I.1.3. Lien entre la formation du dirigeant et la mise sur
pied des pratiques de gestion des ressources humaines
Dans les économies fondées sur le savoir, les
performances des entreprises dépendent de la mise à jour des
compétences des toutes les catégories d'employés, y
compris des cadres et des chefs d'entreprise. La qualité de la gestion
est particulièrement importante pour les PME, qui doivent s'adapter
rapidement aux marchés en constate évolution et aux circonstances
changeantes, mais disposent souvent des ressources limitées. Ces
contraintes représentent également des obstacles à leur
capacité d'entreprendre des formations (hors scolaire) même si des
nombreuses études démontrent une corrélation positive
entre le domaine de formation du dirigeant et la performance d'une PME (OCDE,
2002). Le même rapport révèle qu'il existe des signes
avant-coureurs de l'incidence d'une formation formelle des dirigeants sur la
réduction du taux d'échecs de gestion des PME ; la faillite de
plus de la moitié des PME canadiennes est essentiellement due à
leurs propres insuffisances internes qu'externes. La principale raison de leur
faillite est qu'ils n'ont pas des connaissances ni la clairvoyance pour
gérer les ressources.
Hambrick et al. (1984) cités par Nomo et al. (2018), la
formation de base ou « éducation formelle » d'une personne
peut produire des informations riches mais complexes. Dans une certaine mesure,
l'éducation indique la connaissance d'une personne et le fondement de sa
compétence car cette dernière combine généralement
savoir, savoir-faire et savoir être et peut à cet effet,
influencer sa manière de faire dans son domaine.
La littérature traitant de l'influence des
antécédents scolaires des gestionnaires sur leurs pratiques de
gouvernance (Cooper et al, 1992 cité par Boukar, 2009) démontre
que le niveau scolaire soit du chef de la direction est positivement lié
à la bonne gestion et/ou à l'accroissance de l'entreprise
(Becker, 1970 ; Kimberly et al,1981 ; Roger et al,1971 cité par
Boukar,2009). Ceci peut se justifier par le fait que, pour atteindre ses
objectifs, le dirigeant va faire référence à sa
connaissance en la matière. Selon Boukar (2009), on peut s'attendre
à ce qu'un dirigeant détenant un niveau d'étude bas ou une
formation contraire à son domaine d'activités gère
différemment ses employés comparativement à un autre qui a
de formation dans ce domaine.
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La relation entre la formation du dirigeant et la mise sur
pied des pratiques de GRH est ancrée dans les théories suivantes
:
L'école des caractéristiques
Selon cette théorie, plusieurs caractéristiques
sont à la base des compétences du propriétaire dirigeant
pour bien mener sa gestion dans les PME. La variable la plus citée dans
plusieurs travaux de recherche est la formation du dirigeant. Celle-ci est
définie comme un processus d'intervention ou d'acquisition avec lequel
se confond en grande partie le propriétaire dirigeant lui-même. La
formation doit être considérée comme un ensemble à
transmettre pour combler les lacunes après les avoir identifié
(Julian et al, 2000). Pour sa part, Be amish et al. (2003), la
conçoivent comme un ensemble d'activités d'apprentissage
planifié, visant l'acquisition des connaissances et d'attitudes propres
à faciliter l'adaptation des individus et groupes à leur
environnement socio-professionnel et en même temps, la réalisation
des objectifs d'efficacité de l'organisation. Comme montrent ces
auteurs, les caractéristiques personnelles des responsables dirigeant de
l'entreprise influencent le choix dans la mise en exergue des dispositifs de
gestion des employés et peuvent impacter à cet effet,
particulièrement sur la mise sur pied des pratiques de gestion des
ressources humaines dans les PME par le canal de son profil
sociodémographique (Domaine de spécialisation).
Selon la théorie du capital humain
Pour Willes (1974) cité par Sylvie (2015) défini
ainsi le capital humain « la formation que nous recevons à
l'école c'est-à-dire, les connaissances qui contribuent à
la productivité et à la compétitivité dans une
entreprise ».
