B. DES INFRACTIONS RELATIVES AU FONCTIONNEMENT D'UNE
SOCIETE
Il convient d'analyser dans le présent paragraphe des
infractions ayant trait à la gérance, à l'administration
et à la direction des sociétés (a)35, celles
relatives aux assemblées générales (a)36,
celles se rapportant aux modifications du capital des sociétés
anonymes (c)37, ainsi que celles relatives au contrôle des
sociétés (d)38.
a. Infraction relative à la gérance,
à l'administration et à la direction des
sociétés
En effet, l'Acte Uniforme incrimine, à l'article 888,
ceux qui ont sciemment négocié des actions non
entièrement libérées et celles des actions en
numéraire pour lesquelles le versement le versement du quart du nominal
n'a pas été effectuée39. Cet article ne
réprime pas l'inobservation de toutes les formalités de
constitution, contrairement à l'article 886 analysé ci-haut. Il
tend simplement à sanctionner la négociation
irrégulière d'actions qui peuvent faire l'objet de transactions
sur le marché financier40.
33 Dans la plupart des cas, ce sont les
commissaires aux apports et commissaires aux comptes qui rédigent un
rapport en ce sens.
34 Sénégal prévoit un an
à cinq ans et cent mille à un million cfa ou l'une de ces deux
peines seulement/ le Cameroun la punit de trois mois à trois ans de
servitude pénale, cinq cent mille à cinq millions cfa ou l'une de
ces deux peines seulement/ le Centrafrique réprime d'un an à cinq
et ou d'une amende d'un million à cinq millions/ au Benin, la loi de
2011 sanctionne de trois ans à dix ans et d'une amende de deux millions
à dix millions cfa/ au Congo, elle est punie de six mois à deux
ans et d'une amende de cent mille à dix millions ou l'une de ces deux
peines seulement.
35 Régis par les articles 888 à 891-2
de l'AUSCGIE, in code vert : traité et actes uniformes
commentés, Paris, Juriscope, 2014, p.433
36 Articles 891-3 et 892 de l'AUSCGIE, in code
vert : traité et actes uniformes commentés, Paris,
Juriscope, 2014, p.432
37 Articles 893 à 896 de l'AUSCGIE, in
code vert : traité et actes uniformes commentés, Paris,
Juriscope, 2014,
p.435
38 Articles 897 à 900 de l'AUSCGIE, in code
vert : traité et actes uniformes commentés, Paris,
Juriscope, 2014,
p.436
39 Le Benin en sanctionne d'un an à cinq ans
de prison et une amende d'un million à cinq millions de francs cfa/ le
Cameroun la punit de trois à trois ans et d'une amende de cinq cent
mille à cinq millions cfa ou l'une de ces deux peines seulement/ et la
RCA punit d'un an à cinq ans et ou d'une amende d'un million à
cinq millions de francs.
40 POUGOUE P.G et Alii, op. Cit. p269
18
Il frappe les auteurs de la négociation quels qu'ils
soient auxquels on ne saurait reprocher que l'inobservation des
formalités qui leur sont imputables. L'élément
matériel de ladite infraction demeure la négociation, et la
mauvaise foi est pertinemment requise comme élément intentionnel
en ce sens que le législateur communautaire prévoit qu'il doit
avoir été commis « sciemment ».
Les articles 889, 890 et 890-1 érigent successivement
en incrimination, les dirigeants sociaux qui, à l'absence
d'inventaire ou au moyen d'inventaire frauduleux, ont, sciemment
opéré entre les actionnaires ou les associés la
répartition de dividendes fictifs41 ; et les dirigeants
sociaux qui ont sciemment, même à l'absence de toute distribution
de dividendes, publié ou présenté aux actionnaires ou
associés, en vue de dissimuler la véritable situation de la
société, des états financiers de synthèse ne
donnant pas, pour chaque exercice, une image fidele des opérations de
l'exercice, de la situation financière et de celle du patrimoine de la
société, à l'expiration de cette
période.42 Ces deux dispositions sanctionnent les
irrégularités comptables ainsi que le défaut de
sincérité.
Ces irrégularités sont la répartition des
dividendes fictifs entre associés d'une part, et la communication
d'états financiers ne donnant pas une image fidele de la situation
financière et comptable de la société d'autre
part.43 Matériellement, ces infractions requièrent
l'acte de distribution d'un dividende fictif et publication des états
financiers non fidele à l'image de l'entreprise ; et la
nécessité d'une intention délictueuse. La mauvaise foi de
l'auteur connaissant bien le caractère fictif des dividendes, publiant
les états financiers tout en sachant que ces derniers ne sont pas
fideles à l'image de la société ainsi que le non respect
dans un délai d'un mois après leur approbation, les états
financiers de synthèses.
En outre, pour mener à bien la mission qui leur est
confiée, les organes légaux de la société sont
dotées de pourvoir plus ou moins étendus, il faut alors
éviter qu'ils n'en abusent ou entravent l'exercice de droits
légaux.
41 Art. 889 de l'AUSCGIE ; La RDC prévoit
dans son projet de loi la peine de trois à cinq ans et une amende de
trois cent mille à cinq cent mille francs, la République du Benin
punit de trois ans à dix ans de servitude pénale et d'un million
à cinq millions d'amende/ le Sénégal sanctionne un an
à cinq ans et cent mille à cinq millions d'amende/ la RCA un an
à cinq ans d'emprisonnement et ou un million à cinq millions
d'amende/ le Cameroun un an à cinq ans de prison et un million à
dix millions de francs Cfa d'amende
42 Art. 890 de l'AUSCGIE ; La RDC prévoit
dans son projet de loi les mêmes peines que celles prévues
à l'article précédent, le Benin punit de trois ans
à dix ans et cinq millions à vingt millions/ la RCA d'un an
à cinq ans et ou d'une amende d'un million à cinq millions/ le
Cameroun sanctionne d'un an à cinq ans et une amende d'un million
à dix millions.
