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La mise en demeure en matière de résiliation du bail à  usage professionnel.


par Ted-Rousseau KENNANG GUEFACK
Université de Dschang Cameroun - Master II 2016
  

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1- Les conditions de validité des motifs graves

Un seul acte préjudiciable d'une partie ne saurait suffir à légitimer le refus de l'autre de procéder au renouvellement du bail. Il faut pour cela non seulement une répétition de tels actes, mais aussi, le créancier de l'obligation doit attirer l'attention de l'autre sur ses agissements, afin notamment à l'amener à remplir convenablement ses obligations contractuelles. C'est dans ce sens que l'Acte Uniforme énonce que «ce motif ne pourra être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur par acte extrajudiciaire d'avoir à les faire cesser »114. Le bailleur ne peut donc toutefois évoquer ces fautes que s'il a mis en demeure le locataire par acte huissier et que ces fautes se sont renouvelées dans le mois suivant la mise en demeure115. La mise en

113 « S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur sortant. Ce motif doit consister soit dans l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail, soit encore dans la cessation de l'exploitation de l'activité. Ce motif ne peut être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois après une mise en demeure du bailleur, par signification d'huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire, d'avoir à les faire cesser. »

114 Article 127 de l'AUDCG de 2010.

115Il ne paie pas ses loyers ; il n'entretient plus de locaux ; il a changé la destination des lieux sans autorisation du propriétaire.

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demeure permet ainsi d'éviter tout effet de surprise envers le locataire. Autrement dit, l'on ne saurait parler de motif grave si celui-ci ne s'est pas répété à plusieurs reprises ouvrant ainsi voie à une mise en demeure de s'exécuter.

2- Les hypothèses de motifs graves et légitimes

Le refus de renouvellement peut par exception être opéré sans indemnités dans deux hypothèses. La première hypothèse : S'il existe un motif grave et légitime de refuser le renouvellement comme la faute du locataire consistant à une violation de ses devoirs de locataire116. Et la seconde hypothèse est en cas de droit de reprise. Concernant particulière la première hypothèse, le bailleur peut s'opposer à tout renouvellement s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du preneur117. En outre, il est aussi possible à un locataire de s'opposer au renouvellement demandé par son bailleur.

Primo, les motifs graves et légitimes'' dont peut se prévaloir le bailleur pour refuser le renouvellement se résument pour l'essentiel en un comportement gravement répréhensible du locataire. Il s'agira, d'après l'Acte Uniforme, soit de l'inexécution par le locataire d'une obligation substantielle du bail118 , soit la cessation de l'exploitation du fonds de commerce. La première hypothèse renvoie à une violation de la part du preneur locataire d'une obligation contractuelle. En nous référant aux articles 112 et suivants de l'AUDCG nouveau sur les obligations du locataire. Ces motifs graves et légitimes'' consisterons principalement au non-paiement ou paiement irrégulier des loyers 119 , ainsi qu'en la déspécialisation non autorisée120. Il pourrait également s'agir du défaut d'entretien et des dégradations des lieux loués par le locataire. La seconde quant à elle, consiste non seulement au défaut d'exploitation sans raison sérieuse et légitime121 mais également une exploitation non conforme ou ayant un caractère immoral. Il en sera de même des cessions et sous-locations interdites.

116Il ne paie pas ses loyers ; il n'entretient plus de locaux ; il a changé la destination des lieux sans autorisation du propriétaire.

117 Sauf cas de survenance d'une circonstance exceptionnelle faisant apparaitre de nouveaux motifs. Ex : Ruine de l'immeuble, promulgation d'une loi rendant caduc le motif précédemment invoqué. Par ailleurs, à tout moment de la procédure , le bailleur pourra également invoquer l'absence de l'une des conditions légales du droit au renouvellement, tel par exemple, le fait que le locataire a cessé d'exploiter le fonds de commerce dans les lieux loués, le fait que le local accessoire faisant l'objet du bail n'est plus nécessaire à l'exploitation du fonds.

118 Cette violation peut aller selon la jurisprudence jusqu'à celle de ne refuser de souscrire une police d'assurance si cela figurait au contrat. Voir. CCJA, Arrêt n°32/2008, Aff. Sté METALUX Sarl c/ CHEICK BASSE, Actualités juridiques n°60-61, note anonyme, ohadata J-08-134

119 En effet, payer le loyer est pour le preneur une obligation substantielle qui caractérise le bail. Un paiement est dit irrégulier s'il s'effectue avec retard ou entre les mains de toute personne autre que le bailleur ou son représentant désigné au contrat.