L'hypothèse de base de cette théorie est que les
fonctions humaines d'apprentissage sont comparables avec celles d'autres
ressources naturelles qui sont incluses dans le processus de production
(Becker, 1993 cité par Perez, 2008). Cet auteur ajoute que, la formation
ou l'éducation est le plus important investissement dans le capital
humain parce qu'il permet à celle-ci de mieux gérer les taches
qui lui est assigner et en conséquences d'augmenter sa
productivité. L'éducation à une valeur économique
pour l'employé et pour l'économie tout entière et c'est
ainsi que la productivité de la personne éduquée est plus
supérieure à la moyenne. Selon cette théorie du capital
humain, les connaissances, les habiletés et les compétences
détenues par les individus représentent au même titre que
les autres actifs corporatifs une source de valeur ajoutée pour la
firme, souvent supérieure aux actifs
11
traditionnels tels que les machines, les immeubles etc....
(Jackson et al, 1998 cité par chrétien et al, 2005). Becher
(1964) cité par Balemba (2015) la théorie du capital humain
soutient que plus les travailleurs sont qualifiés plus ils deviennent
productifs.
Soulignons que dans le milieu professionnel, la qualification
de la personne peut se référer à son diplôme,
domaine de formation, niveau d'étude. Le dirigeant est
considéré comme travailleur dans le présent travail en ce
sens qu'il occupe lui-même le poste de GRH qui devrait normalement
être exercé par son travailleur qualifié dans le domaine.
Ces études et théories évoquées laissent
transparaitre la manière dont les compétences managériales
du manager de PME via sa formation sont au centre du processus de renforcement
de son entreprise dans tous les domaines. Ces caractéristiques (domaine
de formation et/ou étude faite) du dirigeant vont également
guider ses choix dans la mise en exergue des dispositifs de gestion de ses
employés et par conséquent avoir un effet sur la mise sur pied
des pratiques de GRH. De tout ce qui précède, nous postulons
l'hypothèse selon laquelle : H : Il existerait une
différence significative entre la mise sur pied des pratiques GRH dans
les PME selon que les dirigeants sont du domaine de gestion et/ou autres
domaines.
12
MODELE DE RECHERCE ET HYPOTHESES
Pratiques de GRH
H
Recrutement
Formation continue
Motivation
Rémunération
Evaluation du
Gestion des carrières
Communication et
Analyse des emplois
Formation du dirigeant
H1
H2
H3
H4
H5
H6
H7
H8
Source : construit par nous-même à partir de la
revue de la littérature
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Le schéma ci-haut, présente la structure de
notre étude qui s'inscrit dans une démarche d'une approche
hypothético-déductive, ce qui suppose la formulation des
hypothèses. Il intègre les huit (8) dimensions des pratiques GRH
qui constituent les variables dépendantes et de l'autre coté la
variable indépendante formation du dirigeant qui sera
représentée par le domaine de formation du dirigeant. Le PGRH est
un construit multidimensionnel.
Cependant, les dimensions des pratiques GRH sont nombreuses
(Messa,2005) et plusieurs recherches se sont succédées aux cours
des années sur les pratiques de GRH et font recours au canevas des
pratiques de GRH existant dans les PME mise en place par Fabi et al.(1992)
cité par Messa (2005). Les dimensions utilisées par cet auteur
sont : Analyse des emplois, Recrutement, Motivation, Gestion des
carrières, Evaluation du personnel, Formation continue, communication et
information.
Notre objectif principal étant de vérifier s'il
existe une différence significative entre la mise sur pied des pratiques
de GRH et la formation du dirigeant. Il faut rappeler qu'ici le dirigeant est
pris au sens du propriétaire-dirigeant car en règle
générale, selon Mohamad (2010), les promoteurs de PME
gèrent eux-mêmes leur entreprise et quand bien même la
gestion de celle-ci est déléguée à une tierce
personne, le créateur semble toujours avoir le don d'ubiquité
dans tous les processus décisionnels et particulièrement dans la
gestion des ressources humaines.
Jennings et al. (1997) cités par Louis et al. (2018),
considèrent le dirigeant propriétaire des PME comme le principale
stackholder en ce sens que celui-ci est omniprésent dans divers aspects
de la gestion, ce qui provoque parfois des confusions entre l'entreprise et son
propriétaire. Cette personnalisation peut également avoir des
implications sur les pratiques de GRH dans les PME. Cela est soutenue par
Igaliens et al. (2011) qui montrent que le management d'une PME est
déterminé par le profil du dirigeant c'est-à dire son
domaine de formation, âge, expérience.
Pour sa part Hambrick et al, (1984) cités par Nomo et
al, (2018), la formation indique la connaissance d'une personne et le fondement
de sa compétence car cette dernière combine
généralement savoir, savoir-faire, savoir-être. Ainsi, chez
une personne recevant une formation initiale en génie civil par exemple,
on pourrait s'attendre à observer une certaine différence de
comportement avec celle qui a bénéficié d'une formation en
littérature ou en droit.
Enfin, Fortin (1990) cité par Zaharatou (1995) souligne
que, la complexité actuelle des affaires exige de l'entrepreneur et/ou
dirigeant une certaine expertise en marketing, finance, et en gestion. En
effet, il est évident que la survie et le succès d'une PME se
jouent en partie, au
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niveau du domaine de formation du dirigeant compte tenu du
rôle complexe dans la gestion quotidienne de leurs entreprises, à
savoir dirigeant, financier, comptable, acheteur, fournisseur, gestionnaire des
ressources humaines etc....
Pour appréhender la mise sur pied des pratiques de
gestion de ressources humaines par le dirigeant, nous explicitons les huit
dimensions des pratiques GRH contenue dans notre modèle de recherche
enfin de voir cette relation de cause à effet entre le domaine de
formation du dirigeant et les pratiques de GRH et formulons des
sous-hypothèses quant à ce. Les mêmes dimensions ont
été utilisées dans les travaux de (Messa, 2005 ; Fabi et
al., 2012 ; Mapendo, 2015 ; Tiffault, 2017). Les dimensions des
pratiques de GRH utilisées dans la présente recherche sont :
? Recrutement (Recrut) : selon le
code du travail congolais à son article 7, le recrutement est toute
opération effectuée dans le but de s'assurer ou de procurer
à autrui la main d'oeuvre des personnes n'offrant pas
spontanément leurs services. Le code (ROME :1502) fixe les domaines
formation aptes à réaliser un bon recrutement. Le chargé
de recrutement doit avoir fait la sociologie, psychologie du travail, gestion
des ressources humaines, droit et économie. Une formation continue dans
ces domaines et en droit du travail, en raison de la dimension juridique de la
profession peut répondre aux besoins. A l'issue de ces affirmations nous
postulons que, H1 : Il existerait une différence significative
entre la mise sur pied de la pratique recrutement dans les PME selon que les
dirigeants sont du domaine de gestion et/ou autres domaines.
? Formation professionnelle (Formpro) :
la formation professionnelle s'aligne sur le profil du dirigeant
mais semble moins le préoccuper. Les ressources en gestion manquent car
selon le profil, la vision et l'intention du dirigeant, la formation continue
de son personnel est moins développée (Frémicourt,1991)
cité par la revue de science en gestion (2007). Comprenons par-là
que les démarches de la formation continue des employés sont
étroitement liées au profil du dirigeant. Par exemple, les
autodidactes n'auront pas forcement une perception positive de la
formation(Michun,2004) et d'autres dirigeants par contre s'inquiéteront
de la possibilité de se voir dépassés par des
salariés formés. Ces arguments ci-hauts nous pousse à
émettre l'hypothèse selon laquelle, H2 : Il existerait
une différence significative entre la mise sur pied de la pratique
formation professionnelle dans les PME selon que les dirigeants sont du domaine
de gestion et/ou autres domaines.
? La motivation (Motiv) :
D'après la pyramide des besoins (Maslow,1908-1970), les
individus tentent de satisfaire leurs besoins les uns après les autres.
Pour motiver un
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salarié, il faut donc satisfaire ses besoins primaires
mais également ses besoins secondaires, en lui confiant par exemple des
responsabilités. Complétant cette idée des
délégations de pouvoir, Mohamed (2004) montre que les dirigeants
ayant un minimum de formation en gestion ont tendances à
déléguer les taches et cela permet la motivation des
employés. Ceci montrer une relation entre la formation faite par les
dirigeants et sa façon de motiver les employés. Cette pratique de
la motivation, nous permettra de savoir l'effet de la formation à sa
mise sur pied dans les PME. H3 : Il existerait une différence
significative entre la mise sur pied de la pratique motivation dans les PME
selon que les dirigeants sont du domaine de gestion et/ou autres
domaines.
