Le retrait et la nullité du titre foncier au ministère des domaines, du cadastre, et des affaires foncières (mindcaf).par Ibrahim Moktar POUKO MEKOU Université de Dschang Cameroun - Master II Professionnel en Droit et Techniques Fonciers et Domaniaux 2014 |
B - La fraude du bénéficiaire : l'immatriculation frauduleuseElle est évoquée par l'article 2 alinéa 5 du décret de 2005 précité. « Le retrait du titre foncier prévu à l'alinéa 3 du présent article ne peut, sauf cas de fraude du bénéficiaire, intervenir que dans le délai du recours contentieux » La fraude désigne toute espèce de turpitude. C'est la volonté chez son auteur de détourner certaines dispositions légales pour nuire à autrui. La fraude se manifeste chaque fois que le sujet de droit parvient à se soustraire à l'exécution d'une règle obligatoire par l'emploi à dessein d'un moyen efficace. La chambre administrative de la cour suprême a décidé qu'il y a fraude par : - l'adjonction du nom d'un tiers, étranger à la procédure d'immatriculation, et la délivrance en son nom, du duplicatum du titre foncier, en lieu et place du véritable demandeur46(*) - le fait pour le gérant d'une société commerciale de faire immatriculer en son nom, un terrain acquis par ladite société47(*) - le fait pour un mandataire, portant le même patronyme que son mandant, de faire immatriculer un terrain en son nom48(*). Nous pouvons ajouter à ce qui précède la falsification des pièces du dossier, l'usage des tromperies diverses en vu d'induire l'administration en erreur, le fait d'user des mises en valeur d'autrui à son insu sans droit ni titre... * 46 CS/CA jugement no 41 du 28/6/89, Atéba Barthélémy c. État du Cameroun : « (...) Qu'alors qu'il attendait l'aboutissement de son dossier régulièrement introduit et auquel aucune opposition ne lui avait été signalée, il devait apprendre début juillet 1987 que celui-ci avait donné lieu à l'établissement du titre foncier no 15494/MF du 23 avril 1985, lequel avait été délivré à un certain Ndeme Sanama Jean Pierre. Que s'informant sur la manière dont le nom de Ndeme Sanama Jean Pierre avait pu être porté sur le TF de son terrain, il devait apprendre que, lors de l'établissement du plan de l'immeuble, le 21 juillet 1984, dont il obtenait par ailleurs copie, le fonctionnaire du cadastre, usant de fraude, avait mentionné, au contraire du PV de bornage versé au dossier, que ledit bornage était effectué au profit de Ateba Barthélemy et de Ndeme Sanama Jean Pierre; attendu que, c'est sur la seule base de cette mention que le titre foncier en cause avait été dressé aux noms de Ateba Barthélemy et Ndeme Sanama Jean Pierre, puis délivré à ce dernier qui n'avait aucun droit et dont par ailleurs le nom n'aurait dû venir en seconde position, alors que l'article 38 alinéa 3 du décret no 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier dispose (...) ». * 47 CS/CA jugement no 61 du 27/3/97, Société Africaine commerciale de Diffusion c. État du Cameroun : « attendu en l'espèce, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal en date du 4 juillet 1981, du sous-préfet de Douala VIe, constatant la remise des tôles aux détenteurs coutumiers du terrain litigieux et des copies de chèques émis au notaire instrumentaire, Maître Ebongue Akwa, que ledit terrain a été acheté par la Société Afcodi, et non personnellement par son gérant, Hernandez; qu'ainsi, c'est par fraude commise avec la complicité de l'officier public instrumentaire que le titre foncier a été délivré audit gérant. » * 48 CS/CA jugement no 74 du 28/9/2000, succession Ndefo Mbewou c. État du Cameroun : « (...)attendu que les 13 enfants de feu Ndefo Mbewou ont été privés de leur immeuble par des manoeuvres frauduleuses de sieur Mbouobouo qui lui ont permis de tromper la vigilance de l'Administration des domaines et le faire établir un titre foncier en son nom sur près de 4 hectares de terrains appartenant à la succession Ndefo Mbewou; attendu qu'en faisant établir ledit titre foncier, le sieur Mbouobouo a, à l'insu des héritiers du feu Mbewou, fait figurer les noms et signatures de ces derniers sur le procès-verbal de bornage comme étant les riverains, alors qu'il s'agit du terrain de leur feu père (...) » Le juge a donc annulé ledit titre foncier, motif pris de ce que le sieur Mbouobouo ce dernier a usé de manoeuvre frauduleuse pour tromper la vigilance de l'administration, l'amenant ainsi a commettre une faute en établissant ledit titre à son nom. CS/CA jugement no 1 du 26/11/98, Zibi Zanga Jean c. État du Cameroun. En l'espèce, le requérant, illettré, détenteur d'un terrain coutumier, avait mandaté son cousin, Zibi Edima Jean, d'engager la procédure d'immatriculation de son terrain. Mais celui-ci détourna la procédure d'obtention du titre foncier à son profit. |
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