120 C'est-à-dire des travaux ou changement de destination des lieux loués sans autorisation du bailleur.

121 Le défaut d'entretien ne peut pas par exemple résulter d'un cas de maladie grave.

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Secundo, le preneur locataire peut lui-même s'opposer au renouvellement du bail demandé par le bailleur. L'article 105 et suivant de l'AUDCG nouveau précise clairement les obligations qui incombent au bailleur dans le cadre de l'exécution du bail. Ces obligations se résument pour l'essentiel en l'exécution des grosses réparations122 et en une garantie de bonne jouissance des lieux loués123. Ainsi, le bailleur refusant de remplir ces engagements qui sont pourtant siennes dans un contrat, il reste que le preneur peut en se basant sur cette inexécution, refuser de renouveler le bail le liant au propriétaire de l'immeuble, le bailleur.

Mais une question surgit à l'esprit, celle de savoir si l'une des parties peut fonder son refus sur des motifs ne tenant pas nécessairement à l'inexécution d'une obligation contractuelle. Ce serait notamment le cas par exemple de violences exercées par le locataire sur le bailleur, d'une attitude injurieuse, de l'abus de jouissance, de l'émission d'un chèque sans provision124 ou du comportements du bailleur, qui ne représentent pas forcément une violation spécifique du contrat, mais qui portent atteinte à la personnalité du locataire ou à celle de ses proches 125 ... Nous serions en droit de répondre à cette interrogation par l'affirmative, car il s'agit là en général des causes susceptibles de provoquer en même temps la résiliation du bail. Pour ce faire, elles doivent être exprimées de telles sortes que la partie coupable ne puisse pas se méprendre sur leur nature126.

B- L'appréciation souveraine des motifs graves et légitimes

En droit français, le juge dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation de la gravité et de la légitimité des motifs de refus127. Il s'agit d'une question de pur fait échappant au contrôle de la Cour de cassation.

122 Les grosses réparations sont notamment celles des gros murs, des voûtes, des poutres, des toitures, des murs de soutènement, des murs de clôture, des fosses septiques et des puisards (article 106 al 2).

123 Le bailleur est responsable envers le preneur du trouble de jouissance survenu de son fait, ou du fait de ses ayants-droit ou de ses préposés (article 109).

124 Certains auteurs estiment à ce sujet que « la remise d'un chèque sans provision par le locataire au propriétaire peut entraîner la détérioration de leurs rapports. Néanmoins, les motifs totalement étrangers au bail et fondés par exemple sur les relations familiales sont sans effet. De même, la faute d'un précédent locataire ayant cédé son bail ne peut être opposée au cessionnaire, sauf si la cession a porté sur le droit au renouvellement lui-même, après expiration du bail, le cessionnaire ne pouvant avoir plus de droits que le propriétaire.

125 Tribunal de district de March, 24.04.1997, Comm. Office fédéral du logement 29, n° 4 : allégations d'attouchements d'un enfant du locataire, non établies en l'espèce.

126 Voir Cass.Com. 28 mars 1962. D. 1962, p.422.

127 Pour une cession irrégulière ou une sous-location auquel le bailleur n'a pas été appelé voir 3è Civ. 9 juillet 2003, n° 02-11.621, Bull. Civ. III n° 147 ;

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D'une part, le juge peut déclarer recevables les motifs graves et légitimes invoqués par le bailleur. La jurisprudence est casuistique dans ce domaine mais de grandes tendances peuvent être dégagées. Il a été jugé que constituent des motifs graves et légitimes l'abus de jouissance128, la cession irrégulière du bail129, les infractions aux clauses du bail130, un changement de destination des lieux131, une inexploitation132, des loyers impayés après un commandement de payer d'un mois133, des violences sur la personne du bailleur134. Plus largement la jurisprudence a retenu que des motifs extracontractuels pouvaient constituer des motifs graves et légitimes de refus de renouvellement sans indemnité. En effet, le motif grave et légitime ne doit pas forcément être rattaché à une clause du contrat mais peut seulement avoir un lien suffisant avec l'exécution du bail commercial. L'interprétation de la jurisprudence est souple à cet égard. À titre d'illustration, on peut citer le cas de la production de documents gravement inexacts en cours d'opérations d'expertises135 ou la production auprès d'un nouveau bailleur d'un bail qui s'avère être faux sur lequel la signature du précédent bailleur a été imitée136.

