CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
Au terme de cette seconde partie, il apparait que le
retrait et la constatation de nullité du titre foncier sont deux
sanctions fréquentes d'anéantissement du titre foncier. Ce titre
de propriété dont l'absolutisme devrait être indiscutable
voit sa force probante relativisée par l'article 2 du décret de
2005 précité. Cette atteinte est justifiée par des
facteurs tels que la corruption et la mal gouvernance. D'autres facteurs
accessoires tels que l'ignorance de la loi par les particuliers, et les
intentions malveillantes de certains agents et promoteurs immobiliers sont
à ne pas négliger. Dans l'optique de réduire le nombre de
procès perdus par l'Etat avec les conséquences financières
que cela implique, nous avons fait quelques propositions de solutions. Ces
dernières vont du renforcement des mesures de lutte contre la corruption
jusqu'aux conseils pratiques de méfiance et précautions à
prendre par les particuliers en passant par des mesures nouvelles à
l'attention de l'administration. Ces mesures protègent à la fois
le titre foncier et son propriétaire, et aussi tous les acteurs de la
transaction foncière.
CONCLUSION GENERALE
En définitive, il ne fait aucun doute que
l'administration fait office de «juge» des litiges fonciers au
Cameroun en générale et plus particulièrement de ceux
relatifs au retrait et la constatation de nullité du titre foncier. Le
chef du département ministériel en charge des affaires
foncières a vu ses pouvoirs accrus par la réforme de 2005/481. La
nullité des titres fonciers doit désormais être
constatée par arrêté du ministre qui produit presque les
mêmes effets que celui du retrait. Les deux sanctions ne se distinguent
donc que dans leurs cas d'ouverture. La faute de l'administration et la fraude
du bénéficiaire pour l'une, et l'arbitraire et l'immatriculation
des dépendances du domaine de l'Etat pour l'autre. Mais pour une bonne
compréhension par le lecteur, nous avons présenté dans un
chapitre préliminaire la procédure d'obtention du titre foncier
telle que voulu par le législateur de 1974. Ce mémoire est
destiné à éclairer à la fois les professionnels du
foncier et les profanes qui se font berner fréquemment par des agents
immobiliers malhonnêtes et des prédateurs fonciers. C'est pourquoi
nous insistons à titre d'information pour les uns et de rappel pour les
autres, sur la consistance des domaines de l'Etat, afin que nul ne l'en ignore
et s'en prévale de sa propre turpitude. Car, comme le dit si bien un
adage « nul n'est sensé ignorer la loi ».
Nous avons remarqué durant notre stage
académique que le contentieux de mise en cause du titre foncier est le
plus actuel à la division des affaires juridiques. Les sanctions contre
l'acte sont prononcées d'une façon très fréquente.
À l'analyse, il en ressort que, dans la mise en oeuvre de ses
compétences dans ce sens, le MINDCAF cherche à atteindre les
objectifs visés par le législateur foncier. À savoir,
sanctionner la faute de l'administration et la fraude du
bénéficiaire d'une part, et protéger les domaines de
l'Etat d'autres parts. Tout ceci en respectant les règles de justice et
d'égalité. Mais nous avons vite fait de remarquer quelques faits
ca et la, pouvant entraver l'exercice juste et efficace des compétences
juridictionnelles du ministre en la matière. Certains sont dus à
la technicité de la notion de « double
immatriculation » ou à celle de « même
terrain », d'autres sont rattachés aux intentions
malveillantes de certains bénéficiaires déterminés
à induire l'administration en erreur.
Sur le terrain, il s'avère que la mise en oeuvre
pratique des pouvoirs discrétionnaires du MINDCAF dans le
prononcé de ces sanctions vise un objectif de politique social et de
développement économique. De ce fait, la décision du
ministre en charge des affaires foncières vise à restaurer la
justice et l'égalité entre les citoyens, et joue un rôle de
protecteur des domaines de l'Etat contre toutes atteintes.
D'autres parts, nous remarquons un écart entre
la pratique et les textes. Cet écart est dû à
l'amoralité des citoyens, à l'ignorance de la loi, à la
corruption, l'impunité, à la disparité des textes
législatifs et l'incivisme. A tout ceci nous pouvons ajouter la mal
gouvernance qui se traduit par l'insuffisance du matériel de travail des
services en charge de la procédure d'obtention du titre foncier et
l'improportionalité entre le travail abattu par les agents de cette
administration et leur traitement. Nous y avons proposé des solutions
sans doute efficaces qui ne demandent qu'à être prises en
considération.
Il ne fait l'ombre d'aucun doute que l'administration a
une ferme intention de réigner en maitre et sans partage dans le
contentieux de mise en cause du titre foncier. Elle est à la fois juge
et partie dans ce précontentieux. Cette atteinte au principe de la
séparation des pouvoirs serait une aussi une atteinte grave au droit de
la propriété immobilière dans notre pays. Mais à
l'analyse, on comprend que, par la règle du recours gracieux
préalable, par la compétence du juge administratif et la
création des tribunaux administratifs et les divisions des affaires
juridiques régionale, que cette procédure est belle et bien
distincte de la procédure judiciaire. Loin d'être la manifestation
d'une intention d'évincer le juge administratif, cette procédure
sera avec le temps, purement administrative. Elle ne réduit en rien les
compétences du juge administratif en matière
d'appréciation de la légalité et d'annulation des actes
administratifs.
Le débat n'est donc pas dans la guerre des
compétences entre le MINDCAF et la justice administrative. Le plus
important reste d'adopter les mesures nouvelles que nous proposons dans ce
travail, afin de redonner au titre foncier toute sa crédibilité.
La grande réforme foncière en cours, lancée par madame le
ministre en charge des affaires foncières est porteuse d'un grand enjeux
dans l'avenir du titre foncier au Cameroun. Nous estimons que ce mémoire
pourra y apporter un sang nouveau. Pas seulement dans le cadre juridique, mais
dans un sens beaucoup plus large. Car, en vérité, l'ampleur des
litiges fonciers dans notre pays est plus un problème d'hommes et de
mentalités qu'un problème d'insuffisance de textes en la
matière.
|