1- Les raisons justifiants la nullité
Elles sont à l'origine de l'annulation de la mise en
demeure. Elles sont réglementés par l'Acte Uniforme et concernent
la validité de lacte même. Quoi qu'il en soit, la
nullité dont il est question sanctionne la violation des règles
de fond et celles de forme.
S'agissant des règles de fond, aux termes de l'article
133 alinéa 2 il ressort clairement que: « À peine de
nullité, la mise en demeure doit indiquer la ou les clauses et
conditions du bail non respectées et informer le destinataire
qu'à défaut de s'exécuter dans un délai d'un mois
à compter de sa réception, la juridiction compétente
statuant à bref délai est saisie aux fins de résiliation
du bail et d'expulsion, le cas échéant, du preneur et de tout
occupant de son chef ». Selon l'article 133 alinéa 2 de l'Acte
uniforme susvisé, la validité de la mise en demeure est
subordonnée au respect de ces deux conditions cumulatives. Il faut
d'emblée relever que l'exigence classique de la reproduction des
dispositions de l'article 101 de l'Acte uniforme sur le droit commercial
général, n'a pas survécu à la réforme. A la
place, l'article 133 du nouvel Acte uniforme a prévu l'obligation pour
le demandeur en résiliation du bail d'indiquer dans la mise en demeure
la ou les clauses et conditions du bail non respectées. Quoi qu'il en
soit, l'obligation d'indication dans la mise en demeure des conditions du bail
violées et d'information du destinataire qu'en cas d'inexécution
dans un délai d'un mois à compter de sa réception le juge
sera saisi d'une action en résiliation, est prescrite « à
peine de nullité » de la mise en demeure. Sous l'empire des textes
antérieures, la jurisprudence des tribunaux sénégalais
n'était pas fixée sur la sanction du non-respect de l'obligation
de reproduction dans la mise en demeure des dispositions de l'article 101
(devenu 133) de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial
général. Le tribunal régional de Kaolack
(Sénégal) a été saisi d'une action en
résiliation d'un bail commercial initiée par une personne qui
n'avait pas respecté l'obligation de reproduction de ce texte. Le
tribunal dans son jugement du 14 août 2002 a énoncé que :
« l'article 101 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial
général dispose que la mise en demeure doit reproduire sous peine
de nullité les termes du présent article ; Que ladite
prescription n'ayant pas été observée, il y a lieu de
constater la nullité de la procédure ». Plus loin, Un
jugement du tribunal de première Instance de Bafoussam du 16 septembre
2005 a bien campé ce débat en énonçant que : «
la mise en demeure préalable avec reproduction sous peine de
nullité des termes ( de l'article 101 (devenu 133) de l'AUDCG) est une
condition indispensable à toute résiliation d'un bail
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La mise en demeure en matière de rupture du bail
à usage professionnel en Droit de
l'Ohada
commercial , · Mais attendu qu'en l'espèce,
la sommation de payer et de libérer du 17 Mars 2003 servie au
défendeur et tenant lieu de dite mise en demeure ne satisfait pas aux
exigences légales prescrites par l'article susvisé en ce qu'elle
ne reproduit aucunement les termes de ce texte , · Qu'il échait
par conséquent de déclarer cette sommation nulle et partant
irrecevable en l'état l'action de la demanderesse ».
Par ailleurs, l'on peut à bon droit étendre la
question en cas de non-respect du délai légal d'un mois
prévu au même article 133 suscité. La mise en demeure qui
comporte la reproduction intégrale de l'article 133 et la mention selon
laquelle le preneur « dispose du délai d'un mois à compter
de la signification des présentes, pour honorer les termes du contrat de
bail et du présent acte, faute de quoi, il sera procédé
judiciairement » est valable. Le moyen selon lequel si les termes dudit
article sont reproduits dans la mise en demeure, nulle part n'y figure
l'information au preneur qu'à défaut de paiement ou de respect
des clauses et conditions du bail dans un délai d'un mois, la
résiliation sera poursuivie alors que cette mention est prescrite
à peine de nullité doit être rejetée142.
Ainsi, à l'image de l'absence de mise en demeure, le non-respect du
délai d'un mois prévu par l'alinéa 2 de l'article 133 de
l'Acte uniforme sur le droit commercial, doit être sanctionné par
la nullité. En effet, l'action en résiliation initiée
avant l'expiration du délai d'un mois à compter de la
réception de la mise en demeure est
prématurée143.
S'agissant ensuite des règles de forme, l'article 133
alinéa 1 dispose que : «La demande en justice aux fins de
résiliation du bail doit être précédée d'une
mise en demeure d'avoir à respecter la ou les clauses ou conditions
violées. La mise en demeure est faite par acte d'huissier ou
notifiée par tout moyen permettant d'établir sa réception
effective par le destinataire ». Dans la procédure de
résiliation du bail à usage professionnel, le formalisme de la
mise en demeure constitue un élément déterminant pour
l'information de la partie défaillante par rapport au manquement
à ses obligations contractuelles. L'exécution effective de cette
obligation d'information est donc tributaire de la forme que doit revêtir
l'acte. Sous l'ancienne version de l'Acte Uniforme de 1997, « la mise en
demeure ne pouvait être délivrée
142 CCJA, 3e ch., n° 60/2012, 7-6- 2012 ; P.
n° 077/2009/PC du 24-8- 2009 : Sté Camerounaise de Divertissements
et de Commerce (SOCADIC) c/ KADJI DEFOSSO Joseph).Obs. J. Issa- Sayegh
143Le droit d'agir n'existe pas encore, et par
là l'action peut aussi être frappée
d'irrecevabilité. Cette exigence formelle était
déjà contenue dans l'ancien article 101 de l'Acte uniforme
portant sur le droit commercial général. Mais, la
particularité du nouvel Acte uniforme réside dans la
précision du point de départ du délai d'un mois
prévu par la loi, ce délai courant à compter de la
réception de la mise en demeure.
La mise en demeure en matière de rupture du bail
à usage professionnel en Droit de
l'Ohada
que par acte extrajudiciaire
»144. C'est d'ailleurs la position qu'a pris
la jurisprudence qui sanctionnait le non-respect de cette formalité. Il
était d'ailleurs difficile pour les parties de toujours se plier
à cette formalité qui était jugée de houleuse pour
la procédure. La lourdeur de ce procédé ainsi que son
caractère dispendieux ont incité les rédacteurs du nouvel
Acte uniforme à simplifier la forme de la mise en demeure, sans pour
autant répudier le recours à un officier ministériel. Il
résulte de l'alinéa 2 de l'article 133 de l'Acte uniforme
précité : « la mise en demeure est faite par acte d'huissier
ou notifiée par tout moyen permettant d'établir sa
réception effective par le destinataire ». C'est dire que tout acte
qui ne recouvre pas une forme susceptible de laisser une preuve, devrait donc
être annulée. Il en est par exemple des mises en demeure faites
sous forme non-écrite.
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