D'autre part, étant donné que la preuve du motif grave et suffisant est subordonnée à l'appréciation souveraine des juges du fond, ces derniers peuvent retenir que les motifs invoqués sont irrecevables. À titre d'exemples, on peut citer l'exercice d'activités complémentaires non autorisées137, l'accumulation de retards de loyers et charge expliquée par un contexte financier difficile, le preneur ayant toujours régularisé sa dette, l'exécution de travaux sans les autorisations requises mais rendus nécessaires par l'obligation d'adapter le fonds à la nouvelle activité connue et acceptée par le bailleur ou encore l'inexécution de

128 CA Paris, 16ech. Sect. A, 16 janvier 2002 ; 3eCiv. 20 juin 1979, Rev. Loyers 1980, p. 42 ; CA Paris 16ech. Sect. A, 26 avr. 2006, n° 05/01903.

129 CA Paris 16ech. Sect. A 14 janvier 1997, n° RG : 95/11149 ; CA Montpellier, 1ere ch. Sect. B, 14 février 2006..

130 Pour un abandon du commerce voir Com. 31 janv. 1949, Bull. Civ. III, n° 51 ; pour un cinéma classé commerce de luxe et projetant, sans autorisation, des films érotiques voir CA Paris 29 janvier 1987 D. 1987, IR 33.

131 Pour un cinéma classé commerce de luxe et projetant sans autorisation des films érotiques voir CA Paris 29 janvier 1987 D. 1987, IR 33.Ca Paris 16e ch. Sect. B, 22 nov. 2007, n° RG : 06/17666; 2 mars

2006 RG : 05/08364 ; pour l'utilisation à usage de chenil d'un local destiné à l'usage de débit de boissons voir Civ. 3 e, 3 avril 2001, n° 99-19.768 Gaz. Pal. 2002, somm. p. 162.

132 Com. 6 juill. 1960 D. 1961, somm. 57 ; Com. 8 févr. 1965, D. 1965. 292 ; CA Montpellier 1re ch. Sect. B., 5 juin 2007, n° RG : 06/03501.

133 Civ. 3e 12 juill. 1989, n° 88-12.539, Loyers et copr. 1989, n° 484 ; Civ. 3e ,17 févr. 1993, n° 89-12.597, Loyers et copr. 1993, n° 225

134 Civ. 3e, 28 mars 1995, n° 93-16.657, Rev. Loyers 1995, p. 414.

135 Civ. 3e, 19 déc. 2001, n°00-14.425, Bull. Civ. III n°156 ; BRDA 2/2002, n°10.

136 Civ. 3e ,11 juin 2008, n°07-14.551, Bull. Civ. III, n°103.

137 Civ. 3e, 1er avril 1998, n°96-14.638, Bull. Civ. III, n°77, Gaz. Pal. 28 août 1998, pan. 228.

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réparations nécessaires au bon entretien de l'immeuble lorsque la vétusté et la négligence du bailleur sont en partie responsables. L'on comprend bien que la jurisprudence Française, puisque c'est bien d'elle dont il s'agit ici, part de l'idée selon laquelle le juge peut donner une interprétation constructive d'une notion afin d'apprécier si oui ou non celle-ci peut être considérée comme faute ou pas. Nous pouvons aussi soupçonner les juges communautaires de l'Ohada d'user dans certaines circonstances d'un pouvoir d'appréciation des faits afin d'en dégager une interprétation claire.

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Parvenu au terme de ce chapitre, il est possible de retenir que la mise en demeure, une fois sa validité acquise produira inéluctablement des conséquences juridiques qui seront graves. Nous relevons que ces conséquences ou effets juridiques auront un impact sur l'existence du bail. Alors, il reviendra à la partie défaillante de s'exécuter avec diligence afin d'éviter que la mise en demeure qui lui est adressée par le créancier de l'obligation ne produise les effets y attachés.

En outre, la situation est autre lorsque la mise en demeure telle que réglementée par l'article 133 de l'AUDCG nouveau est absente.

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L'ABSENCE DE LA MISE EN DEMEURE

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille