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Les limites du ministère public dans son pouvoir d'arrestation et de détention. La responsabilité civile et pénale du ministère public.


par Preme CIRHUZA MUSHAGALUSA
Université officielle de Bukavu - Graduat en droit 2019
  

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Section 2 : INTERVENTION DE L'AUTORITE HIERARCHIQUE DU MINISTERE PUBLIC POUR FAIRE CESSER LES ARRESTATIONS ET DETENTIONS ILLEGALES PRATIQUEES PAR LES SUBALTERNES OU PAR LES PARTICULIERS

Pour les arrestations et détentions arbitraires pratiquées par les simples particuliers, les APJ, les OPJ et les OMP, les autorités hiérarchiques du ministère public peuvent intervenir pour remettre les victimes en liberté, toutes les fois qu'elles en ont eu connaissance (soit par plainte de la victime ou de son conseil, par dénonciation d'un activiste de droit de l'homme ou de toute personne intéressée ou par constat personnel, etc.).

En effet, les chefs d'office de parquets qui dirigent et coordonnent l'action publique sont mieux placés pour une telle intervention par le fait que, d'une part, le ministère est unique et qu'il fortement hiérarchisé; et que d'autre part, celui-ci est aussi chargé de maintenir l'ordre public.

En tant qu'un corps unique et fortement hiérarchisé, tous les OMP sont tenus de faire de rapports motivés (de MAP ou relaxation) à leur après interrogatoire de l'inculpé. Les OPJ en font de même à l'OMP le plus proche. Dans ces conditions, lorsque le chef d'office d'un parquet est informé (par n'importe quelle voie) qu'un OMP ou un OPJ de son ressort a arrêté ou détenu un individu illégalement, il a la responsabilité d'intervenir et de faire cesser pareille situation. C'est notamment pour cette raison que la loi prévoit l'inspection des Amigos par le chef d'office des parquets ou par les Officiers du ministère public. Les officiers du Ministère public procèdent régulièrement et à tout moment à la visite des locaux de garde à vue. Ils s'assurent de leur salubrité et des conditions matérielles et morales des personnes qui y sont maintenues. Ils se font communiquer les procès-verbaux établis à l'encontre de ces personnes et recueillent leurs

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doléances éventuelles. Ils dressent procès-verbal de toute contravention à la loi ou aux dispositions de la présente ordonnance. Ils peuvent, lorsque la garde à vue leur paraît injustifiée, ordonner que la personne gardée à vue soit laissée libre de se retirer. Les officiers de police judiciaire sont tenus d'obtempérer à leurs ordres et doivent tenir constamment à leur disposition les procès-verbaux des personnes gardées à vue12.

Par ailleurs dans son pouvoir de rétablir l'ordre public, l'autorité du ministère public informée d'une arrestation ou une détention illégale grossièrement pratiquée par ses subalternes et surtout par les simples particuliers peut directement procéder à l'arrestation et à la poursuite de l'auteur ainsi qu'à faire libérer lui-même, la victime de cette arrestation ou de cette détention illégale.

Dans la même logique, un inculpé en état de détention préventive peut solliciter et obtenir du ministère public la main levée de la détention ou la liberté provisoire aussi longtemps que son dossier n'est pas encore fixé devant la juridiction de jugement. A cet effet l'article 33 du code de procédure pénale édicte que « aussi longtemps qu'il n'a pas saisi la juridiction de jugement, l'Officier du Ministère Public peut accorder à l'inculpé mainlevée de la détention préventive et ordonner la restitution du cautionnement. Il peut aussi lui accorder la mise en liberté provisoire, dans les mêmes conditions et sous les mêmes modalités que le juge peut lui-même le faire ». L'article 44 du même code ajoute que « lorsque le Ministère public décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre, il doit donner en même temps mainlevée de la mise en détention préventive et, éventuellement, ordonner la restitution du cautionnement ». Si elles peuvent permettre à l'officier du ministère de mettre fin à une détention arbitraire d'un inculpé, ces dispositions sont pourtant critiquables.

En effet, les dispositions des articles 33 et 44 du code de procédure pénale ci-haut citées, suscitent plusieurs interrogations scientifiques:

Comment l'officier du ministère public peut-il lever la détention préventive qu'il n'a pas décidée ? Pour faire placer l'inculpé en cet état il a dû, conformément aux articles 28 à 29 du

12 L'art. 80 L'ordonnance n° 78-289 du 3 juillet 1978 relative à l'exercice des attributions d'officier et agents de police judiciaire près les juridictions de droit commun.

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même code, recourir au pouvoir du juge de détention ; comment pour lever ou aménager cette détention par la liberté provisoire, l'Officier du Ministère Public peut-il y aller de sa seule autorité ? Ne serait-ce pas là une violation de la logique juridique du parallélisme de forme et de compétence ?

Conformément à l'article 28 du code de procédure pénale congolais, le ministère public ne place un inculpé sous les liens d'un mandat d'amener que sous prétexte qu'il y aurait une infraction et indices sérieux de culpabilité qui justifie la détention préventive et à charge pour lui de le faire conduire devant le juge compétent le plus proche, pour statuer sur la détention préventive. N'y aurait-il pas contradiction et violation de cette loi si le même officier du ministère public se mettait à lever la détention avant de saisir le juge même ? Dans la mesure où le ministère public est partie procès de la détention et de liberté provisoire, ce serait faire de lui, juge et partie en lui reconnaissant les mêmes pouvoirs que le juge. Ce qui risque d'exposer l'inculpé à l'arbitraire du ministère public qui pourrait arrêter et détenir dans le seul but d'accorder par après, la main levée de la détention ou la liberté provisoire moyennant l'argent.