43POUGOUE P.G et alii, op. Cit. P291 et 276
19
C'est dans cette optique que l'Acte Uniforme sanctionne le
gérant de la société à responsabilité
limitée, les administrateurs, le président directeur
général, le directeur général adjoint, le
président de la société par action simplifiée,
l'administrateur général ou l'administrateur
général adjoint qui, de mauvaise foi, font des biens ou du
crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire
à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles,
matérielles ou morales, ou pour favoriser une autre personne morale dans
lesquelles ils sont intéressés, directement ou
indirectement.44 Cette disposition traite de ce qui est
communément appelé l'abus des biens sociaux, mais il s'agit aussi
d'un usage abusif du crédit de la société.
Ces délits ont une finalité commune, celle de
sanctionner les dirigeants qui traitent le patrimoine social comme leur
patrimoine propre, en méconnaissance du principe de séparation
des patrimoines, ou qui gèrent la société dans leur
intérêt de la société.45
Les biens sociaux constituent l'ensemble des biens mobiliers
et immobiliers de la société et le crédit social fait
référence à la confiance financière qui est
attachée à la société à raison de son
capital.46
Il y a lieu de constater qu'il a paru nécessaire au
législateur communautaire de mentionner dans cette disposition, l'abus
des biens sociaux plutôt que de l'abus du pouvoir, les considérant
tellement liés.47 C'est dans le cadre d'une
interprétation restrictive de la loi pénale qu'il a
été parlé de retrait du système pénal
à propos de l'abus des pouvoirs et des voix, une incrimination qui
était contenue dans le code sénégalais des
sociétés, que le droit pénal harmonisé n'a pas
repris.48 Ces abus sont matériellement
caractérisés par un usage contraire à
l'intérêt social, et l'élément moral se puise dans
la mauvaise foi, avec un dol spécial relatif à la poursuite des
fins personnelles de l'auteur de l'abus.
44 Art. 891 de l'AUSCGIE, in code vert :
traité et actes uniformes commentés, Paris, Juriscope, 2014,
p.435
45 MOUKOKO C., Op. cit. p12
46 La RDC prévoit dans son projet de loi la
peine de trois à cinq ans et une amende de trois cent mille à
sept cent mille francs, la loi Sénégalaise réprime cette
infraction d'un an à cinq ans et cent mille à cinq millions cfa ;
le législateur précise que les deux peines doivent
obligatoirement être prononcées l'une et l'autre/ le Cameroun
sanctionne d'un an à cinq ans et d'une amende de deux millions à
vingt millions de francs Cfa/ la RCA punit d'un an à cinq ans et ou un
million à cinq millions/ le Benin punit cinq ans à dix ans et une
amende de cinq millions à vingt-cinq millions/ la loi congolaise
sanctionne d'un an à cinq ans et trois cent à trente millions ou
l'une de ces peines seulement et précise qu'en cas de récidive,
l'emprisonnement est amené à dix ans et l'amende de trente
millions à cent cinquante millions
47 MANSAKA B., le droit pénal ohada face
à la répression des incriminations pénales,
mémoire de licence, Kinshasa, Université Catholique du
Congo, Faculté de Droit, Option Droit économique et social, 2017,
p.13, inédit
48 POUGOUE P.G et Alii, op. Cit. p.229
20
Les dispositions 891-1 et 891-2 sanctionnent successivement
les dirigeants sociaux qui49, sciemment ne font pas figurer la
dénomination sociale sur tous les actes et documents émanant de
la société et destinés aux tiers ; ceux qui ne font pas
précéder ou suivre immédiatement la dénomination de
l'indication, en caractères lisibles, de la forme de la
société, du montant de son capital social, de l'adresse de son
siège social et de la mention de son immatriculation au registre de
commerce et du crédit mobilier.
Et le 891-2 réprime les dirigeants sociaux d'une
société étrangère ou la personne physique
étrangère dont la succursale, au-delà d'une durée
de deux (2) ans, n'a été ni apporté e à une
société de droit préexistante ou à créer de
l'un des Etats parties ni radiée, dans les conditions fixées par
l'article 120 ci-dessus.
Dans la première disposition50, le
législateur sanctionne les dirigeants sociaux qui n'insèrent pas
le nom de la société dans les actes et documents destinés
aux tiers, émanant de la société, tel que dans un bon de
commande, une facture, etc. Le nom de la société doit y figurer ;
et les dirigeants qui ne font pas suivre la dénomination sociale de
l'indication, de la forme sociale, du montant de son capital social, de
l'adresse du siège social et la mention de son immatriculation au
RCCM.
L'élément matériel de cette infraction
consiste dans la non insertion de la dénomination sociale dans les actes
et documents sociaux destinés aux tiers ; le fait de ne pas faire
précéder la dénomination social de l'indication et de la
forme sociale notamment. Et l'élément moral se trouve dans la
mauvaise foi de l'auteur de l'infraction et le caractère intentionnel
est requis.
La seconde disposition quant à elle sanctionne les
dirigeants sociaux des sociétés
étrangères51, ou la personne physique
étrangère, dont la succursale, au-delà de deux ans, n'a
pas été apporté à une société de
droit préexistante, à créer, moins encore
radiée.
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