l'effacement de la frontière entre les conflits internes
et les CAI. Les conflits yougoslaves et
rwandais mêlant étroitement les aspects internes et
internationaux, il serait dès lors arbitraire de
séparer ces deux types de conflits, bien que le droit
international et le droit humanitaire aient
prévu des règles différentes pour ces deux
catégories de situation.
En somme la tendance contemporaine se rapproche vers une
application extensive du
cadre normatif applicable aux conflits internes et cela se
matérialise par la transposition des
règles du DIH relatives aux CAI dans les conflits
internes.
Cette évolution est pour le moins réjouissante dans
la mesure où les règles du DIH étant
édictées pour protéger l'homme, il
deviendrait absurde que celuici
soit plus protéger en
situations de CAI et moins dans les cas de conflits internes. On
pourra peutêtre
nous objecter sur
cette assimilation, généralisation102 de CAI et
conflits internes, mais l'objectif primordial ici étant
la protection de l'homme en toute situation de conflit
armé : l'Homme reste le même en toute
circonstance.
Au regard du dispositif normatif applicable aux conflits internes
que nous venons
d'analyser, on dirait que ces règles sont bien
consistantes pour régir valablement les situations de
conflits internes. Mais, compte tenu de ce qui se passe en
Côte d'Ivoire et en RDC, nous sommes
tenter de parler d'une difficile mise en oeuvre de ces
règles dans les deux cas de conflits internes.
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