Ainsi pensons-nous, que pour des raisons de bonne justice et de garantie du droit fondamental à ne pas être arrêté et détenu arbitrairement, il faudrait que la législation à venir ôte aux officiers du ministère public le pouvoir d'octroyer aux inculpés la main levée de la détention et la liberté provisoire. Ceux-ci doivent arrêter aux fins de conduire les concernés devant le juge qui doit être seul compétent pour apprécier l'opportunité d'accorder la remise en liberté pure et simple, la main levée de la détention ou la liberté provisoire. L'Officier du Ministère Public qui reçoit les inculpés en état d'arrestation opérer par ses subordonnés (APJ, OPJ) et qui estimerait que les conditions de détention préventive ne sont pas réunies ou que l'inculpé ne saurait fuir et entraver la bonne marche de la justice, doit simplement le relaxer (ou le remettre en liberté). S'il arrête l'inculpé, la saisine du juge détention devient obligatoire. Et ce dernier doit rendre son pouvoir effectif et ne pas être complaisant tant pour la remise en liberté pure et simple, la main levée de la détention que pour la liberté provisoire.

Enfin, l'article 33 du code de procédure pénale qui accorde à l'officier du ministère public le pouvoir d'accorder aux inculpés, la main levée de la détention préventive et la liberté provisoire, soulève également la question de savoir si cela est faisable à l'égard des inculpés sous

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mandat d'arrêt provisoire (MAP) ? Nous pensons que ceux-ci ne peuvent bénéficier ni de la main levée ni de la liberté provisoire, puisque le mandat d'arrêt provisoire n'opère pas techniquement parlant la détention préventive. Celle-ci ne peut être ordonnée que le juge compétent. Il va de soi qu'on ne peut pas lever une détention qui n'existe pas encore. C'est la raison pourquoi, le législateur du code pénal, à l'art 28 dernier alinéa du CPP, parle de la mise en liberté lorsqu'il est question de mettre fin à l'arrestation d'un inculpé sous mandat d'arrêt provisoire qui a expiré, et non de la main levée de la détention préventive parce que celle-ci n'existe pas encore.

De même qu'à l'article 32 du CPP, lorsqu'il est question pour le juge d'accorder à un inculpé qui la sollicite, la liberté provisoire, il est tenu de le placé d'abord en état de détention préventive. Un inculpé en liberté provisoire est technique en état détention préventive laquelle peut être rendue effective à tout moment si l'inculpé manque aux devoir qui lui sont imposés par le juge. L'article 32 précité édicte bien que « tout en autorisant la mise en état de détention préventive ou en la prorogeant, le juge peut, si l'inculpé le demande, ordonner qu'il sera néanmoins mis en liberté provisoire ...».

Par ailleurs, lorsqu'après avoir placé un inculpé en détention préventive et qu'ultérieurement (lors de la demande de prolongation), le juge se rend compte que les conditions de mise en état de détention préventive n'existent pas ou n'existent plus, dans ce cas seulement, le juge peut ordonner la main levée de la détention préventive précédemment décidée.

C'est à tort et en violation de la loi que les officiers du ministère public (et certains Officiers de la police judiciaire) discutent et accordent la liberté provisoire aux inculpés qui sont simplement en état d'arrestation avec devoir de les faire placés en détention préventive par ordonnance du juge compétent.

Il ressort de ce qui vient d'être dit que les pouvoirs du ministère public d'accorder main levée des détentions préventives et les libertés provisoires ne peuvent s'exercer que lorsque les inculpés ont été déjà placés en état de détention préventive par le juge compétent. La législation avenir devrait tout simplement abroger pareille disposition pour reconnaître ces pouvoirs aux seuls juges de détention préventive, parce que l'exercice de ce pouvoir par les OMP peut donner

13 ANTOINE RUBBENS, Le Droit judiciaire congolais : l'instruction criminelle et la procédure pénale, Kin, PUC, 2010, p. 72.

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lieu à l'arbitraire et aux arrestations à but lucratif ainsi qu'à la diminution du pouvoir du juge de détention, comme on l'observe aujourd'hui.

Hormis les cas de main levée et de liberté provisoire, nous pensons que l'intervention de l'officier du ministère public pour faire relaxer les personnes arbitrairement arrêtées par ses subalternes ou par les particuliers, est très nécessaire et doit, pour l'avenir, être ériger en un droit pour les victimes.

A l'état actuel de notre droit, cette intervention n'est pas obligatoire pour l'officier du ministère public. En effet, l'autorité hiérarchique du ministère public peut se décider de ne pas intervenir en prétendant se remettre au cheminement logique de la procédure pénale et cautionner ainsi l'arrestation ou la détention opérée par son subalterne. Aussi, cette autorité peut être éloignée du lieu de l'arrestation ou de la détention à faire cesser. Enfin, aucune disposition spécifique de la loi n'oblige cette autorité à faire cette intervention en vue de faire cesser une arrestation ou détention illégale actuelle. Il y a là une insuffisance qui ne garantit pas aux victimes des arrestations et détentions illégales, un recours sûr en vers l'autorité hiérarchique du ministère public.

Ainsi suggérons-nous que la législation avenir oblige chaque autorité du ministère public informée d'une arrestation ou détention illégale opérée par un subalterne ou par un particulier, de faire cesser rapidement pareille situation.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard