Paragraphe 2- le refus du renouvellement justifié du
bail à usage professionnel
Comme il était déjà admis sous l'ancienne
législation, le droit au renouvellement du bail est acquis au
locataire-commerçant. Le renouvellement est un droit qui confère
au preneur une illusion de propriété ; raison pour laquelle Yves
GUYON le qualifie de «propriété commerciale ».
Il est ouvert au locataire qui justifie avoir exploité, avec l'accord du
propriétaire, l'activité prévue au bail pendant une
durée d'au moins deux(02) ans111. Les délais de la
demande de renouvellement sont désormais plus réduits, notamment
en ce qui concerne le bail à durée déterminée : la
partie sollicitant le renouvellement, généralement le preneur,
doit agir par acte extrajudiciaire au plus tard trois(03) mois avant la date
d'expiration du bail. Faute de quoi, il est déchu de son droit au
renouvellement. Quant à l'autre, très souvent le bailleur, elle
doit faire connaître sa réponse au plus tard un (01) mois avant
l'expiration du bail, faute de quoi il est censé avoir
accepté112. Ainsi, le propriétaire de l'immeuble peut
refuser le renouvellement du bail en versant au preneur une indemnité
d'éviction fixée d'accord parties ou par le juge. Le bailleur
peut aussi dans certains cas, refuser le renouvellement sans être tenu au
versement d'une indemnité au locataire. L'Acte Uniforme de 2010
prévoit en son article 127, les cas que le bailleur peut invoquer pour
s'exonérer du paiement de l'indemnité.
110 « Tout fait quelconque de l'Homme, qui cause
à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est
arrivé, à le réparer ». Article 1382 du Code
civil
111 Aux termes de l'article 91(désormais l'article 123)
de l AUDCG : « Le droit au renouvellement du bail à
durée déterminée ou indéterminée est acquis
au preneur qui justifie avoir exploité, conformément aux
stipulations du bail, l'activité prévue à celui-ci,
pendant une durée minimale de deux ans(...) ».
112 Voir l'article 124 de l'AUDCG : « Dans le cas du
bail à durée déterminée, le preneur qui a droit au
renouvellement de son bail en vertu de l'article 123 ci-dessus peut demander le
renouvellement de celui-ci, par signification d'huissier de justice ou
notification par tout moyen permettant d'établir la réception
effective par le destinataire, au plus tard trois mois avant la date
d'expiration du bail. Le preneur qui n'a pas formé sa demande de
renouvellement dans ce délai est déchu du droit au renouvellement
du bail. Le bailleur qui n'a pas fait connaître sa réponse
à la demande de renouvellement au plus tard un mois avant l'expiration
du bail est réputé avoir accepté le principe du
renouvellement de ce bail. »
58
La mise en demeure en matière de rupture du bail
à usage professionnel en Droit de
l'Ohada
Particulièrement à notre analyse, le premier
alinéa de cet article113parle de motifs graves et
légitimes pouvant motivés l'une des parties à refuser le
renouvellement. À cet effet, si l'une des parties se rend fautive et est
mise en demeure par l'autre de faire cesser le trouble, sans cependant qu'elle
n'obtempère, la partie défenderesse pourra invoquer les motifs
graves et légitimes ayant justifié ce refus (A),
lesquels feront l'objet d'une appréciation par le juge
(B).
A- L'invocation des motifs graves et légitimes
liées la faute d'une partie
Le lien contractuel existant entre le bailleur et le locataire
doit être marqué par la confiance et l'honnêteté
contractuelle. Lorsque l'une des deux (02) parties s'aventurent à ne pas
exécuter l'une de ses diverses obligations, elle commet une faute qui
selon sa gravité peut conduire à un renouvellement du bail
refusé. Les motifs graves et légitimes sont ainsi compris comme
des raisons flagrantes étant susceptibles d'entraîner un refus de
renouvellement. Mais avant que ceux-ci ne soient invoqués, ils doivent
obéir à certaines conditions (1). Une fois leur
validité acquise, il sera question de présenter les
hypothèses de motifs graves et légitimes (2).
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