Paragraphe 2 : Des mécanismes de reddition de
compte assez peu dissuasifs
Bien que la performance de la gestion locale ait laissé
à désirer, c'est bien la redevabilité des acteurs locaux
qui est souvent pointée du doigt comme la raison majeure de ce sinistre
bilan par aussi bien les partenaires techniques et financiers que certains
spécialistes. Ceux-ci considèrent qu'il existe un lien
intrinsèque entre le régime de responsabilité des acteurs
et leur rendement effectif. Aussi, le dernier aspect de la gestion locale, mais
pas des moindres, qui a éprouvé le cadre juridique de la
décentralisation béninoise, est le régime de
responsabilité mis en place jugé non exhaustif (A) avec
derrière une tendance à promouvoir l'impunité (B).
A : Un régime de responsabilité
nonexhaustif
Lorsqu'il s'agit de la performance des hommes, un outil
essentiel reste le contrôle. Mais le contrôle n'a de sens que s'il
est suivi par une sanction appropriée. Des anciennes dispositions
législatives et réglementaires qui encadrent la
décentralisation au Bénin, nous remarquons une volonté
manifeste de privilégier les sanctions administratives (2). Or, de base,
la liste des fautes prévues par les lois et règlements n'est pas
de nature à prévoir tous les faits illicites (1).
1 : Les fautes de gestion
Bien que d'autres instruments juridiques tels que le Code du
travail ou encore le Code pénal béninois servent à
encadrer les actes répréhensibles susceptibles d'être
commis par les acteurs locaux c'est-à-dire les fonctionnaires et les
élus locaux, les lois et décrets sur la décentralisation
ont tenu à fixer le régime de responsabilité de ces
acteurs ou tout au moins des élus et du secrétaire
général. Il en est ainsi de la loi n° 97-029 du 15 janvier
1999 portant organisation des communes en République du
Bénin ou du décret n° 2001-414 du 15 octobre 2001
fixant le cadre général du règlement intérieur
du conseil communal. Ces deux instruments juridiques précisent par
exemple les faits constitutifs de faute lourde et qui peuvent être
retenus à charge du maire, de ses adjoints ou encore du
secrétaire général des mairies. A la lecture des articles
54 à 57 de la loi n° 97-029, on se rend compte que la
révocation, voire la suspension du maire ou de ses adjoints est
conditionnée par l'existence d'une faute lourde commise dans l'exercice
de leur fonction. La liste de ces fautes lourdes, contenue dans l'article 55,
comprend : « l'utilisation des fonds de la commune à
des fins personnelles ; les prêts d'argent effectués sur les fonds
de la commune ; le faux en écritures publiques ; le refus de signer ou
de transmettre à l'autorité de tutelle une
délibération du conseil communal ; la vente ou
l'aliénation abusive des biens domaniaux ; toutes autres violations des
règles de déontologie administrative ». Les
règles de déontologie administrative comprennent principalement
l'obligation de neutralité, l'obligation de probité, l'obligation
de discrétion ou encore l'obligation de loyauté.
Pourtant, cette énumération est manifestement
non exhaustive, car elle devrait comprendre tout fait réprimé par
le Code pénal. Les manquements au devoir, les abus de pouvoir, les faits
de quelque nature qui portent atteinte aux intérêts de la commune
ou qui induisent un dysfonctionnement grave dans le fonctionnement du service
public devraient être considérés.
En effet, ainsi libellé, le régime de
responsabilité prendra en compte toutes les éventualités
de mauvaise gestion, y compris les abus de droit. Il est intéressant de
remarquer à ce titre que la vente ou l'aliénation de biens
domaniaux par le maire ou ses adjoints n'est pas interdite puisque l'article 55
évoqué supra parle de vente ou aliénation abusive
des biens domaniaux. La question s'est posée de déterminer la
personne à qui incombait l'appréciation du caractère
abusif des ventes ou aliénations. Manifestement donc, cette
énumération des fautes de gestion était assez
débonnaire et ne manifestait pas suffisamment l'intransigeance qui
devait caractériser le régime de responsabilité des agents
publics.
|