L'efficacité des mécanismes juridiques internationaux de protection des droits de l'homme.par Saintchrist Phylo Eboungou Ondombo Université Marien Ngouabi, Congo Brazzaville - Master 2 en droit public 2020 |
B-Un régime de sanction pratiquement quasi-inexistantLa problématique des sanctions, qui sont définies comme de « véritables punitions infligées afin de mieux garantir les droits »285, est complexe. Il est, en effet difficile d'organiser, au plan universel, de véritables sanctions juridiques, et juridictionnelles286. Mais cela ne signifie pas qu'elles sont inexistantes en droit international. Il est donc faux d'affirmer que ce dernier ignore complètement les sanctions alors que le droit coutumier les pratiques sous des formes 282 DHOMMEAUX (Jean), Op.Cit., p.483. 283 TAVERNIER (Paul), « Droits de l'hommisme et droit international » In Revue droits fondamentaux, N°1, juillet-décembre 2001 ( http://www.droits-fondamentaux.org/). 284 Ibidem 285 GUINCHARD (Serge) et MONTAIGNER (Gabriel), Op.Cit., p.524. 286 BECET (Jean Marie) et COLARD (Daniel), Op.Cit., p248 89 variées telles que la rupture des relations diplomatiques, l'annulation d'un traité irrégulièrement conclu, la caducité d'un traité inexécuté par le cocontractant, les mesures de rétorsion, les représailles, etc. Ainsi, comme l'affirmait le professeur Wolfgang FRIEDMANN de l'université de Columbia et représentant d'un courant « institutionnaliste » : « dans les organisations Internationales, le non-respect des règles peut être sanctionné par la `'non-participation» de l'Etat fautif au bénéfice de la coopération organisée par l'organisation »287. Toutefois, il est important de reconnaître qu'en tout état de cause, on ne doit pas identifier la notion de système juridique avec celle de sanction. Il y a, en effet, dans certains systèmes internes des branches de droit qui ne comportent pas de mécanismes de sanction à l'exemple du droit constitutionnel quand il n'y a pas de contrôle de constitutionnalité (cas de l'Allemagne sous la constitution Weimar du 31 juillet 1919 et de la France de 1789 à 1958). On fera aussi observer que si l'application, d'un côté, de la sanction peut être la condition de l'efficacité du droit, elle n'est pas celle de son existence (à condition que l'existence soit le sentiment de l'obligation). Le droit international n'ignore donc pas complètement les sanctions car le droit coutumier les reconnaît et les pratiques sous des formes qui varient de la rupture des relations diplomatiques, de l'annulation des traités irrégulièrement conclu, de la caducité d'un traité inexécuté par le cocontractant, des mesures de rétorsion aux représailles. Certes, ces sanctions n'ont ni l'efficacité ni l'aspect du droit privé. Mais ce serait manquer de méthode que de considérer le droit interne comme étant le seul type possible d'ordre juridique288. Ainsi, il est donc vrai que la fragilité du droit international réside dans l'inefficacité relative de ses sanctions que la mesure où de nombreuses règles qu'il pose peuvent parfois être violées en toute impunité. Aucune des institutions chargées de son respect ne dispose d'un pouvoir coercitif efficace. Le respect du droit international public, bien qu'il apparaît, à l'observation, que la plupart d'Etat accepte de se soumettre sans trop de résistance aux règles édictées par le droit ; est donc soumis au bon vouloir des Etats289. Et comme le droit international des droits de l'homme doit inexorablement se tourner vers le droit international général pour assurer sa mise en oeuvre, il n'est pas surprenant qu'il n'offre qu'un marginal et imparfait soutien à l'exécution des obligations étatiques en matière de 287 Université de Lille2, « l'effectivité du droit international »( www.univelille2.fr/droit/dip/1 3.hm). 288 Ibidem 289 Université de Lyon3, « Introduction virtuelle au droit : le droit international et le droit européen », Faculté de droit, janvier 2004 ( www.facdedroit-lyon.com/modules/ivd/10 droit international droit européen.php.conventions) 90 sanctions, Le professeur Karel VASAK l'a écrit : « il n'existe pas d'institutions des droits de l'homme exerçant une fonction de sanction »290. Mais le professeur Charles LEBEN insiste de son coté sur l'idée que le schéma de l'évolution de l'ordre juridique international pourrait ne pas être « simplement la répétition de l'évolution suivi par l'ordre juridique interne » et qu'il pourrait y avoir maintien d'une société internationale pluraliste dans laquelle coexisteraient différentes organisations disposant de moyens de contrainte n'appliquant pas la centralisation de la force. On pourrait approcher cette réflexion de la notion de « niveau de solidarité » évoquée par le professeur Georges SCELLE, ou l'idée d'une régénération du droit international à partir d'ensembles régionaux, dont parlait le professeur Wolfgang FRIEDMANN. L'existence du droit appliquant les sanctions entre les Etats doit donc être considéré, au stade actuel, comme une réalité depuis l'apparition des organisations internationales même s'il est encore difficile de trancher sur leur autorité. Et ces sanctions internationales visent tous les domaines du droit international y compris celui des droits de l'homme291. En conséquence, les sanctions pour violation des droits de l'homme, lesquelles existent, sont mineures, partielles et limitées. Ainsi, comme le dit le professeur Antonio CASSESE : « la communauté internationale ressemble à ce merveilleux pays, l'Eldorado, ou Candide et son fidèle serviteur Cacambo finirent après tant d'adversités, et où il n'y a ni tribunaux ni parlements, ni prisons (...) pour la seule raison qu'aucun Etats n'a réussi à dicter ses lois aux autres »292. Ce climat de « quasi anarchie » de la communauté internationale est favorable à la violation permanente des droits de l'homme car malgré les condamnations dont font l'objet les Etats auteurs de ces violations, ils peuvent continuer à conclure les traités, à envoyer et recevoir des ambassadeurs, à participer aux débats des organes des Nations Unies et à voter sur telle ou telle autre résolution. Tel est le cas de certains pays comme l'Israël, l'Afrique du sud du temps de l'Apartheid, le Chili et autres293. Cette précarité s'explique donc, en définitive, par un environnement international défavorable du fait que la société internationale n'est pas homogène à cause de la souveraineté des Etats qui continue aussi à s'imposer. 290 VASAK (Karel) cité par PELLET (Alain), Op.Cit. 291 Université de lille2,Op.Cit. 292 CASSESE (Antonio), « La valeur actuelle des droits de l'homme », Mélange René-Jean DUPUY, Op.Cit, p.72. 293 Idem.p.70. 91 |
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