1.2.3 Les termes de «Dioula» ou de
«Dioulatchè»
Les deux termes viennent du vocable «Dioula» et
signifient négociant, commerçant. Dans le milieu du transport,
ces deux termes renvoient à la structure de la propriété.
Ainsi les propriétaires qui n'ont qu'un seul véhicule sont
désignés par le terme de «Dioula». Quant au terme de
«Dioulatchè», il désigne tout propriétaire qui a
plus d'un véhicule à sa possession. De plus, des travaux existent
et qui justifient clairement l'ancienneté et la domination des Dioula
dans le transport. Il s'agit de l'étude d'Aka Kouadio Akou
intitulée:«l'organisation des transports collectifs à
Abidjan» (thèse de doctorat). Dans cette étude
réalisée en 1987, et particulièrement au chapitre relatif
à l'identité des propriétaires des gbaka et taxis
collectifs, il est parvenu aux résultats suivants:
«Sur un échantillon de 100 personnes
enquêtées, 58% sont Dioula dont 22% sont propriétaires de
leurs véhicules et 36% sont salariés. Les autres ethnies de la
Côte d'Ivoire représentent 26% et les étrangers 16%
(p.95)».
L'ancienneté et l'importance des entrepreneurs Dioula
dans le secteur des transports relèvent d'une évidence
historique. Mais à la fin des années 1980 et surtout au milieu
des années 1990, la crise et l'assouplissement de la
règlementation sur les conditions d'exercice du transport urbain ont
ouvert une brèche à l'entrepreneuriat et popularisé les
pratiques de l'offre alternative. La concurrence dans le transport semble
limiter les investissements massifs des Malinké. Aujourd'hui, le secteur
du transport est composé, en grande majorité, d'une multitude de
petits acteurs qui rendent la rentabilité de plus en plus
aléatoire. Ces appellations liées au répertoire
socioculturel Malinké ainsi que l'ancienneté et l'importance des
entrepreneurs Dioula dans le secteur des transports indiquent que ces types de
transport n'ont pas leur moteur dans la ville d'Abidjan, mais dans la culture
et les pratiques des populations urbaines migrantes.
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1.3 Naissance d'Abidjan et apparition de mode de
transport de type africain
La première capitale de la colonie française de
Côte d'Ivoire fut Grand Bassam, ville côtière située
à 50 km à l'ouest de l'actuelle Abidjan. Le déplacement
des colons de Bingerville vers Abidjan a contribué à
l'accroissement des activités administratives et commerciales. À
cette époque, le transport collectif était monopolisé par
les colons et les Libano-syriens lesquels étaient également les
principaux acteurs commerciaux de la colonie de Côte d'ivoire (Chauveau
1980). Les dessertes de ces transports épousaient les contours de la
ville partagée selon le modèle de séparation entre
quartiers européens et quartiers africains (Antoine, Dubresson et al.
1987).
La ville d'Abidjan a amorcé son développement
dès son érection en capitale de la colonie en remplacement de
Bingerville en 1934. À cette date le coeur de la ville était
organisé autour de la fonction ferroviaire. La ville jouait deux
fonctions principales. Ce sont la fonction commerciale et la fonction
administrative. L'ensemble de ces activités ainsi que les
différentes offres de transport se déroulaient autour de ces
trois quartiers qui constituaient la ville d'Abidjan. Il s'agit notamment du
Plateau, d'Adjamé et de Treichville.
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