Première partie : Le cadre juridique de la
réglementation des déchets biomédicaux
Les DBM sont devenus, avec l'accroissement des
établissements de santé humaine et vétérinaire, un
réel problème dans nos villes. Ces activités de soin
génèrent des centaines de tonnes de déchets toxiques,
potentiellement dangereux pour la nature, les animaux et les hommes.
Cependant, malgré ce constat et malgré le danger
que présentent les DBM, nos Etats ne disposent pas de
réglementation fiable c'est-à-dire qu'on constate une «
absence » de réglementations nationales solides (Chap. I). Il se
présente dès lors une urgence pour l'élaboration d'un
cadre réglementaire solide (Chap. II).
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Chapitre I : L' « absence » de
réglementations nationales solides
La bonne réglementation des DMB ne peut pas se faire
sur des textes inadaptés, incomplets, épars et quelques fois
incohérents. C'est malheureusement le constat sur la
réglementation des DBM dans l'espace CEDEAO. Cette « absence »
de réglementations nationales s'explique par le fait que la gestion des
DBM est souvent laissée à la seule charge des
établissements biomédicaux et des établissements de
santé (section II).
Face à cette faiblesse, il est donc nécessaire
de présenter un exposé explicite des lacunes législatives
et réglementaires nationales (section I) avant de plaider pour une
réglementation adéquate.
Section I : Une réglementation lacunaire des
DBM
Pendant longtemps, les Etats de la CEDEAO en
général ont défini la notion de la santé au sens
strict et limité et l'environnement n'était pas un objectif
spécifique des administrations. C'est ce désintéressement
qui a d'ailleurs conduit à une « absence » de
législation efficace (paragraphe I) qui n'est pas sans
conséquences néfastes sur la santé publique mais aussi sur
l'environnement (paragraphe II)
Paragraphe I : L « absence » de
législation
En général, les Etats francophones de la CEDEAO
ne sont pas totalement dépourvus de législation en matière
de DBM même si les textes qu'ils disposent sont souvent épars et
inappliqués comme il est noté plus haut.
Ainsi, nous examinerons dans ce paragraphe la
législation de certains pays de la CEDEAO considérés comme
modèles en la matière. Il s'agit d'examiner la législation
du Sénégal (A) avant de voir les dispositions juridiques prises
par le Burkina Faso (B).
A- Le cas du Sénégal
La législation nationale est le pilier pour une bonne
gestion des DBM. Elle permet d'établir un contrôle légal et
confère aux services chargés du traitement de ces dits
déchets, l'autorité de faire respecter les différents
statuts établis.
Ainsi, contrairement à de nombreux Etats de la
sous-région ouest africaine ou nous constatons une « absence totale
» de la réglementation des DBM, le Sénégal n'a pas un
vide juridique total en la matière. Le pays a manifesté
très « tôt » une certaine volonté de lutter
contre ce fléau en s'engageant à travers sa constitution à
« assurer à tout citoyen un droit à la santé et
à un environnement sain »12. Cette volonté s'est
traduite par la prise d'un décret réglementant les DBM. Cette
loi
12. Voir l'art.8 de la constitution sénégalaise de
2001 adopté par référendum et promulgué par la loi
2001-03 du 31 Janvier 2001.
12
détermine désormais la volonté
qu'affichent les autorités sénégalaises à
préserver non seulement la santé de l'homme mais aussi celle de
l'environnement en notant dans le rapport de présentation que « les
déchets générés par les activités de soins
(médicaux et vétérinaires), les activités de
recherche, ainsi que certaines activités industrielles liées aux
produits biomédicaux peuvent entraîner de nombreuses nuisances
pour la santé et l'environnement 13 ». Le décret
n° 20081007 du 18 Août 2008 portant réglementation de la
gestion des déchets biomédicaux fixe entre autre les obligations
des producteurs et opérateurs de DBM ainsi que les activités
liées à la gestion de ces produits. Il comprend cinq titres
à savoir: les dispositions générales, la gestion des
déchets, les obligations des acteurs, les sanctions administratives et
les dispositions finales. Au delà de cette vue superficielle, il est
nécessaire de faire une analyse approfondie pour ainsi ressortir les
forces et les faiblesses de cet décret.
En effet, il faut reconnaître que ce décret a le
mérite d'être simple, précis et claire. L'article 3
définie certaines notions telles que: les déchets
biomédicaux, la collecte, la gestion des DBM, l'élimination de
ces déchets, la gestion écologiquement rationnelle etc. Ce
décret fait également la distinction entre les déchets
ménagers et assimilés et les déchets infectieux, les
déchets anatomiques et les déchets piquants et tranchants, les
déchets pharmaceutiques et les déchets spéciaux. Il s'agit
selon ce décret de la classification des DBM au Sénégal.
Quant à la gestion, elle est réglementée depuis la base
c'est-à-dire au lieu de production sans ignorer le système de
transport et de traitement.
Cependant, ce décret souffre de certaines
insuffisances. Il s'agit tout d'abord des sanctions. On constate que le texte
ne définie pas largement les sanctions administratives. Les sanctions
administratives annoncées par l'art.21 sont très limitées
et vagues. D'ailleurs le texte n'évoque aucune possibilité de
sanctions pénales et ne mentionne également aucune
possibilité de réparation en cas de dommage. Cette loi trouve
également ses limites dans la mise en oeuvre car pour le moment, il
existe un grand fossé entre cette réglementation et les
différentes pratiques. Les acteurs continuent à ignorer
l'existence d'une telle réglementation.
Cela voudrait dire qu'il est tant pour l'Etat
Sénégalais de se doter des mesures d'accompagnement pour
éviter que cette loi ne soit qu'une qu'une simple littérature.
Il faut toute fois noter qu'il existe des cas isolés de
gestion rationnelle des DBM dans certaines villes ouest africaines. Dans les
quatre villes où les études de cas ont été
menées, les seuls exemples de gestion intégrée des DBM par
une structure hospitalière, planifiée du début à la
fin et ayant pour objectif l'élimination totale de la
13. Voir décret No 2008-1007 du 18 Août 2008 portant
réglementation de la gestion des déchets biomédicaux.
13
catégorie comportant des risques, ont été
notés au Centre National Hospitalier Universitaire (CNHU) de Cotonou et
à l'hôpital Principal de Dakar14.
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