4.1 Des transports au centre d'enjeux multiples
Depuis la fin des années 1990, la question de
l'organisation des transports alternatifs est au coeur des
préoccupations des pouvoirs publics dans les pays du Sud et notamment en
Afrique. À ce sujet, on peut faire référence en Côte
d'Ivoire à la loi n°95-349 du 03-08-95122. Au plan
africain, on peut citer le programme SSATP (Sub Saharian African Transport
Program) lancé par la Banque mondiale à la fin des années
1980 dans lequel le transport privé est dorénavant pris en compte
et avec lequel il faut composer. Pour autant, le risque de l'incertitude est
toujours présent d'autant plus que l'évolution des lois a
compliqué les interventions dans ce secteur des transports en
introduisant des rapports de forces, des négociations, des enjeux de
pouvoir, des compétitions entre différentes institutions et
acteurs aux échelles différentes. Les règles, les
procédures, les circuits et modalités de décision, etc.
s'inscrivent aussi dans des rapports plus ou moins conflictuels entre les
pouvoirs publics, les collectivités territoriales et les groupes
d'entrepreneurs privés. Dans la ville d'Abidjan par exemple,
l'organisation des taxis collectifs en général et
singulièrement, les woro-woro intercommunaux n'échappe pas
à ce type de situations comme on peut le constater dans l'encadré
suivant.
122 Loi relative à l'organisation des transports urbains
d'Abidjan
237
Tableau 15 : Répartition des rôles entre les
différents acteurs dans le schéma d'organisation des woro-woro
intercommunaux
Acteurs
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Rôle
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Etat ou ses Représentants
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Contrôle de routine (police, vignette)
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Mairie
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Perception de la taxe de stationnement (non officielle), soutient
parfois explicitement ou indirectement la mise en circulation des woro-woro
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District
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Taxe ou laissez-passer (non officiel), soutient tacitement ce
type de transport
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Syndicats
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Prise d'initiatives, contrôle et perception directe de
taxe, localisation de gare en accord avec la mairie ou le district ou avec
certains des agents des collectivités.
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Comités de Quartiers
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Prise d'initiatives, contrôle et perception de taxe en
accord avec certains agents des collectivités (mairie, district)
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Propriétaire de véhicule (activité
occasionnelle)
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Prise de risque, il transforme son véhicule familial en
véhicule de Transport sans autorisation (achat de conscience des agents
commis pour le contrôle, collaboration avec les différents groupes
de syndicats). But: rendre service, gagner un peu d'argent pour l'achat de
carburant
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Professionnel (activité Permanente)
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Prise de risque, un véhicule familial ou taxi compteur
transformé en woro-woro
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Usagers
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Prise d'initiative, incitation au covoiturage payant en cas de
pénurie de transport dans les transports publics (grève,
événement politique ou sportif de grande ampleur),
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Source : nos entretiens
La montée en puissance des woro-woro intercommunaux
s'effectue dans un contexte institutionnel non stabilisé. Si la ville
d'Abidjan, actuel district existe depuis presque une cinquantaine
d'années en Côte d'Ivoire, les mairies et leurs agences techniques
n'existent que depuis 1980. De plus, les récentes lois de
décentralisation de 1995 et de 2000 ont ouvert un espace de
négociation des rôles
238
entre les différents ordres de collectivités
locales et les services déconcentrés de l'État, alors
même que des évolutions se déroulaient au niveau des
transports publics et la société civile123. Les
woro-woro et leur mode d'organisation reflètent donc les nouvelles
relations qui s'établissent entre des populations
précarisées et leurs institutions marquées par des
évolutions socio-économiques et politiques qui les contraignent
à des ajustements permanents124.
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