? La rémunération (Remun) :
selon une étude menée par Phillips (2016), montre
que quand on demande à un échantillon de plus de 1000
salariés les raisons qui les poussent à démissionner, un
trop faible salaire vient sans la moindre ambiguïté. Une
deuxième raison, c'est la culture de l'entreprise qui provient du profil
du propriétaire dirigeant des PME par le faite que cette entreprise est
personnalisée. D'où une rémunération qui
dépend de sa culture d'entreprise et qui aurait comme effet soit
insatisfaction des employés ou satisfaction. Compte tenu de ce qui
précède, les profils du dirigeants inclus sa formation,
influençant sa façon de rémunérer, peut avoir des
implications sur la mise sur pied de la rémunération dans les
PME. Cette dimension de rémunération nous permet de savoir
l'effet de la formation sur sa mise sur pied. H4 : Il existerait une
différence significative entre la mise sur pied de la pratique
rémunération dans les PME selon que les dirigeants sont du
domaine de gestion et/ou autres domaines.
? Evaluation du personnel (Evapers) :
Martine (2006) cité par Djieuga (2010),
l'évaluation du personnel est un acte managérial car il
représente un espace de dialogue privilégie entre le manager et
ses employés. Pour elle, l'entreprise doit bien connaitre le
métier d'évaluation c'est-à-dire posséder les
compétences nécessaires à cet exercice. Mutabunga, (2019)
définit la compétence comme un ensemble de ressources de savoir
définis dans l'exercice d'un emploi dans une situation d'activité
donnée et un environnement donné. Le savoir poursuit-il l'auteur,
s'entend comme « un ensemble cohérent des connaissances acquises
par la formation permettant de mieux exécuter sa tâche ».
H5 : Il existerait une différence significative entre la mise
sur pied de la pratique évaluation du personnel dans les PME selon que
les dirigeants sont du domaine de gestion et/ou autres domaines.
? Gestion des carrières (Gestcar) :
Véritable enjeux stratégique de fidélisation
des collaborateurs et de performance en entreprise, la gestion de
carrière s'impose
16
naturellement comme un facteur de valeur ajoutée du
service RH(Paulla,2002). Selon la revue, Gestionnaires carrières (2002),
les domaines d'activités du gestionnaire des carrières
nécessitent une formation en sciences sociales et cela fera bonne figure
quant à l'évaluation de sa productivité. Ces paroles
laissent entendre que le domaine de formation du dirigeant à un effet
sur la mise sur pied de la pratique de gestion des carrières. H6
: Il existerait une différence significative entre la mise sur pied de
la pratique Gestion des carrières dans les PME selon que les dirigeants
sont du domaine de gestion et/ou autres domaines.
? Communication et information (Comminfo) :
Detrie et al. (2001) cité par Sékou (2007) montrent
qu'une communication efficace repose sur des comportements et des supports
disponibles et donc plus sur la connaissance en management. Les causes d'une
absence et/ou mauvaise communication dans l'entreprise est dû à
l'écart entre ce qui est et ce qui devrait être. Cela s'explique
par un manque des connaissances, valeurs ou manque des compétences
à la matière. Suite à ce qui précède, une
gestion de communication dans les PME nécessitent des connaissances aux
préalables. H7 : Il existerait une différence
significative entre la mise sur pied de la pratique communication et
information dans les PME selon que les dirigeants sont du domaine de gestion
et/ou autres domaines.
? L'analyse des emplois (Ae) :
l'analyse des emplois sert d'assise à plusieurs secteurs
de GRH, notamment la rémunération, dotation, formation.
Au-delà de ces apports largement reconnue, cet outil peuvent être
aussi utile dans la mise en oeuvre de la stratégie d'affaires, de
l'amélioration de l'efficacité organisationnelle et de la
mobilisation à condition que celui-ci soit bien faite(CRHA,2020). Selon
Mutabunga, (2019), par sa connaissance aux outils d'analyse d'emploi, le GRIT
saura préciser au début de chaque naissance d'emplois, la
planification à celle-ci car elle constitue la prédiction des
nombres d'employés à recruter dans l'avenir. A travers cette
connaissance qu'on acquiert au moyen de notre domaine de formation, l'analyse
des emplois sera bien faite parce que les dirigeants possèdent tous ces
outils qu'ils utilisent.
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