VI. La résistance aux glycopeptides :
VI.1 Généralités sur les
entérocoques résistants aux
glycopeptides :
Les entérocoques sont responsables d'infections humaines,
principalement dues à
Enterococcus faecalis (80 % à 90 % des cas) et
à Enterococcus faecium (5 à 10 % des cas) tandis que les
autres espèces occasionnellement retrouvées sont
Enterococcus
Chapitre III : la résistance aux antibiotiques
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Les bactéries hautement résistantes
émergentes
gallinarum, Enterococcus casseliflavus, Enterococcus
durans, Enterococcus avium et Enterococcus hirae
[109].
Les entérocoques sont des bactéries
considérées comme peu virulentes, leur multi-résistance
aux antibiotiques représente le principal problème en pratique
clinique ; c'est particulièrement vrai lors des infections dues à
E. faecium, souvent résistant à toutes les
bêta-lactamines [110]. La famille des glycopeptides
(vancomycine, teicoplanine) constitue une option thérapeutique de choix
pour le traitement des infections dues à ces germes
[111].
Les entérocoques sont naturellement sensibles à
la vancomycine (CMI1 modale de 1 mg/l) et à la teicoplanine
(CMI modale de 0,5 mg/l), si on excepte les deux espèces
naturellement
résistantes à la vancomycine, E. gallinarum
et E. casseliflavus [111]. Les premières
souches d'entérocoques résistantes aux glycopeptides (ERG) ont
été décrites à la fin des années 1980 en
France et en Angleterre. Depuis, ces souches ont largement diffusé,
notamment aux États-Unis où elles représentent un
important problème de santé publique [112].
VI.2 Mécanismes de résistance aux
glycopeptides :
La résistance aux glycopeptides est due à la
production de précurseurs de la paroi modifiés (terminés
par D-alanyl-D-lactate ou D-alanyl-D-sérine) et à
l'élimination des précurseurs naturels de haute affinité
(terminés par D-Ala-D-Ala) [113]. Cette modification de
cible résulte de la coopération de plusieurs gènes
organisés en opéron codant pour l'ensemble des enzymes
nécessaires à la reprogrammation du peptidoglycane
[113,114]. Le changement porte sur l'extrémité
du précurseur et fait disparaître une liaison hydrogène
essentielle. Ainsi l'affinité de la vancomycine pour les
précurseurs terminés par D-Ala-D-Lac devient elle mille fois
moins élevée que celle pour les précurseurs sauvages
(terminés en D-Ala-D-Ala) [115].
Neuf types de résistance aux glycopeptides ont
été décrits à ce jour, sur des critères
phénotypiques et génotypiques [116, 117, 118].
Huit correspondent à un mécanisme de résistance acquise
(VanA, VanB, VanD, VanE, VanG, VanL, VanM et VanN) tandis qu'un seul est une
caractéristique intrinsèque d'espèce (VanC chez E.
gallinarum et E. casseliflavus)[110, 113] Les
types VanA et VanB sont les phénotypes les plus fréquemment
retrouvés chez les entérocoques (surtout E. faecium)
alors que seul VanA a diffusé chez une dizaine de souches de S.
aureus rapportées aux États-Unis [113].
Les souches VanA sont
Les bactéries hautement résistantes
émergentes
hautement résistantes à la vancomycine et
à la teicoplanine de façon inductible alors que les souches VanB
présentent des niveaux variables de résistance uniquement
à la vancomycine, seule inductrice [113].
L'opéron VanA est classiquement porté
par un transposon (élément génétique mobile) de
type Tn3 (Tn1546) et comprend cinq gènes impliqués dans
la résistance aux glycopeptides (vanHAXYZ) et deux gènes
de régulation (vanRS) [114]. Le gène
vanH code pour une déshydrogénase qui réduit le
pyruvate en D-Lac et fournit un substrat pour la ligase codée par le
gène vanA qui catalyse la formation d'un
depsipeptide2 D-Ala-D-Lac. Après diverses étapes, ce
depsipeptide est finalement incorporé au peptidoglycane en cours
d'élongation. Cependant, la résistance ne peut s'exprimer puisque
la synthèse bactérienne de précurseurs sauvages persiste
et qu'il suffit qu'un petit nombre gagne la surface de la bactérie pour
que la vancomycine s'y fixe et interrompe la synthèse de la paroi.
L'élimination de ces précurseurs « sensibles » est la
tâche du gène vanX qui code pour une D,D-dipeptidase, qui
hydrolyse le dipeptide D-Ala-D-Ala formé par la ligase naturelle Ddl, et
du gène vanY qui code pour une D,D-carboxypeptidase qui
élimine le D-Ala terminal des précurseurs en cas
d'élimination incomplète du D-Ala-D-Ala par vanX. Enfin,
l'expression de l'opéron vanA est contrôlée par un
système de régulation à deux composants, un activateur
transcriptionnel et un capteur histidine-kinase, codés respectivement
par les gènes vanR et vanS [114].
Notons qu'il existe des souches résistantes (VanA ou
VanB) qui sont dites dépendantes à la vancomycine ou à la
teicoplanine (« toxicomanes ») car elles requièrent la
présence de l'antibiotique pour leur croissance. Ceci est lié
à la présence de mutations dans le gène ddl
rendant la ligase naturelle non fonctionnelle. Ces souches
dépendent donc entièrement de l'opéron de
résistance exprimé après induction pour la synthèse
de peptidoglycane [116, 114].
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Partie
Pratique
Matériel et
méthodes
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