De la portée du pouvoir fiscal des provinces en RDC. Etude à la lumière de la province du sud-Kivu.par CITERA Christian Université officielle de Bukavu - Licence en droit 2019 |
CHAPITRE II. DE LA PROVINCE DU SUD-KIVU FACE A L'INCERTITUDE DU POUVOIR FISCALAprès que nous ayons abordé le premier chapitre qui a traité du pouvoir fiscal des provinces en RDC, il s'en sort aisément que le pouvoir fiscal des provinces n'est pas clairement établi en ce sens que certaines dispositions consacrent un tel pouvoir à l'égard des provinces et d'autres s'y opposent. Cela dit, dans ce deuxième chapitre, nous tâcherons, vu l'incertitude autour de cette question, de faire une analyse tendant à savoir quelle pourrait être la position des provinces en général et particulièrement celle du Sud-Kivu (Section I). Ainsi, nous tenterons de proposer plus tard quelques pistes de solutions au regard de cette incertitude du pouvoir fiscal des provinces (Section II). Section I. De la mise en oeuvre du pouvoir fiscal par la province du Sud-KivuComme nous l'avons dit ci-haut, il a été question dans le chapitre précédent de montrer que certaines dispositions constitutionnelles et législatives tendent à reconnaitre aux provinces le pouvoir fiscal, en d'autres mots, le pouvoir d'établir les impôts, taxes, droits et d'en fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts. En effet, il ressort de certaines dispositions constitutionnelles et législatives que l'établissement de l'impôt, taxe et droit est de la compétence exclusive de la loi (§1). Toutefois, la Constitution dénote que le Parlement dans ses matières exclusives peut habiliter une Assemblée provinciale à prendre un édit dans les matières qui sont de la compétence exclusive du Parlement. C'est ainsi que le cinquième alinéa de l'article 9 de la loi sur les finances publiques de 2011 sous examen renchérit que le Parlement peut habiliter l'organe délibérant de la province par le truchement de l'édit budgétaire à fixer le taux de certains impôts, taxes ainsi que les droits provinciaux et/ou les modalités de recouvrement de certains impôts, taxes et droits provinciaux (§2). 24 | P a g e §1. De la mise en oeuvre du régime applicable en matière d'établissement de l'impôt et taxeNous avons démontré au cours du premier chapitre que la création de l'impôt et de la taxe relève de la compétence exclusive du législateur national et qu'à ce titre, la province ne dispose donc d'aucun pouvoir en matière de création d'impôt ou taxe. En revanche, il s'observe dans la pratique que ce postulat a été tempéré par l'Arrêté n°18/004 de Janvier 2018 du gouvernement provincial du Sud-Kivu qui a institué la taxe sur la reconstruction de la province. Notons tout de même qu'un tel tempérament n'est pas une innovation de la seule province du Sud-Kivu d'autant plus que, peu avant celle-ci, l'Assemblée provinciale de l'ancienne province du Katanga avait pris deux édits dans ce sens, à savoir l'Edit n°001 du 23 Mai 2008 portant création de la taxe provinciale d'intervention en matière de réhabilitation des infrastructures urbaines de voirie et drainage ainsi que des routes d'intérêt provincial et l'Edit n°001 du 20 Avril 2010 portant création de la taxe provinciale sur les produits miniers concentrés destinés à l'exportation67. La création de la taxe sur la reconstruction de la province par la province du Sud-Kivu au regard des textes déterminants la compétence en matière du pouvoir fiscal pose problème. Il nous pousse donc d'examiner le champ d'application de l'Arrêté créant la taxe sur la reconstruction de la province (A) et de son fondement ainsi que de sa validité en droit (B). A. Du champ d'application de l'Arrêté n°18/004 de Janvier 2018Dans l'Arrêté n°18/004 de Janvier 2018, un des articles dispose que la taxe sur la reconstruction de la province est due par les passagers, au moment de l'embarcation ou de débarquement par le biais de certains moyens de transport affrétés par ces derniers tels que le bus, les voitures-taxis interurbains, les taxis-motos, les gros bateaux et les canons68. Cet Arrêté prévoit ensuite que le taux de ladite taxe se distingue en fonction de moyen de transport utilisé par les passagers. Ainsi, sur pied du texte précité, il est fait obligation aux passagers par exemple qui affrètent le bus comme moyen de transport de payer sept cent 67 Ces deux Edits sont à retrouver dans l'annexe du rapport de l'Action contre l'Impunité pour les Droits Humains, les Revenus des taxes provinciales du secteur minier 10 ans après quel impact ?, Disponible en Pdf sur https://www.congomines.org/system/attachements/assets/000/001/original/les-revenus-des-taxes provinciales_ACIDH_IBGDH.pdf?1535986991, Consulté le 15 Mai 2019 vers 01 heure. 68 Les commentaires de cet Arrêté sont à retrouver sur https://www.laprunellerdc.info/2018/10/24/taxe-sur-passager-au-su-kivu-nyamugabo-ne-desarme-pas. 25 | P a g e cinquante francs congolais, mille francs congolais pour les voitures-taxis interurbains, huit cent francs congolais pour les gros bateaux, cinq cent francs congolais pour les canons et mille six cent francs congolais pour les taxis-motos69. De même, l'Arrêté a quo prescrit que la taxe sur la reconstruction de la province, mieux, la taxe sur les passagers est perçue et recouvrée par la DPMER70. En effet, le gouvernement provincial du Sud-Kivu avait décidé de confier la perception et le recouvrement de cette taxe à une entreprise privée au nom du partenariat public-privé au début du mois d'octobre 201871. Par ailleurs, au cours du même mois, la province a confié de nouveau cette tâche à la Direction Générale des Migrations au niveau des frontières de la province du Sud-Kivu72. |
|